Bimbo ironique, elle a rénové l’archétype de la belle blonde de son humour ravageur. Garçon chétif et sensible, il s’est réinventé en musclor pour devenir le fantasme n°1 de la communauté gay mondiale. Louise Bourgoin, François Sagat: rencontre entre deux sex-symboles atypiques.
Ils ont à peu près le même âge. Lui, à peine plus de 30 ans ; elle, à peine moins. Tous deux sont des sex-symbols. Mais des sex-symbols légèrement décalés, légèrement self-conscious, qui ne cessent de détricoter les mailles de l’emploi de bombasse qu’ils ont pourtant construit.
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Elle, c’est Louise Bourgoin, actrice qui a adjoint à un corps de topmodel et une blondeur de bimbo une causticité et un sens du burlesque très personnels. Lui, c’est François Sagat, une musculature de molosse, mais un regard d’enfant, un corps-costume hyper viril qui croise de façon complexe les signes du masculin et du féminin.
Cette star du X gay a quitté le porno il y a un peu moins d’un an, mais a enchaîné depuis deux films d’auteur : L. A. Zombie de Bruce LaBruce et Homme au bain de Christophe Honoré (tous deux en compétition au Festival de Locarno).
Peut-on être féminine et féministe ? Deux garçons qui s’embrassent, est-ce excitant pour une fille ? Lady Gaga est-elle belle ou moche ? Se lasse-t-on d’être sexy ? Quelques sujets de conversation d’un dialogue intimiste au bout d’une longue journée de shooting.
Est-ce que ça vous amuse de jouer avec l’imagerie sexy ?
François Sagat – Moi, c’est vraiment la base de mon activité. A force, c’est assez fatigant. Quand tu fais que ça, t’en as un peu marre. T’as envie de te rhabiller un petit peu. Mais là, aujourd’hui, pour Les Inrocks, ça m’amuse parce que c’est au second degré et que c’est avec une fille. C’est toujours plus marrant avec une fille…
Est-ce qu’à un moment dans ta vie, tu as choisi de devenir un sex-symbol ?
François Sagat – Sex-symbol, ça veut trop rien dire. Je le suis peut-être auprès de certains gays. Dans ma vie de tous les jours, je l’oublie assez facilement. En fait, quand j’étais adolescent, j’étais plutôt à l’inverse de cette imagerie sexy. J’étais chétif, j’avais des cheveux longs, on me disait : « Bonjour mademoiselle », quand j’entrais dans une boulangerie.
A ma grande surprise, quand j’ai commencé à me transformer physiquement, on s’est mis à me trouver sexy. Ça m’a sûrement permis de me prouver des trucs, de régler un problème.
Et toi Louise, est-ce que tu t’es construite comme sex-symbol ?
Louise Bourgoin – Détourner de façon comique les codes du sex-appeal, parodier l’imagerie de la pin-up pour la transformer en créature castratrice – avec par exemple un phallus entre les dents plutôt qu’un cigare -, c’était déjà au coeur de mon travail quand j’étais étudiante aux Beaux-Arts.
A cette époque, je faisais du mannequinat pour payer mes études et on m’avait proposé de poser dans une vitrine de grand magasin, mannequin vivant en maillot de bain. J’avais transformé ça en performance. Je suffoquais et je me cognais contre la vitre comme un insecte affolé qui veut sortir. Je me suis fait virer manu militari.
Je faisais aussi des meubles à partir d’hommes, en partant des tables en forme de femmes à genoux d’Allen Jones dans Orange mécanique, mais en inversant le sexe.
Je moulais ces hommes dans des rideaux trempés dans de la résine. Il en restait la trace sur le rideau. J’en faisais une sorte de pièce meublée de façon fantomatique. En tout cas, le rapport au corps et au genre, ça me passionne depuis toujours. Et quand je fais des photos pour la presse, ça m’amuse de surjouer l’objet fétichisé. Dans le film de Gilles Marchand, L’Autre Monde, je suis aussi fétichisée. Je ne parle presque pas, je dois être une présence très fantomatique, mais un peu iconique.
La télévision, avec la météo du Grand Journal, t’a permis d’imposer la bimbo blonde comme corps comique, burlesque. Mais le cinéma t’a ramenée vers des emplois plus premier degré de femme fatale, blonde de films noirs…
Louise Bourgoin – Oui, c’est vrai, mais le cinéma peut lui aussi avoir ses blondes burlesques. Par exemple Cameron Diaz. Elle joue avec la féminité, elle pastiche la blonde cheesy tout en l’étant un peu…
Ces dernières semaines, j’ai accompagné L’Autre Monde en province, et souvent dans les débats qui suivent le film, on me demande si ça n’est pas difficile d’être nue à l’écran. Et je réponds que non, parce que je ne me sens pas vraiment érotique. Je n’ai pas tellement de seins, j’ai l’impression d’avoir un torse de garçonnet… Si j’avais une forte poitrine, peut-être que je voudrais la cacher, mais là, torse nu, j’ai l’impression de ne rien dévoiler.
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