Depuis peu, une certaine Solange se met en scène dans des vidéos désopilantes. Depuis son appartement, elle nous parle d’elle et du monde : une divagation drôle et poétique, à rebours des codes dominants du web.
Un appartement à Paris, parquet, murs blancs. Jolie lumière. Une jeune fille perdue, cheveux propres. Une voix lente et précise qui fait penser au Cinéma de minuit, un peu au Desproges de La Minute nécessaire de monsieur Cyclopède. Elle a un prénom assez suranné, elle s’appelle Solange. On sait très peu de choses d’elle, mais ce n’est pas grave au fond, on n’a pas besoin de plus. Solange a grandi au Québec, certainement parmi les loups. Elle a une formation de comédienne, s’est installée à Paris, tourne et monte elle-même, donnant corps à chacune de ses mises en ligne à de déroutantes aventures intérieures.
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Elle publie au fil du temps des vidéos qui ne durent qu’une poignée de minutes et qu’on revoit à l’envi.
Solange te parle journal, victoire, braguette, pipi, exorcisme, indigestion, ustensiles, accouplement, obésité, on en passe et des meilleures. Solange soliloque, Solange phosphore, Solange envisage, avec une douceur et un calme qui contrastent avec la vitesse et la frénésie propres au net. Chez Solange, pas de “parler vite”, pas de “en mode”, pas de “tavu”, pas de LOL, pas de cascades : c’est une certaine rigueur qui sous-tend chacune de ses interventions, on pourrait presque employer pour Solange l’expression de “nouvelle vague” (rapport aux internets). Les mots sont pesés, se détachent comme des petites saucisses. Elle nous perd un peu, nous rattrape parfois en fin de vidéo, mais pas toujours, on ne s’en plaint pas.
Depuis son apparition, l’appartement de cette jeune femme est devenu incontournable, l’addiction est forte, pas une journée sans que l’on ne se rende sur sa page pour vivre en sa compagnie ces quelques instants hurluberlus. On sait que Solange est comédienne et on l’imaginerait bien dans un moyen métrage de Guillaume Brac (Un monde sans femmes, à voir ou à revoir) ou de Benoît Forgeard (le très plaisant Réussir sa vie, à ne pas manquer), aux côtés de Vincent Macaigne en short, par exemple : il y a chez Solange une façon moderne de dire le monde, de dire (ou de faire) des bêtises, toujours avec élégance – même quand c’est cru.
Il y a aussi chez Solange une fausse neurasthénie, une nonchalance aimable qui font la différence. A chacune de ses interventions, elle semble rendre compte d’une quarantaine choisie, d’une mise à l’écart délibérée. Les jours passent, l’actualité suit son cours, mais Solange, loin du monde, poursuit sa petite quête à elle : elle soulève les tapis, se construit des petites cabanes mentales, inspecte les lieux insolites de son chez-elle. Elle n’hésitera sans doute pas à saisir une loupe ou une encyclopédie pour aller plus loin, pour se persuader des choses ou les voir autrement. Il ne fait aucun doute que dans quelques semaines, les télévisions, toujours à la recherche d’une bonne pastille, se jetteront sur Solange.
Sur Twitter : @SolangeTepParle
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