L’avocate de 55 ans, récipiendaire du prix Sakharov pour la liberté de l’esprit du Parlement européen, vient d’être condamnée à 33 ans de prison et à 148 coups de fouet. Cette militante féministe et des droits humains est incarcérée à la prison d’Evin, à Téhéran.
“Une injustice sans nom.” Voilà la réaction de l’ONG Amnesty international concernant la nouvelle peine de prison de l’avocate iranienne Nasrin Sotoudeh. Cette femme de 55 ans, déjà incarcérée depuis juin 2018 à la tristement célèbre prison d’Evin, à Téhéran (Iran) – la photographe irano-canadienne Zahra Kazemi y est par exemple décédée il y a quinze ans à la suite d’actes de torture – vient d’être condamnée par la justice iranienne à 33 ans de détention, et à 148 coups de fouet.
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En cause : ses différents combats, que ce soit pour les droits humains, pour les droits des femmes ou encore sa lutte contre la peine de mort. “Je sais qu’ils m’ont arrêtée parce que je défends les droits de l’homme, les militantes féministes et que je lutte contre la peine de mort. Mais je ne les laisserai pas m’empêcher de parler”, expliquait Nasrin Sotoudeh en août 2018, alors qu’elle commençait une grève de la faim en prison, comme le rapporte Courrier international.
Peine maximale
Celle qui avait déjà été incarcérée entre 2010 et 2013 a été condamnée, en juin dernier, à cinq ans de détention pour “rassemblement et collusion contre le régime” et à deux ans pour “insulte au Guide suprême”. Seulement, selon les dires de son mari lundi 11 mars, des chefs d’accusation et a fortiori des peines de prison supplémentaires ont été requis à l’encontre de son épouse. Laquelle est donc à présent condamnée à 33 ans de détention de plus – ce total représentant la peine maximale cumulée pour chacun de ses sept chefs d’accusation – et à subir 148 coups de fouet.
Comme le rappelle Amnesty international, “c’est la condamnation la plus sévère recensée contre un défenseur des droits humains en Iran ces dernières années, ce qui laisse à penser que les autorités encouragées par l’impunité généralisée en matière de violations de droits humains, durcissent leur répression”. D’autant que les juges en charge de son dossier ont usé de leur pouvoir discrétionnaire permis par le Code pénal iranien, qui les autorise à imposer une peine plus sévère que la peine maximale obligatoire, et ce, dès lors que l’accusé.e est visé.e par plus de trois chefs d’accusation.
Défense des femmes souhaitant ne pas porter de voile
L’ONG rappelle que c’est “en représailles de son travail pacifique en faveur des droits humains”, pour “incitation à la corruption et à la prostitution”, pour “trouble à l’ordre public” et pour “acte immoral en apparaissant en public sans porter le hijab” que Nasrin Sotoudeh devrait passer plus de temps que prévu derrière les barreaux.
L’avocate s’était en effet récemment distinguée, en 2018, en prenant la défense de femmes revendiquant le droit de ne pas porter de voile, celui-ci étant obligatoire en Iran depuis la révolution islamique de 1979. Ces Iraniennes postaient alors des photos d’elles tête nue, dans la rue, sur les réseaux sociaux, comme le raconte France culture.
Un appel à faire pression sur le gouvernement iranien
Nasrin Sotoudeh prend aussi régulièrement fait et cause pour les prisonniers politiques, les activistes, les journalistes et les opposants au régime en place. Ainsi, en 2009, elle avait défendu les personnes arrêtées lors des grandes manifestations contre la réélection de l’ancien président Mahmoud Ahmadinejad (le pays est à présent gouverné par Hassan Rohani).
L’annonce de sa très lourde peine de prison n’a pas manqué de faire réagir. Ainsi, Amnesty international appelle “les gouvernements qui jouissent d’une influence sur l’Iran [à] s’en servir pour faire pression en faveur de la libération de Nasrin Sotoudeh” et demande “notamment à l’Union européenne (UE), qui entretient un dialogue actif avec l’Iran, [de] prendre fermement position et ce publiquement contre cette condamnation honteuse et intervenir de toute urgence pour qu’elle soit libérée immédiatement et sans condition”.
Récipiendaire du Prix Sakharov pour la liberté de l’esprit
Comme l’explique le Monde, qui indique que “l’avocate fait les frais de la répression qui accompagne le retrait des Etats-Unis de l’accord international sur le nucléaire, en mai 2018”, l’UE “a demandé un réexamen immédiat de la sentence”.
Le Quai d’Orsay, lui, a affirmé “son attachement à la liberté d’opinion et d’expression et au droit de chacun à un procès équitable”, tout en mettant en avant comment Emmanuel Macron avait invité Nasrin Sotoudeh à faire partie du conseil consultatif du G7 sur l’égalité des genres, en février. En 2012, la militante avait reçu du Parlement européen le prix Sakharov pour la liberté de l’esprit. Une pétition a été lancée en France par le Conseil national des barreaux pour demander sa libération.
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