Ce jeudi, six organisations syndicales appellent à manifester contre le projet de réforme des retraites. Toutes, sauf une : Force ouvrière, qui a déjà fait sa manif’ dans son coin, la semaine dernière. Une façon de marquer sa différence.
Force ouvrière ou la stratégie du cavalier seul. Au grand désespoir des six autres organisations syndicales dont la CGT et la CFDT, la centrale syndicale conduite par Jean-Claude Mailly n’a pas lancé de mot d’ordre national pour se joindre à la manifestation de ce 24 juin.
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« Localement, des syndicats seront dans la rue, mais pas d’appel national », a déclaré le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly, sur France info, il y a trois jours.
FO persiste et signe en décidant de mener seule son combat pour s’opposer au projet gouvernemental de réforme des retraites. Une réforme dont elle souhaite purement et simplement le retrait.
La méfiance historique de FO
La raison de cette stratégie est triple. La première est historique, comme l’explique Bernard Vivier, directeur de l’Institut supérieur du travail, spécialiste des syndicats :
« Force ouvrière est née du refus du contrôle du syndicalisme par d’autres organisations. A l’époque, le Parti communiste, au travers de la CGT, appelait à la constitution d’un seul syndicat pour une seule classe ouvrière. FO a donc toujours été très méfiant devant les appels à l’unité, de peur que cela n’efface son identité et toute distinction entre syndicats. »
« 40 ans, c’est déjà trop »
Sur le fond, FO se prononce pour le retrait pur et simple du projet gouvernemental, qualifié de « recul social sans précédent », quand les autres organisations syndicales ont acté le principe d’une réforme. Elles défendent avant tout le droit de partir à 60 ans et travaillent à obtenir la réforme la moins négative possible.
Contrairement à d’autres syndicats, FO s’oppose catégoriquement à l’allongement de la durée de cotisation qui doit passer de 40,5 à 41,5 annuités dans le projet gouvernemental. Le slogan de FO est clair : « 40 ans, c’est déjà trop ». Sur ce point, Jean-Claude Mailly reproche d’ailleurs à certains membres de l’intersyndicale leurs ambiguïtés. La CGT ou de la CFDT n’ont pas exclu explicitement qu’il faille travailler plus longtemps pour financer les retraites.
Par ici les déçus !
Enfin, sur la forme, cette stratégie répond à un calcul plus prosaïque. Récupérer les voix des syndiqués déçus de la CGT et de la CFDT et maintenir son influence dans le paysage syndical. Un paysage modifié par la loi du 20 août 2008 sur la représentativité syndicale. Désormais, seuls les syndicats qui auront obtenu plus de 10% de voix dans les élections professionnelles d’entreprises pourront négocier les accords au niveau national.
« C’est une loi de réduction des organisations syndicales, souligne Bernard Vivier. La CGT et la CFDT font leur miel de cette loi. FO risque, à terme, d’être menacé ».
Dès lors, pas son positionnement arc-boutiste, la centrale conduite par Jean-Claude Mailly espère grappiller chez les autres quelques voix.
Le 29 juin, FO préparera la rentrée
Si la stratégie de FO a été actée par le bureau confédéral, certains dénoncent en interne une décision qui isole le syndicat. D’autant plus que FO, traditionnellement, est un syndicat qui négocie plutôt qu’il ne s’oppose.
Mais pour peser dans le débat sur la réforme des retraites, encore faut-il parvenir à se faire entendre. La semaine dernière, le défilé FO a réuni 70 000 personnes selon FO, 23 000 selon la police. Pas assez pour faire reculer le gouvernement.
Un infléchissement de la stratégie se dessine progressivement. FO a annoncé qu’elle réintégrait l’intersyndicale qui se réunit le 29 juin pour décider d’éventuelles actions à mener pendant l’été et à la rentrée. Et Jean-Claude Mailly n’a pas exclu de rejoindre les autres organisations syndicales. Il a répété, sur France Info, que son organisation souhaitait « une vraie unité d’action au mois de septembre ».
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