Depuis les annonces surprises de l’éviction du fondateur et PDG de Skyrock Pierre Bellanger et de la mise en vente prochaine de la radio, le public et les animateurs se mobilisent. Mercredi matin, ils étaient réunis devant les studios pour défendre « la liberté d’une génération entière ».
Rien ne va plus chez Skyrock. Selon L’Express, un mandat aurait été confié à Jean-Marie Messier et à sa banque d’affaires pour étudier la vente de tout ou partie du groupe Skyrock. Plusieurs groupes, comme NextRadio, TF1 ou encore le groupe Bolloré, pourraient être intéressés par la reprise de la radio et de ses blogs.
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Une information qui intervient dans un contexte déjà très tendu. Ce matin, au son de haut-parleurs crachant du hip-hop et des « Radio libre en danger ! », des dizaines d’auditeurs étaient massés devant les studios pour protester contre l’éviction du fondateur et PDG historique de la station, Pierre Bellanger, de la direction générale (il reste président).
« Si Skyrock est la seule chose qui nous motive à nous lever le matin, c’est grâce à lui », a expliqué un auditeur.
« Quand ils ont annoncé la nouvelle hier soir, j’ai cru qu’ils déconnaient, comme d’habitude, raconte Franck, 27 ans, auditeur fidèle depuis les débuts de Skyrock. Et puis, quand Romano [l’un des animateurs, NDLR] s’est mis à pleurer, j’ai compris que c’était pas une blague. Malheureusement. »
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L’équilibre de la radio libre créée en mars 1986 a été bouleversé mardi à 18h. Au cours d’un conseil d’administration, Pierre Bellanger a appris qu’il perdait la direction générale de la radio Rap – R’n’B au profit de Marc Laufer, ancien patron du groupe Next Radio TV et de ses filiales (RMC, BFM). Bellanger serait tombé des nues, d’après son attachée de presse Julie Rambeaud.
« Préserver la relation construite avec nos auditeurs »
Les salariés, qui n’ont pas été informés en personne de cette décision, ont découvert la nouvelle dans une dépêche AFP. Dès 21h mardi soir, une soixantaine d’entre eux sont venus occuper les locaux de la radio pour réclamer la réintégration de « celui qui a tant fait pour Skyrock ».
L’animateur star depuis 15 ans, Difool, a choisi de prendre ouvertement position dans son émission du soir, Radio libre.
« On aime cette radio parce qu’elle est porteuse d’une culture, de valeurs, a-t-il expliqué ce matin. Cette liberté de ton, on la doit à Pierre Bellanger. On doit préserver la relation spéciale qu’on a construite avec nos auditeurs. »
Fred, l’animateur de Planète Rap, dénonce quant à lui les méthodes employées.
« On se mobilise d’une part parce que notre PDG a été débarqué de manière très brutale et, d’autre part, parce qu’on en a été informé par les médias. Cette façon de faire nous inquiète pour la suite. »
Le rap pas assez vendeur ?
La suite des événements est pour l’instant très floue. Ce qui cristallise les inquiétudes, c’est la volonté prêtée à Axa, l’actionnaire majoritaire, de réaliser 30% de rentabilité supplémentaire. Pour les salariés, un tel objectif risquerait de faire perdre à la station son identité. « On a un ton libre, un format à part. Que se passera-t-il si on nous dit d’un coup que le rap n’est pas assez vendeur ? » s’interroge Julie Rambeaud.D’autant que, d’après les équipes, Skyrock est rentable.
« On a quatre millions d’auditeurs par jour, notre émission de soirée avec Difool est première en termes d’audiences… On gagne de l’argent. Peut-être moins qu’avant, mais on en gagne. »
La réputation du remplaçant de Pierre Bellanger sème aussi le doute. Sans souhaiter être cité, un membre de l’équipe confie :
« Dans son interview au Point, Laufer dit ne pas être qu’un « cost-killer ». Il n’empêche que son métier, c’est de faire des économies, comme il l’a -bien- fait chez Nextradio. Il va vouloir réduire les coûts et restructurer. Ce qui passera probablement par une mutualisation des fonctions, peut-être un plan social. »
La rumeur de la suppression d’une cinquantaine de postes sur 200 court dans les couloirs.
Des inquiétudes « compréhensibles mais inutiles »
Contacté par les Inrocks pour réagir à ces inquiétudes, Marc Laufer a déclaré les juger « compréhensibles mais inutiles » :
« Il n’a jamais été question de changer d’une virgule le fonctionnement de cette radio, qui doit justement son succès à sa formule » a-t-il assuré. « Je ne suis pas là pour restructurer à tout prix. On a de bons fondamentaux, les problématiques de Skyrock concernent plus le développement commercial que la réduction des coûts. Quant aux objectifs chiffrés qui circulent, je ne sais pas d’où ils viennent. »
Depuis l’annonce de l’éviction de Pierre Bellanger, le soutien des auditeurs ne faiblit pas, notamment via les réseaux sociaux. Depuis hier soir, des dizaines de milliers de personnes ont rejoint la page Facebook de soutien à Skyrock.
« Le mot Skyrock a été énormément tweeté dans le monde, se réjouit l’animateur Fred. Hier soir, on a reçu 70 000 messages de soutien au cours de l’émission de Difool qui dure trois heures. D’habitude, on reçoit entre 15 et 20 000 messages par jour. »
Le principal intéressé, Pierre Bellanger, qui a passé la nuit dans son bureau et se trouvait toujours dans les locaux ce matin, n’a quant à lui pas souhaité rencontrer la presse, de peur d’être accusé d’avoir initié le mouvement.
Pauline Turuban
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