Dans un recueil d’articles, l’écrivain et journaliste italien Roberto Saviano, menacé de mort par la Mafia, raconte la vie qui continue, mais aussi celle qu’il menait avant la sortie de son best-seller.
Après Le Contraire de la mort, recueil de nouvelles dispensable, Roberto Saviano, l’auteur de Gomorra, revient avec un livre regroupant ses articles publiés entre 2004 et 2009. Des textes qui sortent en France au moment où l’écrivain-journaliste napolitain est au cœur d’une polémique déclenchée par Silvio Berlusconi.
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Estimant avoir fait de significatives avancées en terme de lutte contre la Mafia, Berlusconi s’en est pris récemment à Saviano, lui reprochant de faire la “promotion de la Mafia” et de donner une mauvaise image de l’Italie. Déclaration à laquelle Saviano a réagi dans les colonnes de La Repubblica (dont il est l’un des chroniqueurs), en affirmant que selon lui, la Mafia ne souhaitait rien d’autre que le silence pour faire ses affaires en douce.
Il précisait ensuite avec justesse que Berlusconi “préférait accuser celui qui donne l’alarme plutôt que l’incendiaire”. S’en suivait une polémique annexe, Saviano mettant en doute son envie de continuer avec Einaudi et Mondadori (propriétés de Berlusconi), qui avait publié Gomorra.
Quatre ans sous protection policière
Cet épisode polémique ramène encore une fois Saviano au vent de schizophrénie qui traverse son parcours et son œuvre depuis la parution de Gomorra en 2006. Doit-il enfoncer le clou sur la Mafia ou au contraire délaisser le sujet pour préserver sa santé mentale (Saviano vit caché et sous protection policière depuis près de quatre ans) et son travail littéraire ? A cette question, Saviano a décidé de ne pas répondre.
[attachment id=298]En effet, dans les textes de La Beauté et l’Enfer, Saviano évoque bien entendu sa Mafia-dépendance, mais sans jamais tomber dans le petit pathos qui dérange. Pas de complainte d’écrivain reclus, pas de suspense superflu, simplement l’histoire racontée telle qu’elle est, presque au jour le jour, avec cette acuité qui faisait la qualité de Gomorra.
Ainsi ces quatre années d’exil intérieur ne sont pas qu’une poche à douleur : elles sont l’occasion d’une certaine formation d’écrivain qu’il saisit avec pudeur et lucidité. Un état que certaines rencontres viennent interrompre, rendre mouvant. Des personnes connues – et d’autres moins – que Roberto Saviano dépeint toujours avec enthousiasme. Le nouveau prodige argentin du football Lionel Messi, Salman Rushdie, ou des boxeurs sortis d’on ne sait où qu’il intègre à son histoire, avec beaucoup de culot et de réussite.
La Beauté et l’Enfer (Robert Laffont), 319 pages, 21 €
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