Dix ans au compteur et une garde-robe à faire pâlir Anna Wintour, Desmond Napoles est le porte-voix de toute la jeunesse drag de New York. Et c’est loin d’être fini.
Depuis neuf ans, l’émission RuPaul’s Drag Race donne la part belle aux drag queens à la télévision : d’abord sur la chaîne LGTBQ Logo TV, puis sur VH1 et, récemment, sur Netflix, permettant d’exporter l’émission à l’international. Il y a neuf ans, Desmond Napoles n’était encore qu’un petit garçon tout juste né. Pourtant, son destin et celui de RuPaul seront bientôt liés.
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Haut comme trois pommes
Desmond est né à Manhattan le jour de la Gay Pride 2007, un indice pour Wendy, sa mère. Mais elle était loin de se douter que son fils reprendra les codes des club kids du New York underground seulement quelques années plus tard. Repéré lors de la Gay Pride de New York en 2015, celui qui se fait appeler Desmond is Amazing est devenu la nouvelle mascotte des drag queens. La raison ? Il défile habillé en femme du haut de ses huit ans. Une initiative naturelle qui l’a complètement dépassé : « En l’espace d’une nuit, j’étais devenu un phénomène sur Internet, raconte t-il. Beaucoup de gens, et particulièrement dans la communauté LGBTQ m’ont soutenu, certains même m’ont confié qu’ils auraient voulu pouvoir s’habiller comme ça quand ils étaient plus jeunes. C’est incroyable ! » Mais Internet n’a que peu de pitié et Desmond reçoit aussi des centaines de commentaires humiliants et insultants. « J’ai lu des choses tellement blessantes, que mes parents devraient être jetés en prison, que ma mère devrait être tuée ou brûlée… C’est terrible que des adultes puissent dire des choses comme ça à un enfant… », s’attriste le garçonnet. Face à ce flot de haine, la nouvelle icône queer fait preuve d’une étonnante maturité : « Je ne me laisserai pas abattre, je continuerai à être moi-même. »
Le harcèlement est d’ailleurs le combat numéro un de Desmond. Au début de sa scolarité, ses parents, inquiets de la réaction des autres élèves, ont demandé au principal de l’école d’instaurer une politique anti-harcèlement. « Si quelqu’un m’embête à cause de mon homosexualité ou ma manière de m’habiller, les parents de l’autre enfant seront immédiatement alertés. » Desmond avoue avoir une plus grande inquiétude pour ses « Amazies », sa communauté de followers sur Instagram. S’il a une peur panique de les décevoir, il essaie de ne pas se mettre la pression. « Nul n’est parfait ! Je suis reconnaissant, je remercie toujours tous les gens qui me soutiennent et je ne suis jamais méchant. Si je commence à agir comme une diva, ce sera décevant. Surtout pour moi. »
Aller au-delà du buzz
Si Desmond a aujourd’hui 10 ans, son homosexualité n’est pas une grande nouvelle pour ses parents. « J’ai fait mon coming-out le jour de ma naissance, plaisante-t-il. En CP, j’ai commencé à regarder les garçons mais j’ai attendu quelques années avant de dire à ma mère que je pensais que j’aurais un petit ami plutôt qu’une petite amie, quand je serai grand. » Encore un acte de sagesse qui étonne pour un si jeune âge. Une maturité qui lui a permis de se faire repérer par son idole RuPaul, qu’il cite parmi ses références, au même titre qu’Andy Warhol ou des Club Kids. « RuPaul’s Drag Race a été une émission puissante pour moi parce que je comprenais enfin que je n’étais pas un ovni qui aimait mettre des robes, » explique Desmond.
Quand RuPaul voit Desmond dans le public de la cérémonie d’ouverture du DragCon (convention annuelle de drag queens organisée par RuPaul) de New York, en septembre 2017, il le fait monter sur scène. « Nous sommes le futur des Etats-Unis, » s’est exclamé RuPaul alors que Desmond coupait le ruban marquant l’ouverture du DragCon. Dans une robe rose arborant le visage de Mama Ru (le surnom de RuPaul), il avoue avoir été « au bord des larmes » : « J’ai rencontré mon idole, » se souvient-il. Plus tôt, cette année, Desmond a remporté le prix Marsha P. Johnson « Don’t Be Outraged Be Outrageous », remis par les organisateurs de la Gay Pride new-yorkaise. Marsha P. Johnson était drag queen et participa notamment aux émeutes de Stonewall, considérées comme l’acte fondateur du militantisme LGBTQ.
Qu’on ne s’y méprenne pas, Desmond est bien plus qu’un garçon qui s’habille en fille. Il se voit comme un nouvel étendard de la jeunesse LGBTQ. « J’utilise ma célébrité pour donner la parole aux plus jeunes. J’ai l’impression qu’ils peuvent s’inspirer de moi », détaille Desmond. D’ailleurs, il joint le geste à la parole en mettant sur pied le projet Haus of Amazing, un espace sûr pour les drag kids. Prochaine étape, un magazine LGBTQ conçu pour et par les enfants. « Je veux aller au-delà du buzz, je veux changer la vision des jeunes drag queens en leur faisant sentir qu’ils ont leur place dans ce monde. » Shante, you stay !
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