Après avoir révolutionné la presse magazine anglaise, James Brown s’est attaqué aux sites d’information : son Sabotage Times est un succès du web, et une sacrée rigolade.
En Angleterre, James Brown est une légende, réputé pour ses frasques, son hédonisme carabiné, son goût de la nuit et des musiques qui font du bien aux fesses. Ce James Brown n’est pas le Godfather of soul, mais un freluquet insolent, responsable de quelques-uns des plus spectaculaires succès de presse outre-Manche.
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On connut James Brown jeune journaliste musical du défunt Sounds, mandaté pour couvrir le Festival des Inrocks dans les années 80. Déjà passionné et virevoltant, il nous racontait comment, à peine adolescent, il lui arrivait de faire cinquante kilomètres à vélo la nuit, sans lumière, pour suivre dans son Yorkshire natal ses groupes de pop préférés – notamment The Monochrome Set.
Il lance « Loaded » en 1994
James Brown, comme tant d’autres post-ados éternels de ce Nord anglais, était un véritable lad, embrassant sans se poser de questions une culture virevoltant du football à la littérature, du cinéma à la technologie, des voitures à la mode, de la bonne chère à la chair. Naturellement, James Brown se dit alors qu’un garçon comme lui devait acheter au moins huit magazines pour couvrir le spectre de ses passions, des plus raffinées aux plus inavouables.
Face à un scepticisme général, il lance Loaded, d’après une chanson de Primal Scream, en 1994 : un triomphe inouï de la presse anglaise, la bible lad absolue, drôle, grivoise, instruite et glorieusement imbécile, qui allait non seulement influencer les magazines locaux (FHM ou Maxim, entre autres), mais la vie de l’Angleterre même : le pays apprenait que cul et culture commençaient par les trois mêmes lettres.
Depuis, le fantasque James Brown a alterné coups de maître (la reprise en main de GQ en 1997), coups de bluff (un fanzine dédié à son club fétiche de Leeds) et coups d’épée dans l’eau (le magazine Jack, pâle copie de Loaded vite disparue).
Il y a un an, il nous avouait son dégoût des immobilismes et stéréotypes des groupes de presse. Son nouveau projet, qu’il vendait alors avec son enthousiasme ado, serait un site d’information fondamentalement britannique, sérieux sur ses sources mais irrévérencieux dans la forme.
Un an plus tard, son Sabotage Times est un succès : plus d’un million de visites en un an, 110 000 visiteurs uniques par mois. A côté de quelques pros (dont l’ancien rédacteur en chef du magazine de foot FourFourTwo), sa vaste équipe de reporters de terrain a été principalement recrutée sur Twitter, et comprend aussi bien un ancien boxeur professionnel qu’un diplomate, un détenu qu’une fashionista déchaînée. Le résultat : un site de news sans hiérarchie entre cultures haute et basse, à l’humour absurde et à la férocité avérée. La coolitude absolue, revisitée par des geeks hirsutes et à l’impatience revendiquée. Si ça ne tenait qu’à eux, les articles feraient 140 signes. Un format de pop-song.
JD Beauvallet
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