Dans la vague des nouveaux podcasts à suivre, Quoi de Meuf est à placer dans les tops. Toutes les trois semaines, Clémentine Gallot et Mélanie Wanga, auteures de la newsletter du même nom, offrent un talk féministe, culturel et social, aussi instructif que drôle. Rencontre avec Clémentine, qui nous parle grossophobie, harcèlement et du fait de chuchoter dans l’oreille des auditeurs.
Le féminisme, Clémentine Gallot nous l’affirme, ça fait encore un peu peur. Avec sa consœur Mélanie Wanga, la journaliste (et collaboratrice des Inrocks) crée la newsletter Quoi de Meuf en janvier 2017 pour (se) donner la parole sur des sujets parfois encore trop dérangeants pour les grands médias. Elles expliquent la naissance de la newsletter dans une interview aux Inrocks : “Nous avons toutes les deux travaillé dans des rédactions de presse françaises où on nous a parfois fait comprendre que ces sujets étaient trop ‘clivants’ pour être abordés de manière régulière ou frontale ou bien que l’on n’était pas « objectives » (contrairement aux confrères masculins aux compétences innées…!)”
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Le ton était lancé et le nom bien choisi : Quoi de Meuf parle de société, de culture, de féminisme intersectionnel… et ce aussi bien aux « meufs » et qu’aux mecs, parce que rien ne se fait à sens unique. Elles en sont au deuxième épisode de leurs péripéties parlantes, disponible sur iTunes. Leurs deux premiers sujets, les sorcières et la grossophobie, ont donné le ton d’un média alternatif, peut-être plus ancré dans la réalité que certain grands titres de l’info contemporaine. Rencontre avec Clémentine Gallot, une des deux voix du podcast Quoi de Meuf.
Quoi de Meuf est une newsletter à l’origine. Comment est né le besoin de vous étendre au podcast?
Il s’agit d’une proposition de la production, Nouvelles Ecoutes (qui diffuse aussi La Poudre, podcast de Lauren Bastide, Banquette, Splash et Vieille branche, ndlr) qui nous a approché pour faire une émission quand la newsletter avait six mois. C’était une manière finalement assez logique de prolonger la discussion, surtout qu’en France, on manque encore cruellement de projets radiophoniques autour des questions de genre (sur le même thème, il existe les émissions Dans le genre de, Un podcast à soi ou La Poudre, ndlr). Il y a peu on nous aurait rétorqué, « Une émission féministe ? Ca n’intéresse personne » puisque ces sujets n’étaient pas considérés comme légitimes jusque très récemment.
Qu’est-ce qu’apporte le média radiophonique dans votre rapport à l’actualité et à l’audience?
Toutes les trois semaines, chaque épisode décrypte un seul thème d’actualité. On attend un peu pour faire un épisode autour du harcèlement parce qu’à l’heure actuelle le sujet est vaste et que, comme tout le monde, on a besoin de prendre du recul. Une newsletter permet de recevoir un message qui vous est adressé personnellement dans votre boite mail : le podcast, qui implique de chuchoter (ou crier, en ce qui me concerne) dans l’oreille des auditeurs et auditrices permet d’arriver à un autre degré d’intimité et de fédérer une communauté qui prolonge la discussion sur les réseaux sociaux.
Traitez-vous de vos sujets différemment grâce au podcast?
On est plus réactives dans la newsletter qui est hebdomadaire, mais le format et la longueur du podcast permettent aussi de faire le tour d’une question et de la décrypter en profondeur. En tout cas, on essaye. Ces problématiques s’incarnent dans les voix des personnes interviewées, qu’il est important d’entendre s’exprimer directement : par exemple, à propos du courant « body positive » et de la grossophobie, nous avons recueilli des témoignages de personnes concernées plutôt que de donner uniquement notre avis.
Vous venez toutes les deux de la presse écrite. Comment s’adapte-on à la radio?
C’est en cours ! Mélanie avait déjà l’expérience du podcast afro Le Tchip mais moi… aucune ! L’écriture est différente de la presse papier, plus vivante, plus fluide et moins gravée dans le marbre. Mais sinon ce sont surtout des petites techniques pour éviter les bruits de bouche au micro…
Le féminisme est le moteur de votre travail, et vous évoquez souvent de grandes figures du mouvement. Pensez-vous accueillir des invités prochainement?
Oui, d’ailleurs notre émission de fin d’année, diffusée le 24 décembre, sera une table ronde avec l’activiste et poétesse afro Kiyemis et la rédactrice en chef du mensuel Trois Couleurs, Juliette Reitzer. On y débriefera ensemble l’année qui vient de s’écouler. Il y a de quoi faire : entre les élections présidentielles, la Women’s March, les affaires de harcèlement, l’écriture inclusive, les séries féministes, la mise en scène de la grossesse de Beyoncé, et les films comme Get out et Wonder Woman ! Sinon, nous réfléchissons à faire des entretiens avec des invité·e·s… mais ce sera la surprise. Christiane Taubira, si vous nous lisez…!
Les sorcière et la grossophobie : deux grands tabous ou clichés que vous traitez dans les deux premiers podcasts. Pourquoi ces choix? Est-ce en rapport avec l’actualité ou est-ce que ce sont simplement des sujets qui vous tiennent à coeur?
Les deux ! En 2017, on a vu des sorcières un peu partout, jusqu’aux manifestations anti-Trump et anti-Macron. À titre personnel, ce sont aussi des figures mal-aimées qui nous tiennent à cœur (grâce à des séries comme Charmed ou des films comme Dangereuse alliance) que la pop culture réhabilite ces jours-ci. La grossophobie ne nous touche pas personnellement, mais tout le monde s’est approprié le terme fourre-tout de « body positive » cette année et nous avons eu envie de le déconstruire pour mieux comprendre ce qu’il recouvre, savoir s’il avait aidé des personnes ou s’il s’agissait d’une nouvelle injonction consumériste.
Le prochain thème portera sur la littérature jeunesse, la manière dont ses modèles identificatoires ont influencé notre enfance (on aime Judy Blume et on désavoue Le Club des 5!) et comment l’industrie se réinvente de manière plus inclusive.
Plus d’infos sur Quoi de Meuf ici.
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