Alors qu’ »American Sniper », le biopic retraçant la vie de Chris Kyle, est reparti bredouille des Oscars, le procès d’Eddie Ray Routh, son meurtrier, se déroule actuellement au Texas.
Depuis le 18 février, Chris Kyle refait la une de la presse internationale. La faute au dernier film de Clint Eastwood, American Sniper, qui retrace la vie de ce tireur d’élite de l’armée américaine qui aurait abattu 250 personnes lors de la guerre en Irak, en s’appuyant sur son autobiographie à succès. Malgré son énorme succès en salle outre-Atlantique et sa nomination dans cinq catégories aux Oscars, le biopic n’est reparti qu’avec le prix du meilleur montage sonore. Incroyable coïncidence: au même moment, le procès du meurtrier de Chris Kyle se tient à Stephenville, au Texas.
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Le meurtrier en question est un autre ancien marine, beaucoup moins célèbre; Eddie Ray Routh, 27 ans, le cheveux ras et le visage gonflé par les médicaments. Décrit par un ancien camarade de classe comme un « fauteur de trouble » et par sa mère comme « un élève abonné aux C », Eddie Ray Routh s’est engagé dans l’armée en 2006, dix jours tout juste après avoir bouclé ses études secondaires. En septembre 2007, il est envoyé au nord de Bagdad, en Irak. Il raconte à son père qu’il passe beaucoup de temps à garder des prisonniers, dont il s’inquiète d’ailleurs des conditions de détention. Un matin, raconte son père au New Yorker, Eddie lui balance au téléphone « Comment te sentirais-tu si je tuais un enfant? ». Son père lui répond: « Tu dois faire ce qu’il faut pour survivre et rentrer à la maison. C’est toi ou eux. »
Il remet un pied sur le sol américain en 2009. Ses parents constatent alors des changements dans sa personnalité. Eddie s’est notamment mis à boire en grande quantité. En 2010, il est envoyé en mission humanitaire en Haïti, suite au tremblement de terre qui a dévasté l’île. Au téléphone, il raconte à sa mère ne pas avoir « été entraîné pour ramasser des cadavres de bébés sur la plage. » Là-bas, il empile des corps, et se fait réprimander lorsqu’il veut donner de l’eau à un garçon haïtien. Il en revient profondément choqué.
« Celui-là, il a l’air totalement cinglé. »
Un an plus tard, il se voit diagnostiquer un trouble de stress post-traumatique par les médecins de l’hôpital de Dallas. Il y reste trois semaines avant de repartir avec un paquet de médicaments qui, selon son père, ne font qu’aggraver son état. En 2012, après avoir menacé de « faire sauter la cervelle » de toute sa famille lors d’un déjeuner, il est interné dans le service psychiatrique de Dallas. Mais, malgré son état, les médecins finissent par le laisser sortir. Sa mère insiste pendant des semaines auprès des psychiatres pour qu’il le reprenne, arguant de sa dangerosité, de sa paranoïa grandissante, et de sa fascination pour le Diable. Sans succès. Elle contacte alors Chris Kyle, surnommé « La légende » ou encore « American Sniper », un héros de la guerre en Irak, connu pour ses faits d’armes, qui aide d’autres anciens marines à gérer leurs stress post-traumatiques.
Le 2 février 2013, Chris Kyle et un de ses amis, Chad Littlefield, emmènent Eddie au stand de tirs de Rough Creek Lodge, près de Stephenville. Un bon moyen, selon Kyle, d’évacuer sa colère. Dans la voiture, Eddie est assis à l’arrière. A l’avant, Kyle envoie par SMS à Littlefield: « Celui-là, il a l’air totalement cinglé. » Personne n’assiste à la fusillade, mais leurs deux corps sont retrouvés criblés de balles. Arrêté après une course-poursuite, Eddie Ray Routh avoue les avoir tués.
Peur de se faire assassiner par des « porcs hybrides »
L’enjeu du procès qui s’est ouvert à Stephenville est de déterminer si Eddie Ray Routh est atteint de maladie mentale et risque d’être interné à vie, ou s’il sera condamné pour meurtre et passera le restant de ses jours en prison. Un psychiatre ayant longuement examiné Eddie a raconté à la barre le 19 février que Routh pensait que Kyle et Littlefield étaient des « porcs hybrides » qui lui tendaient un piège pour l’assassiner. Mais, le lendemain, des experts ont assuré que le tueur n’était pas fou, en s’appuyant sur le fait qu’il n’ait pas tué les deux hommes lorsque la voiture était en route, pour éviter un accident, et parce qu’il avait choisi le lieu et l’endroit pour les abattre tous les deux. L’un d’eux a estimé que Routh souffrait de paranoïa, d’irritabilité et de dépression dues à la consommation de marijuana et d’alcool le jour du meurtre.
En 2014, le documentaire Of Men and War se penchait sur le stress post-traumatique, surnommé « PTSD » en anglais, formulé après la guerre du Vietnam, mais encore largement tabou:
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