Seulement âgée de 12 ans à l’époque, la militante s’était fait remarquer en prononçant un discours poignant à l’occasion du premier sommet de la Terre en 1992. Elle continue son combat en faveur de l’environnement.
Elle est en quelque sorte une pionnière. Si la jeune activiste Greta Thunberg parvient à mobiliser des milliers de jeunes avec sa « grève pour le climat », et a été invitée à s’exprimer pendant le sommet pour le climat organisé par l’ONU ce lundi 23 septembre, elle n’est pas la première adolescente à monter à la tribune. Vingt-sept ans auparavant, la Canadienne Severn Cullis-Suzuki invitait déjà les dirigeants du monde entier à agir pour préserver l’environnement. Celle qui était alors âgée de seulement 12 ans s’était illustrée en prononçant un discours lors du premier sommet de la Terre organisé par les Nations Unies à Rio en 1992. Portrait d’une militante écologiste qui n’a jamais cessé son combat en faveur de la justice intergénérationnelle.
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“N’oubliez pas pourquoi vous venez à ces conférences et pour qui vous le faites.”
« Je suis ici pour parler au nom de toutes les générations à venir. Je suis ici pour parler au nom des enfants affamés du monde entier dont les cris ne sont pas entendus. Je suis ici pour parler au nom des innombrables animaux qui meurent parce qu’ils n’ont pas d’autre endroit où aller », tonnait-elle à la tribune de l’ONU devant un parterre d’hommes politiques venus des quatre coins du monde pour discuter des enjeux autour du dérèglement climatique.
Par ces mots, la jeune militante tentait d’exprimer ses peurs face aux conséquences désastreuses que le réchauffement climatique engendre et soulignait la nécessité d’agir immédiatement pour laisser un monde viable aux générations futures. Si Severn Cullis-Suzuki n’a pas bénéficié de la notoriété dont tire aujourd’hui parti sa cadette pour mobiliser les foules, ce discours poignant n’en a pas moins marqué son époque et reste, encore à l’heure actuelle, largement partagé sur les réseaux. Il marque également le début d’un combat que la jeune femme n’a jamais cessé de porter depuis.
Les jeunes sont une force pour l’écologie
Fille du généticien et environnementaliste David Suzuki et de l’écrivaine Tara Cullis, tous deux militants écologistes, Severn Cullis-Suzuki prend conscience très tôt des enjeux liés à l’écologie et créé à l’âge de 9 ans l’ONG Environmental Children’s Organization avec quelques amis. C’est avec ce groupe qu’elle se rend au sommet de la Terre et prononce le fameux discours pour lequel elle sera ovationnée. Bien que la communauté internationale n’ait pas réellement répondu au cri d’alerte lancé par l’adolescente par les actes, sa prise de parole reste un discours qui a marqué les esprits.
Celle qui est aujourd’hui âgée d’une quarantaine d’années et maman de deux enfants, continue d’ailleurs de croire que le combat des jeunes est primordial pour faire avancer la cause environnementale. Lors d’un entretien accordé à Libération et publié le 22 septembre, Severn Cullis-Suzuki est revenue sur l’action menée par Greta Thunberg qu’elle trouve « très intelligente et cohérente ». Et souligne l’importance de ce combat, qu’elle a elle-même commencé à mener vingt-sept ans auparavant. A une époque où les effets néfastes de nos modes de vie sur l’environnement étaient beaucoup moins mis en avant et les enjeux liés à l’écologie bien moins compris. L’occasion pour elle de rappeler l’impact que peuvent avoir les jeunes sur le monde : « Quand, avec mon groupe d’enfants écolos, nous avons entendu parler du sommet de Rio en 1992, nous nous sommes dit que nous devions y aller pour représenter les générations futures. Adulte, je n’aurais jamais eu ce culot, cette audace. Aujourd’hui, nous devons relever un défi gigantesque, qui est de sortir la société entière des énergies fossiles en très peu de temps. Donc nous avons besoin du formidable esprit des jeunes. »
Plusieurs cordes à son arc
Pendant les années qui suivent sa prise de parole devant les Nations Unies la jeune femme multiplie les actions visant à sensibiliser les populations à l’écologie. En 2002, alors qu’elle vient d’obtenir un baccalauréat universitaire en sciences en biologie à l’université Yale, l’activiste participe à son second sommet de la Terre. Cette fois-ci en tant que membre du comité consultatif de Kofi Annan. Severn Cullis-Suzuki a d’ailleurs confié à Libé qu’elle continuait de croire en la nécessité de ces sommets organisés par l’ONU. Selon elle, l’institution doit incarner le « vrai leadership » pour pousser les dirigeants nationaux à agir. « Hélas, on ne le voit pas encore », déplore-t-elle.
Pour rendre visible sa cause la jeune femme a également animé plusieurs émissions dont le Suzuki’s Nature Quest. Dans ce programme destiné aux enfants et diffusé par chaîne Discovery Channel l’activiste donne à voir la beauté de la nature en partant l’explorer avec son père. Dans un autre programme intitulé Water Stories, Severn Cullis-Suzuki analyse les problématiques liées à l’utilisation de l’eau et expose le point de vue des populations indigènes avec cet élément. L’émission fera l’objet de quatre saisons et sera diffusée pendant plusieurs années par le Réseau de télévision des peuples autochtones (APTN), témoignant, une fois de plus, de l’implication de la jeune femme dans la cause environnementale.
Un engagement dans la diffusion de la culture des peuples autochtones
Depuis, l’activiste s’engage pour que les peuples autochtones, qui entretiennent un rapport différent du nôtre à leur environnement, soient entendus. Très impliquée dans la promotion de la culture du peuple haïda, auquel appartient le père de ses enfants, Severn Cullis-Suzuki milite désormais pour « la diversité dans le monde naturel et la société humaine ».
Elle souligne d’ailleurs dans son entretien avec Libération la nécessité « pour faire face au crash climatique et à l’extinction de masse des espèces » d’apprendre des modes de vies alternatifs ; notamment auxquels se plient les cultures autochtones depuis des millénaires. « Les décisions au sujet des ressources naturelles et du reste du vivant sont basées sur la réciprocité et le respect. Cela change totalement la façon dont les décisions sont prises. (…) Si le peuple saumon se fait rare dans cette rivière, il faut arrêter de le pêcher. C’est un savoir basé sur des millénaires de survie, de simples constats : Si on prélève trop, l’année suivante, on meurt de faim », expliquait-elle.
Severn Cullis-Suzuki a également fait l’objet d’un documentaire réalisé par Jean-Paul Jaud et diffusé en 2009. Dans Severn, la voix de nos enfants, la jeune femme revient sur le discours qu’elle a prononcé en 1992 et fait le point sur les engagements que nous devons encore prendre pour sauvegarder la biodiversité. Tout au long de ce long-métrage, le réalisateur et l’écologiste mettent en lumière une question essentielle : quel monde laisserons-nous aux générations futures ?
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