Phoenix du PAF, Michel Denisot nous fait goûter une fois de plus à l’esprit-Cannes, sauce Canal. Verdict ? Un « Journal du Festival » chiadé, cinéphile et ensoleillé.
Définition d’un pléonasme : Michel Denisot déambulant sous les palmiers de la Croisette. Cannes et Denisot, c’est un condensé de nostalgie, presque un vieux couple, 32 ans au compteur. Difficile d’oublier ces images du jeune journaliste déconnant avec un Coluche burlesque aux abords de la piscine azurée de l’Hôtel Martinez. Diffusée depuis le 16 mai sur la chaîne cryptée, la quotidienne Le Journal du Festival signe ainsi le retour au soleil d’une voix familière. Smoking chic, ton complice de l’intervieweur qui a de la bouteille et emblématique diction tant de fois gaussée à l’appui, l’ancien présentateur du Grand Journal revient sur Canal pour une émission tirée à quatre épingles, qui ne se préoccupe pas simplement d’ausculter le strass des stars.
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Conversations Secrètes sur la Croisette
« J’avais envie de choquer les gens » avoue la prometteuse Noée Abita, jeune révélation de dix-sept ans dissertant sur la Terrasse du Five Seas. Amusé, il la compare à Sandrine Bonnaire. Timide, elle évoque Romy Schneider. Ce genre de confessions en tête à tête ponctuées de bons mots et de silences, Denisot les dégustent. Souvenez-vous, cette quête de l’intime imprégnait déjà les entrevues itinérantes de son émission Conversations Secrètes. Avec Le Journal du Festival, la captation à l’arraché façon instants volés laisse la place à une mise en images plus classieuse, peaufinée et cinématographique, mais l’idée est identique : causer culture, étendre la conversation, chercher le regard qui en dit long en évitant les évidences, et, parfois même, s’adresser directement au cameraman. « Emmener les spectateurs avec moi, satisfaire la curiosité par la conversation, ne pas être spectateur de son travail« . résumait il y a peu le présentateur au micro de Sonia Devillers.
Au coeur du decorum estival, Denisot nourrit ses désirs d’intervieweur : raviver les souvenirs, chercher l’authenticité, l’autoportrait, le off. Décortiquer les « cent-vingt-cinq vies » de Claudia Cardinale, laisser l’anti-Trump Spike Lee guider le cadreur de l’émission (un clin d’oeil aux célèbres directives télévisuelles de JLG), interroger le cinéaste Kassovitz sur sa réticence à jouer la comédie, quitte à suggérer l’influence de la boxe sur son acting – avec en fond sonore le bruit reposant des vagues qui bordent la plage Majestic. Mais encore : étudier l' »anxiété cannoise » de l’impératrice Huppert. Faire avouer à Michel Hazanavicius que « Godard verra certainement Le Redoutable un jour, ne serait-ce que pour avoir le plaisir de balancer la bonne méchanceté dessus« . Ou, last but not least, demander à la starlette Elle Fanning ce qu’elle pense…d’Elle Fanning – « Energetique ! » pouffera-t-elle.
A l’image de l’affiche rougeoyante de cette soixante-dixième édition, Le Journal du Festival fait la part belle à la féminité. La candeur d’Izia Higelin entrelace le professionnalisme un zeste glacial de Nicole Kidman. Filmée par Mathieu Amalric en un lent travelling, Jeanne Balibar pose ses doigts sur les touches d’un piano et nous désarçonne, onirique. Enfin, il y a Agnès Varda, qui irradie autant que Jessica Chastain. Puis, soudain, lors d’un bref hommage rendu aux victimes de l’attentat de Manchester, les flashes cessent de palpiter, la gravité sourde balaie les paillettes, gomme les sourires bright et refroidit l’atmosphère caniculaire de la croisette. Le temps se suspend. Car « Cannes, c’est aussi ça« , comme dirait l’autre.
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