La vogue du street workout, littéralement musculation de rue, commence à trouver de nombreux adeptes en France après l’engouement américain et des pays de l’Est. Mais à côté des « teams » de compétiteurs, l’association Body Art Athlètes de rue, propose une approche plus éducative… Mais pas moins spectaculaire. Comme chaque samedi après-midi, ils sont une vingtaine […]
La vogue du street workout, littéralement musculation de rue, commence à trouver de nombreux adeptes en France après l’engouement américain et des pays de l’Est. Mais à côté des « teams » de compétiteurs, l’association Body Art Athlètes de rue, propose une approche plus éducative… Mais pas moins spectaculaire.
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Comme chaque samedi après-midi, ils sont une vingtaine de l’association Body Art Athlètes de rue de Paris à se retrouver au parc départemental de Choisy-Le-Roi dans le Val de Marne, autour des barres de tractions et barres parallèles installées près de la pelouse. Des garçons, quelques filles, tous âges, tous niveaux sportifs, tous milieux sociaux. Et pas mécontents de profiter d’un encadrement gratuit ! (l’association demande simplement une modique cotisation annuelle). L’un des « coachs » s’appelle Alexandre, à peine 20 ans, un fou de sport, qui arbore des biceps gonflés et un torse imposant sous son t-shirt : « Je me suis énormément entraîné ces dernières années pour devenir pompier de Paris, mais finalement, j’ai préféré reprendre mes études. J’ai pratiqué le foot durant mon adolescence et puis j’ai commencé à m’entraîner seul chez moi pour participer à des compétitions de street workout, avant de rencontrer les gens de Body Art. C’est vrai, je suis un peu « hyperactif » ! ».
Car, en street workout, il en faut de l’énergie. Alors que la température frôle le 0° en ces jours d’hiver, la motivation des téméraires qui ont répondu présents est à bloc, et ils enchaînent pompes, tractions, abdos, et différents exercices de musculation à base de leur poids de corps. Avec un effort maximum sur le cardio, et donc, avec peu de temps de repos entre les exercices. C’est le principe du street workout : travailler son corps et sa musculature dans toute la ville. Ici, pas d’haltères, de machines de muscu, ou de GO façon Club Med. Juste la sueur au front, et une dose de bonne humeur. « C’est un peu comme si j’avais trouvé une famille », enchaîne Alexandre qui ne compte plus ses heures d’entraînements. « Il y a 30 % de technique à acquérir, et après, c’est les heures de pratique qui comptent. Aujourd’hui, je peux enchaîner 210 pompes complètes, 34 tractions propres, et plus de 50 dips, égrène-t-il. Mais dans le cadre de Body Art, on s’adapte au niveau des personnes qui viennent s’entraîner avec nous. Le but est de leur enseigner ce que l’on sait pour qu’ils progressent ensuite à leur rythme ». De fait, les moins aguerris sont très vite intégrés au groupe – « Allez, essayez ! N’ayez pas peur ! On vous aidera », lance un grand gaillard à un groupe de jeunes gringalets venus plus en curieux.
La séance se termine finalement par les performances free-style des plus entraînés à base de sons hip hop, r’n’b, et électro, délivrés par la sono apportée pour l’occasion. Car le street workout, ce n’est pas que de la muscu. C’est aussi un style, un esprit, des codes. À ranger dans le rayon des cultures urbaines globalisées. Au carrefour de plusieurs influences : « C’est proche de la culture hip hop, de la culture de rue, des danseurs au graff, mais ça agrège aussi des pratiquants de cross fit, ou de MMA », explique Fabien, 33 ans, de Body Art Orléans. Ce cariste de profession a trouvé dans le street workout une bonne manière de se défouler après un grave accident de voiture qui l’a contraint à arrêter la boxe thaï : « Quand j’ai vu les vidéos sur You Tube d’Hannibal, j’ai trouvé ça tellement impossible que ça m’a donné l’envie d’essayer ! ».
C’est en effet le new-yorkais Hannibal for King, 35 ans, ex-gymnaste, ex-taulard, qui a déclenché en 2008 la vague mondiale du street workout en postant les vidéos de ses entraînements. À l’origine, le street workout est un sport né en prison. Aujourd’hui, le bad boy Hannibal, investi dans l’équipe des « Barstarzz », qui organisent des compétitions dans toutes les villes américaines, est devenu en quelques clics le porte étendard de la discipline. En France, d’autres équipes – des « crews » en anglais – se sont constituées, comme la « Punishment team » qui s’entraîne notamment au Parc de la Villette à Paris, ou les « Pull and Push » qui organisent depuis bientôt trois ans la compétition internationale de street workout de Grigny, au sud-est de Paris.
Ce mélange entre performances free-style, compétition, et dépassement de soi, a amené Brice, 27 ans, président des Body Art Orléans, à se lancer dans l’aventure : « Je suis breaker dans le hip hop, et je pratique le kick boxing, et dans le street workout, je retrouve à la fois l’aspect physique et la recherche artistique. Et comme je suis éducateur spécialisé, j’ai eu envie de faire partager cette passion à tous ». Body Art Orléans rassemble ainsi près de cinquante garçons âgés de 14 à 44 ans ! « Ce qui est pratique, c’est qu’on peut s’entraîner partout », lâche Fabien, qui multiplie les entraînements (entre cinq et sept par semaines!) : « L’idée est de pousser son corps à l’extrême à partir de ton poids de corps et de mouvements naturels. Résultat, on peut sculpter son corps très vite. Certains, qui n’ont jamais fait de sport auparavant, voient leur corps se transformer en quelques mois. Mais ce qu’on recherche, c’est l’endurance, la fluidité, l’explosivité, la précision des gestes, pas la masse ». Les performances à la barre – un mélange de muscu, de danse, et de figures de gymnastique – peuvent durer jusqu’à une minute trente.
À Lyon, ils sont plus de soixante-dix de l’association Body Art à se retrouver régulièrement le long des berges du Rhône sur une aire d’entraînement installée par la mairie. À l’origine de l’association, on trouve un sacré bout de femme, Agnès Maemblé, 41 ans, ancienne rappeuse du groupe lyonnais des Amazones : « J’ai voulu créer cette association pour permettre aux jeunes de faire du sport autrement. Le street workout, c’est l’art de sculpter son corps tout en se distrayant. Car j’ai vu les débuts du mouvement hip hop, et pas mal sont partis en vrille. S’ils avaient eu un cadre, ça se serait passé autrement. Car certains ont vraiment besoin de discipline. C’est ce que je leur donne tout en leur proposant de jouer avec leur créativité ».
Entourée de ses grands gaillards, Agnès sait se faire respecter : « J’ai une règle : l’échange et le partage. Résultat, on trouve des mecs de tous milieux dans l’association ». Un esprit d’entraide bien résumé par Brice : « Certains jeunes n’ont jamais pratiqué de sport auparavant. Mais les résultats arrivent très rapidement, car on les encadre, et on leur apporte notre expérience du sport. Ce n’est pas comme en salle de muscu, où certains font un peu n’importe quoi. Puis, là, il y a l’effet dynamique de groupe ! Ça motive un peu tout le monde ». Et à l’heure de YouTube, on peut faire confiance aux gros bras du street workout pour se faire remarquer.
Marc Endeweld.
Photos: Body Art
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