Nouvelle plateforme électorale de Marine Le Pen, le « Rassemblement bleu marine » doit permettre d’attirer des candidats modérés dans les filets frontistes et de déculpabiliser le vote FN. Mais en pratique, cette appellation n’est qu’une étiquette électorale…
« Chaque jour qui passe nous rapproche du pouvoir », estimait Marine Le Pen, au printemps 2013. La présidente du Front national rêve d’un retour en force des élus frontistes lors des élections municipales des 23 et 30 mars prochain. Pour cela, elle souhaite présenter des candidats dans 41 des 78 villes de plus de 1 000 habitants où le FN a enregistré ses meilleurs scores depuis 2012. Mais constituer des listes paritaires d’au moins une dizaine de personnes, peut se révéler un véritable casse-tête pour le mouvement d’extrême droite.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Pour boucler ses listes et séduire de nouvelles personnalités venues de la droite souverainiste voire de la gauche sans les obliger à adhérer au Front national, Marine Le Pen a trouvé la solution. Elle s’appuie sur le Rassemblement Bleu Marine (RBM), une plateforme électorale, moins connotée négativement que le Front national.
5% des candidats ne sont pas membres du FN
Lancée le 8 mai 2012, cette plateforme a déjà permis au FN de recruter l’avocat Gilbert Collard, élu député sous cette étiquette lors des dernières élections législatives. Aujourd’hui, le Front national entend renouveler l’opération.
« Pour ces élections municipales, sur les 500 candidats que nous allons présenter, 5% ne seront pas membres du Front national », estime le directeur de campagne du FN, Nicolas Bay.
Le jeudi 6 mars à 18h, tous les candidats frontistes vont déposer leurs listes en préfecture. Sur les affiches électorales, le sigle « Rassemblement bleu marine » figure en bonne place. De nombreuses listes FN sont ainsi rebaptisées « Alençon Bleu Marine » ou « Paris Beu Marine. Mais sur les formulaires CERFA déposés en mairie, ce sigle n’apparaîtra plus.
« La seule étiquette, c’est celle du FN »
Sur un document interne que nous nous sommes procurés. Nicolas Bay directeur de campagne du FN pour ces municipales, demande à toutes les têtes de listes d’indiquer « « FRONT NATIONAL » comme « étiquette politique déclarée de la liste » » et non le sigle « Rassemblement bleu marine » lors du dépôt des listes en mairie.
« C’est vrai que la seule étiquette, c’est le Front national, reconnaît Nicolas Bay. Nous sommes contraints par le ministère de l’Intérieur, c’est pour le décompte national à la fin des élections. Statutairement, le RBM est une association mais ce n’est pas un parti politique ».
« Ce sont des raisons purement administratives qui nous obligent à agir ainsi, confirme Steeve Briois, secrétaire général du mouvement ».
« Le RBM n’est qu’une étiquette électorale, rien de plus »
Dans son manoir de Montretout, sur la colline de Saint- Cloud, Jean-Marie Le Pen relativise cet effet d’affichage. Attaché au nom originel du mouvement, le président d’honneur du FN craint qu’à terme le nom de cette plateforme remplace celui du parti. Par le passé, il avait d’ailleurs déclaré que « le Rassemblement bleu Marine sert à ceux qui ne veulent pas être au centre du réacteur, c’est pour les tièdes. Les chauds vont au FN ».
Interrogé par Les Inrocks, Le Pen déclare aujourd’hui :
« Le Rassemblement bleu marine n’est qu’une étiquette électorale, rien de plus (…) L’objectif est de constituer des équipes municipales avec des personnes d’horizon très divers. Je ne crois pas que cette stratégie sera poursuivie lors des élections régionales. »
Cette stratégie électorale est ancienne. C’est Jean-Marie Le Pen qui l’a initiée en vue des élections législatives de 1986. A l’époque, cette stratégie s’était révélée gagnante puisqu’avec 9,7 % des voix, le FN avait presque fait jeu égal avec le PCF et avait pu constituer un groupe de 35 députés sous l’étiquette « Rassemblement national « . Sur ce nombre, une vingtaine n’étaient pas des frontistes historiques, et certains n’avaient même pas la carte du parti (comme les indépendants Yvon Briant ou Michel de Rostolan ou bien encore les anciens députés de droite Pascal Arrighi et Charles de Chambrun NDLR). « Ils ont tous fini par prendre la carte du parti ensuite, assure Jean-Marie Le Pen. Preuve qu’il ne s’agit que d’une étiquette électorale ».
{"type":"Banniere-Basse"}