Saif Mahdhi, ancien président européen de l’agence de mannequins Next Model Management, lance sa propre structure. En accueillant des profils variés, il chamboule les règles du système.
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Le Vogue américain le surnomme le “super agent” de la mode française. Connu pour son travail à la tête de la division européenne de la prestigieuse agence Next, Saif Mahdhi se démarque en développant tout particulièrement la partie “talent” : une section qui met en image des personnalités non mannequins, qu’il introduit dans le milieu de la mode. En avance sur l’époque, sa démarche sonne le glas d’une ère de mannequins figés et silencieux pour mieux répondre à une soif de personnalités, de contenu et non seulement d’apparence. Quoi de plus surprenant dans un monde saturé d’images ? Avec son partenaire Joseph Belingard, il inaugure cet été sa propre agence, Safe Management, qui réunit autant de musiciens que d’acteurs et autres artistes, qu’il accompagne dans leur image médiatique ainsi que dans le développement de leurs projets personnels. Rencontre.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de monter votre propre boîte ?
Je me suis dit qu’au bout de 25 ans en tant qu’agent de mannequins, l’heure était venue de monter ma propre affaire, de faire plus que gérer une campagne ou la couverture d’un magazine. Mon but est de développer un travail d’image à 360 degrés avec des gens de tous horizons, et de le faire dans la durée. Depuis le lancement de Safe Management, j’ai été rejoint par des profils aussi diversifiés que ceux des rappeurs A$AP Ferg et Playboi Carti, des acteurs Lukas Ionesco ou Andrés Velencoso, des musiciennes Cécile Cassel et Alma Jodorowsky, entre autres.
Des artistes, des mannequins, des jeunes pousses. J’ai envie de travailler avec des gens actifs, qui me nourrissent et qui se nourrissent mutuellement. Je veux proposer une pensée globale de management, faire en sorte que les projets personnels de chacun se réalisent, pouvoir les encourager dans des voies créatives, engagées. C’est aussi une façon d’ouvrir le luxe à un monde plus vaste. Le nom de l’agence, Safe Management, reflète mon côté très protecteur. Mon but était de créer un gang, une famille, avec de véritables liens d’amitié.
En 25 ans, le métier a-t-il beaucoup changé ?
Enormément. J’ai d’abord construit ma carrière chez Viva, avant d’aller chez Next dont j’ai été, jusqu’à récemment, le président pour l’Europe. J’ai eu le temps de voir les choses changer. Dans les années 1990, c’était la folie, les excès, l’argent, la fête. Aujourd’hui, je ressens une grosse fatigue face à l’hyperactivité et l’instantanéité qui régit le milieu. Sur un shoot du rappeur A$AP Rocky, on m’a demandé : “Alors, c’est qui le prochain A$AP ?” Le mec était en face de nous et on pensait déjà à le remplacer. Selon moi, les gens en ont marre du trop de tout – trop d’images, de produits, et rien qui reste. On a envie de se poser, digérer, réfléchir, prendre le temps. La valeur clé est le temps. Et les agences de mannequins traditionnelles ne suffisent plus, car c’est sur le long terme qu’il faut penser chaque relation. Les gens veulent plus qu’une gueule, ils ont soif d’une histoire, d’une profondeur, d’une richesse.
En quoi cela influencera votre façon de travailler ?
Aller “scouter” des gamines de 16 ans, ça, c’est fini, ce n’est pas comme ça que j’ai envie de travailler. Je veux aller vers plus de maturité, j’aime les femmes de tous âges, et c’est pour ça que je suis ravi de la venue de l’iconique Jane Birkin ou encore de Shalom Harlow (mannequin star dans les années 1990 – ndlr). Aujourd’hui, j’ai envie de pouvoir traîner dans le studio d’une marque, suivre le travail de photographes émergents, rencontrer des designers. Mon but est de créer des ponts entre les âges, les générations et les milieux.
Y a-t-il une “touche” Saif Mahdhi ?
(Il rit) Mon grand truc, c’est les dîners. Pour le lancement de ma société, j’avais ramené un groupe de musique populaire de Sidi Bou Saïd (en Tunisie, dont il est originaire – ndlr). Tout le monde dansait, s’éclatait et les échanges naissaient tout naturellement. J’organise souvent des dîners chez moi où on mange du couscous, de la loubia et des briques. Je remets la djellaba à la mode ! Il n’y a pas de recette magique, il faut juste être sincère, ne pas forcer le destin et laisser les choses grandir…
Vous parlez de remettre la culture nord-africaine sur le devant de la scène internationale : vous sentez-vous engagé ?
Je suis membre du comité Fashion Trust Arabia, pour lequel j’ai passé un an à chercher des créateurs moyen-orientaux et du Maghreb. Avec l’organisation, on a emmené une sélection d’artistes au Qatar, puis on en a choisi cinq qui ont reçu une bourse pour le développement de leur marque et pour les aider à percer internationalement. Aujourd’hui, je souhaite de tout cœur pousser, porter, accompagner le talent arabe.
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