Avec Sex Story, Philippe Brenot et Lætitia Coryn réussissent haut la main à nous raconter l’histoire de la sexualité en Occident depuis l’origine du monde.
A la fin des années 1970, les jeunes téléspectateurs découvraient, fascinés, le tumulte du passé au fil des épisodes d’Il était une fois… l’Homme. Malgré son ethnocentrisme et ses raccourcis, la série animée d’Albert Barillé rendait l’histoire accessible et passionnante en l’incarnant dans des personnages récurrents. Dans Sex Story, le psychiatre et anthropologue Philippe Brenot et la dessinatrice Lætitia Coryn proposent une histoire de la sexualité en Occident des origines à nos jours qui reprend le même principe – Noah et Saw remplaçant Pierrot et Pierrette (pour cela aussi, les temps changent) – avec le même résultat, soit un album à la fois didactique, distrayant et fort à propos.
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A la différence du manga polisson Step up Love Story, les sujets ne procèdent pas des interrogations d’un couple contemporain mais sont présentés selon une chronologie qui débute il y a 2 millions d’années. Outre sa clarté pédagogique, ce choix possède un triple avantage. Le premier est d’introduire une distance qui désamorce les ricanements au fond de la classe. Le deuxième est de rappeler clairement que les “mœurs” sont fonction des lieux et des époques. Et le troisième, bien sûr, de montrer comment les allers et retours entre (brèves) périodes de tolérance et (navrantes) périodes de rigorisme moral et religieux ont peu à peu forgé les conventions de notre société.
Au gré de l’évolution de la perception de l’homosexualité ou de la sexualité de l’épouse, mais aussi des découvertes scientifiques, l’ouvrage récuse ainsi efficacement toute idée de “normalité” et déconstruit les codes des genres. Démêlant les questions complexes, allégeant d’un sourire les sujets graves ou rébarbatifs, Sex Story exploite tout le potentiel vulgarisateur de la BD et pourrait tenir lieu de parfait manuel d’introduction à l’éducation sexuelle si cette dernière n’était si cruellement négligée, laissant notre société entre gêne, déni et immaturité. En annexe, les auteurs soulignent opportunément qu’aux Pays-Bas, où cet enseignement existe dès le primaire, le taux de grossesses non désirées et d’avortements est le plus bas au monde. A toi de jouer, Najat !
Jean-Baptiste Dupin
Sex Story de Philippe Brenot et Lætitia Coryn (Les Arènes BD), 204 pages, 24,90 €
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