En homme de cour, Frédéric Mitterrand a intitulé son carnet de bord à la Culture « La Récréation ». Pourtant, il ne s’y est guère amusé.
le sujet
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“Je suis devenu ministre par surprise. C’est sans doute vrai puisque je l’ai entendu dire un peu partout. Enfin, j’ai essayé de faire de mon mieux et j’ai quand même tenu trois ans. (…) L’existence n’offre pas beaucoup de récréations de ce genre…” En tout cas, voilà un livre qui ne donnera à personne l’envie de devenir ministre de la Culture et de la Communication. La Récréation a du mal à trouver son ton, entre jérémiades du gadget sarkozyste périmé et dévoilement – plus embarrassant que touchant – d’un homme qui voudrait tant que tout le monde l’aime. On en ressort avec un sentiment de malaise et d’inconsistance. Ce n’est donc que ça, un ministre de la Culture? Un punching-ball résigné qui distribue les subventions ? Trop intelligent pour ne pas ressentir son illégitimité, son amateurisme, et oublier son triste statut de “prise de guerre”, Frédéric invoque sans cesse le fantôme de tonton François et implore son approbation. “Bécile!”
le souci
Cette Récréation – drôle de titre, honnête dans son insoutenable légèreté – aurait pu être aussi réussie que La Mauvaise Vie si Mitterrand avait renoncé au carnet mondain et aux vacheries mesquines, en particulier contre son successeur à la Villa Médicis. Au lieu d’analyser le fonctionnement d’un pouvoir exclusif auquel il sert de prête-nom, Mitterrand aligne les platitudes sur “la cage aux lions de la politique”, et quand il raconte le non-renouvellement du mandat d’Olivier Py à la tête de l’Odéon, il geint qu’Isabelle Huppert lui en veut beaucoup au lieu de raconter comment et pourquoi Sarkozy voulait nommer Luc Bondy. Il n’est pas doué pour l’information et c’est très dommage. Et comme il n’a pas non plus la tête politique, on ne saura jamais ce que ça fait de se retrouver un certain 1er mai au meeting d’entre- deux tours au Trocadéro, à côté de Carla, devant “une foule immense portée jusqu’à l’incandescence” et “au milieu du déferlement lyrique collectif”. Jolis mots oublieux des dernières cartouches xénophobes de Patrick Buisson, tirées par un Sarkozy jouant le tout pour le tout pour un peuple UMP chauffé à blanc – qui moleste les journalistes et se noie dans la marée de ses drapeaux tricolores. Frédéric Mitterrand était pourtant aux premières loges de ce que s’apprêtait à devenir la droite française…
le symptôme
Les verbatim du livre ne resteront pas dans les annales. Pour Mitterrand, le plus important est que le Président soit sympa avec lui. Banalité du courtisan. Qui croit original, voire courageux, de parsemer son pensum d’appréciations louangeuses quant à la beauté des hommes, du Premier ministre à Jérôme Cahuzac en passant par “le gendarme qui ressemble à David Beckham”. Un ministre est un obsédé sexuel comme les autres, soit. Mais cette litanie ennuie. Et que dirait-on d’un ministre hétéro qui consacrerait tant d’énergie à parler des fesses de ses collaboratrices ? Le ministre est un gros lourd.
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