Grâce au financement participatif, les salariés de « Nice-matin » lancent un appel aux dons pour sauver leur journal.
De l’enquête journalistique à l’invention absurde (comme ce « simulateur de rien du tout« ), en passant par le supermarché collaboratif : il y a de tout sur les plateformes de crowdfunding, où de bienveillants internautes financent collectivement les projets qui leur plaisent. Pour la première fois, ils peuvent sauver un titre de presse.
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Ce mardi 5 août, les salariés du groupe de Nice-Matin (qui englobe Nice-Matin, Var-Matin et Corse-Matin) lancent un appel aux dons pour sauver leur journal. Via la plate-forme Ulule, ils espèrent collecter au moins 300 000 euros.
Un projet de reprise par les journalistes et les salariés du groupe
« C’est un pari fou, mais pas si fou que ça« , assure Damien Allemand, journaliste web chez Nice-Matin. En difficulté depuis des années, placé en redressement judiciaire depuis le 26 mai dernier, le groupe est sérieusement menacé de faillite. Il y a bien six repreneurs qui se sont présentés, explique le journaliste. Mais voilà : leurs offres de rachat se doublent de plans sociaux « au coût social bien trop lourd« .
Le groupe Nice-Matin, c’est avant tout plus de 1100 salariés, (journalistes, secrétaires, éditeurs, commerciaux, porteurs de journaux…). Ces derniers mois, sous la houlette de l’intersyndicale de Nice-Matin, ils se sont rassemblés et ont multiplié les actions, du journal vide aux recours en justice contre l’ancien actionnaire, Hersant, « qui a laissé mourir le journal‘, d’après les mots de Jean-François Roubaud, reporter chez Nice-Matin. Finalement, ils ont décidé reprendre à leur compte le titre de presse qui les emploie, sous forme de société coopérative d’intérêt collectif (SCOP).
L’argent récolté sur Ulule – déjà 67 591 euros à 15h, soit 22% du montant espéré – servira à financer une partie de leur projet de reprise. Avec un objectif principal : limiter le coût humain. Les salariés prévoient 127 départs, mais tous volontaires, et avec des primes (« et 330 000, c’est dix emplois de sauvés« , précise Damien). Le 28 septembre prochain, si le tribunal de commerce de Nice estime que le projet est viable, en France, ce sera une première : un journal appartiendra à ses employés.
Faire appel au grand public
Le choix du crowdfunding permet de jouer la transparence. L’utilisation des fonds récoltés est détaillée sur la plateforme, et si la somme requise n’est pas atteinte, tous les donneurs seront remboursés. Second avantage de ce type de financement : la somme demandée peut être allègrement dépassée (pour éviter la faillite, Nice-Matin a besoin de plus de 3 millions d’euros).
Faire le choix d’une collecte publique sur la Toile, c’est aussi vouloir susciter un engouement humain, collectif, pour ce fleuron de la presse quotidienne régionale, qui rythme le quotidien méridional depuis plus de 70 ans. « Que vous ayez grandi dans une cité de béton, dans les quartiers chics, aux champs, au bord de la mer ou dans les venelles de la vieille ville, Nice-Matin/Var-matin est votre quotidien« , peut-on lire sur Ulule.
Simone a été la première à faire un don à Nice-Matin. « Elle a 91 ans, pas la langue dans sa poche, et elle sauve des animaux », raconte Jean-François Roubaud. « Qu’on soit en danger, ça l’a mise en colère, même si elle nous a déjà détestés. Elle nous a donné 3800 euros ». Deux jours plus tard, c’est un autre généreux bienfaiteur qui est venu déjeuner chez Nice-Matin… et a signé un chèque de 10 000 euros.
Une solidarité inespérée, rassurante, qui fait dire au journaliste : « On n’est certes pas le New York Times, mais on est important pour plein de gens. Notre combat, c’est aussi celui de ces gens dont on est le reflet au quotidien« .
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