Étoile montante de la droite populiste allemande, cette chimiste de 41 ans ne sera finalement pas la candidate de l’AfD aux élections au Bundestag de septembre 2017. Après une ascension fulgurante, elle est aujourd’hui isolée au sein de son propre parti.
Les larmes amères de Frauke Petry. Cette image risque de coller longtemps à la peau de la co-présidente d’Alternative pour l’Allemagne (AfD). Lors d’un congrès en Saxe en mars dernier, elle a fondu en larmes face aux attaques d’un de ses rivaux. A la tribune, le très à droite Roland Ulbrich n’a pas mâché ses mots à l’égard de celle qu’il considère comme une “erreur de casting”, une “dictatrice”.
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Après une ascension fulgurante à la tête de l’AfD, Frauke Petry, 41 ans, est aujourd’hui en disgrâce au sein de cette jeune formation politique qui n’a cessé de se radicaliser au fil des ans. De parti anti-euro qui réclamait un retour au deutsche mark à sa création en 2013, l’AfD s’est rapidement muée en parti anti-immigration, faisant de la crise des réfugiés en Allemagne son cheval de bataille. Une stratégie qui s’est avérée payante puisque l’AfD siège désormais dans dix des seize parlements régionaux que compte le pays.
“Les enfants de Merkel”
Frauke Petry a un temps surfé sur cette tendance, provoquant notamment un tollé en 2016 en déclarant dans une interview au quotidien local Mannheimer Morgen que les policiers stationnés à la frontière entre l’Autriche et l’Allemagne devraient pouvoir “faire usage de leur arme à feu en cas d’urgence”. Ancienne électrice de la CDU, le parti conservateur d’Angela Merkel, Frauke Petry a souvent dit dans la presse qu’elle et ses colistiers étaient “les enfants de Merkel”, parce qu’en choisissant d’accueillir plus d’un million de réfugiés en 2015, la chancelière allemande avait créé les conditions du succès de l’AfD.
Frauke Petry a deux points communs avec Angela Merkel : elle est originaire de l’ex-Allemagne de l’Est et elle est chimiste de formation. Et un avec les réfugiés qu’a accueillis son pays, même si elle ne montre aucune empathie à leur égard : elle sait ce que signifie l’exil. Elle a grandi en Allemagne de l’Ouest, avec sa famille, dans la Ruhr, après avoir, à l’âge de 14 ans, rejoint son père qui avait fui la RDA peu avant la chute du Mur.
Dans un portrait que lui consacrait l’hebdomadaire Der Spiegel il y a quelques mois, elle racontait l’humiliation face à un directeur de d’école qui estimait que les bonnes notes qu’elle avait obtenues à l’Est n’avaient aucune valeur à l’Ouest.
Ligne réaliste
Mais celle qui critiquait avec véhémence la politique migratoire d’Angela Merkel et la lâcheté des élites ces dernières années défend désormais une ligne réaliste et se dit prête à conclure des alliances avec les partis traditionnels si l’AfD parvient à se hisser au Bundestag lors des prochaines élections législatives, qui auront lieu le 24 septembre 2017.
C’est cette attitude que les militants de la formation d’extrême droite ne lui pardonnent pas. Tout comme le fait d’avoir tenté récemment d’exclure un des ténors du parti, Björn Höcke, qui incarne l’aile radicale du parti et multiplie les références à la rhétorique nazie. Frauke Petry a donc renoncé le 19 avril dernier à être la candidate de l’AfD lors des élections au Bundestag.
C’est le duo formé par Alexander Gauland, chef de file de l’AfD dans le Brandebourg et l’économiste Alice Weidel, ouvertement lesbienne, malgré les positions ouvertement homophobes du parti, qui mènera finalement cette bataille.
Si la carrière politique de Frauke Petry semble aujourd’hui dans l’impasse, elle conserve tout de même la présidence du parti. Elle a connu d’autres tempêtes. En 2013, sa société, Purivent, a fait faillite. Peu tentée par une vie de salariée dans un laboratoire pharmaceutique, Frauke Petry avait créé une société qui commercialisait une substance servant à la fabrication de pneus, dont le brevet avait été déposé par sa mère, elle-même chimiste.
Enceinte de son cinquième enfant
En 2015, elle a quitté son mari, Sven Petry, pasteur protestant dont elle partageait la vie depuis deux décennies et avec qui elle a quatre enfants. Elle est aujourd’hui remariée avec un autre responsable politique de l’AfD, Marcus Pretzell, connu en Allemagne pour ses tweets provocateurs – au lendemain de l’attentat de Berlin en 2015, il avait notamment eu ce commentaire sur le réseau social : “Les morts de Merkel” – et enceinte de son cinquième enfant, dont elle accouchera peu avant les élections au Bundestag.
A ceux qui aimeraient voir dans cette grossesse la fin de sa carrière politique, elle rétorquait dans les colonnes du Spiegel il y a quelques mois : “J’ai eu tous mes enfants pendant que je travaillais. J’ai passé ma thèse en ayant un enfant en bas âge, j’ai monté une entreprise en ayant des enfants en bas âge. Ça ne posera pas de problème.”
Reste à savoir si elle continuera d’incarner cette ligne modérée au sein d’un parti de plus en plus radical. Son ex-mari, lui, est désormais encarté à la CDU.
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