Proche de Mohamed Merah, ce Toulousain d’origine réunionnaise se serait radicalisé au début des années 2000 et aurait été impliqué dans plusieurs des derniers attentats islamistes en France ces dernières années.
Dans une vidéo de cinq minutes trente diffusée samedi par l’organisation Etat islamique (Daesh) et revendiquant les attentats de Paris et de Saint-Denis, les enquêteurs ont identifié la voix d’un djihadiste français du nom de Fabien Clain, qui serait la « tête pensante » d’un certain nombre d’attentats islamistes de ces dernières années. Sur cet enregistrement, l’homme annonce :
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« Dans une attaque bénie dont Allah a facilité les causes, un groupe de croyants des soldats du Califat, qu’Allah lui donne puissance et victoire, a pris pour cible la capitale des abominations et de la perversion, celle qui porte la bannière de la croix en Europe, Paris… »
Cet homme de 35 ans (certains disent qu’il aurait 36 ou 37 ans) d’origine réunionnaise vient du quartier du Mirail, à Toulouse. Selon Réunion Première, son frère Jean-Michel, 33 ans, et lui se sont convertis à l’islam à la fin des années 1990. Quelques années plus tard, en 2004, les deux frères se seraient radicalisés, rapporte le site d’info consacré à l’outre-mer.
Connu des services antiterroristes depuis 2001
Selon Le Monde, en revanche, leur radicalisation daterait du tout début des années 2000. Les services de renseignement antiterroristes français les auraient repérés en 2001, lorsqu’ils ont fondé le « clan des Belphégor », – surnom qui leur vient de leurs épouses affublées de la burqua – un groupuscule salafiste dans le quartier du Mirail, à Toulouse.
Ils rencontrent Sabri Essid, qui deviendra le beau-frère de Mohamed Merah. En 2003, les trois hommes s’installent un temps à Utrecht, aux Pays-Bas, d’où ils reviennent avec de la littérature islamique qu’ils essaient de revendre dans la région de Toulouse. Les « Réunionnais » s’installent aussi provisoirement en Belgique, où ils appartiennent à un groupe de djihadistes franco-belges parmi lequel se trouvent Farouk Ben Abbes, un Belge d’origine tunisienne, et Hakim Benladghem, un ancien légionnaire français d’origine algérienne (tué le 26 mars 2013 après avoir été soupçonné de commettre un attentat en Belgique).
Fin 2004, le « clan des Belphégor » fusionne avec un autre groupe islamiste, la communauté d’Artigat. Cette communauté est dirigée par Olivier Corel, un Français d’origine syrienne appelé « l’Emir blanc ». Cet homme fait office de véritable cheikh (guide spirituel) pour Fabien, qui se fait appeler « Omar », et son frère.
Olivier Corel organise régulièrement des « stages de religion vraie » dans une ferme du hameau des Lanes, dans la commune d’Artigat, dans l’Ariège. Les frères Clain y côtoient Sabri Essid et Abdelkader Merah, le frère de Mohamed Merah. « Le groupe se structure autour des mariages organisés en son sein », déclare Libération.
Le groupe Clain-Essid démantelé en 2007
A Toulouse, le groupe échoue à prendre le contrôle de la mosquée de Bellefontaine et prêche donc la parole salafiste dans des appartements du Mirail et dans une salle de prière d’un foyer sonacotra du quartier des Izards. En 2004, les Clain et Essid partent avec leurs femmes dans la banlieue du Caire en Egypte pour étudier dans une école coranique, soit un an après que l’armée américaine a commencé la guerre en Irak.
Fabien « Omar » Clain, son frère et Sabri Essid décident alors de s’engager dans la lutte armée aux côtés de l’organisation djihadiste d’Abou Moussab Al-Zarqaoui, affiliée à Al Qaïda. Sabri Essid et un autre djihadiste français originaire d’Albi, Thomas Barnouin, sont arrêtés en 2007 avant de pouvoir passer le frontière pour aller se battre en Irak. Fabien Clain, lui, était encore en Egypte. Deux ans plus tard, il apparaît aux côtés de Hakim Benladghem, dans une enquête sur des menaces d’attentats visant le Bataclan. Cette même année, le procès du groupe Clain-Essid a lieu et Fabien Clain s’y rend librement. Il écope alors de cinq ans de prison ferme.
Emprisonné en 2009, il correspondait avec Mohamed Merah
Pendant sa détention, il écrit régulièrement à Mohamed Merah, l’auteur de l’attentat de mars 2012 à Toulouse et Montauban. L’administration pénitencière a intercepté des courriers prouvant cette correspondance et le journaliste Alex Jordanov écrit dans Merah. L’itinéraire secret (2015, Nouveau monde éditions) que Mohamed Merah s’inquiète de l’incarcération de son ami « Omar », qu’il prend des nouvelles via Jean-Michel Clain, qui est libre, et en lui envoyant des lettres de sa cellule, car lui aussi est en prison, mais pour des actes de délinquance mineurs.
Mohamed Merah sort de prison, radicalisé, en 2008, étudie le Coran et effectue plusieurs voyage au Moyen-Orient entre 2008 et fin 2010. Les vidéos de surveillance qui ont été placées chez lui après son retour d’Afghanistan ont montré que Jean-Michel Clain lui a rendu visite à plusieurs reprises mais aucun d’eux n’en sera inquiété.
En août 2012, soit cinq mois après les meurtres perpétrés par Mohamed Merah, Fabien Clain a purgé sa peine et, interdit de territoire dans 22 départements français, s’est installé en Normandie. Pourtant, il se défend d’entretenir des liens avec le « tueur au scooter ». En juin 2013, après la diffusion sur France 3 d’un documentaire sur ses relations avec le terroriste, il porte plainte, clamant comme le rapporte 20 Minutes n’avoir rien à voir avec lui :
« Je n’ai jamais été proche de Merah ! Quand il a tué tous ces gens, j’étais en prison. J’ai découvert cela dans ma cellule. »
2014 : Départ pour la Syrie et attentats ratés de Villejuif
Dans le courant de l’année 2014, Fabien et Jean-Michel Clain, Sabri Essid et quelques autres sont parti rejoindre les rangs de l’organisation Etat islamique en Syrie. Fabien aurait notamment téléguidé Sid Ahmed Ghlam pour fomenter l’attentat avorté contre une église de Villejuif. Les services de renseignement ont eu très peu de nouvelles de lui jusqu’à ce qu’ils reconnaissent sa voix dans l’enregistrement de revendication de Daesh samedi dernier.
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