Emprisonné en 1997, à l’âge de 18 ans, pour meurtre, Christopher (le prénom a été changé) a passé des années à laver le cerveau d’autres détenus, en tant qu’”imam autoproclamé”. Dès son arrivée en prison, il se radicalise au contact des “frères du GIA” (Groupe islamique armé), qui lui fournissent un confort matériel : “Ces imams sont liés à […]
Emprisonné en 1997, à l’âge de 18 ans, pour meurtre, Christopher (le prénom a été changé) a passé des années à laver le cerveau d’autres détenus, en tant qu' »imam autoproclamé ».
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Dès son arrivée en prison, il se radicalise au contact des « frères du GIA » (Groupe islamique armé), qui lui fournissent un confort matériel : « Ces imams sont liés à des filières extérieures, qui lui font passer de l’argent par mandat postal, sous le nez de la prison », explique-t-il. Il placarde des photos de Ben Laden au mur de sa cellule, et s’interdit de regarder la télévision : « C’était “haram” (interdit, ndlr). C’était là pour te pervertir dans ta foi. Alors je l’ai claquée dans le couloir un jour. Il fallait faire une scène, que ça soit spectaculaire. Tout le monde devait voir. »
« Si tu connais quatre versets, tu es le roi du pétrole »
Ayant été scolarisé dans un lycée coranique, Christopher connaît le Coran et parle et écrit l’arabe :
« Si tu connais quatre versets, tu es le roi du pétrole, assure-t-il, les gens ne connaissent rien à l’Islam en prison. (…) À ce moment-là, t’es un repère. Le mec en face, il est fasciné par toi. T’as de la culture, t’as fait quelques études, t’as toujours toute ta tête après plusieurs années de placard. Et en plus t’es intègre. Tu deviens un Dieu pour le gars. Un Dieu qui l’aide à tenir. »
Christopher s’autoproclame imam et s’entoure de fidèles qui le défendent coûte que coûte. « Tout est question de rhétorique. Tu prends le Coran et tu sors les phrases de leur contexte historique, tu omets des versets. T’en sors l’histoire que tu veux. T’as le livre saint en main, tu connais les pages par cœur, qu’est-ce que tu veux que le type en face objecte ? » résume-t-il. Christopher maintient son emprise psychologique en épuisant ses disciples sans leur laisser une minute de répit. Une stratégie qui passe notamment par des exercices d’entraînement paramilitaire.
Brûlure au troisième degré et coma
Tout bascule en 2003. A l’isolement, Christopher décide de brûler son matelas afin d’attirer l’attention des surveillants. Mais personne ne le sort de sa cellule. Brûlé au troisième degré, il passe six mois dans le coma. « J’ai failli mourir, ça fait réfléchir. J’ai décidé de tout arrêter. » Désormais, Christopher se dit « anarchiste athée » : « La religion c’est de la merde ! Je l’ai dit aux copains du Hezbollah que je vois encore. Ça ne serait pas moi, ils me frapperaient. »
La même histoire est arrivée à Karim Mokhtari, autre délinquant radicalisé qui dès son arrivée à la prison d’Amiens a su qu’il lui « fallait des alliés pour survivre là-dedans« . C’est ce qu’il fera auprès d’un imam et de ses fidèles, six ans durant.
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