Complètement novice en politique, Corinne Versini affrontera dimanche le ténor de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon. Qualifiée pour le second tour des législatives, cette chef d’entreprise, candidate LREM, compte bien le renverser.
Elle débute en politique et elle affronte… Jean-Luc Mélenchon. Qualifiée pour le second tour des législatives, Corinne Versini, candidate LREM dans la 4e circonscription des Bouches-du-Rhône, affronte un adversaire de taille pour son tout premier combat politique. Pas de quoi inquiéter cette macroniste de la première heure : cette chef d’une start-up en biotechnologies veut montrer que, comme dans sa vie professionnelle, la patronne, c’est elle.
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Avec 22,66% des voix au premier tour, Corinne Versini fait fort pour son entrée en politique. Complètement inconnue il y a encore quelques semaines, elle a réussi à éliminer Patrick Mennucci, le député socialiste sortant. Dimanche, elle sera donc en face du leader de la France insoumise. Si Mélenchon est arrivé largement en tête, avec 34,31% des suffrages, la candidate compte bien le battre.
Une « touriste » et une « opportuniste » ?
C’est d’ailleurs à l’annonce de la candidature de Mélenchon à Marseille qu’elle s’est décidée à partir aux législatives. Cette Aixoise de 56 ans, référente départementale du mouvement En Marche !, ne pouvait pas laisser passer ça. « Si un poids lourd se présente, il est normal que ce soit la responsable départementale d’En marche qui l’affronte », affirme la candidate LREM à Libération. Elle a donc été désignée par les macronistes pour représenter la quatrième circonscription des Bouches-du-Rhône.
Si elle était la candidate légitime aux yeux des représentants du mouvement, d’autres la critiquent sur ses origines aixoises, et non marseillaises, en pointant son détachement à la ville. Sa candidature est loin d’avoir été appréciée par tous, et Patrick Mennucci ne l’a pas épargnée : « Elle ne vient même pas de Marseille, c’est une Aixoise. Elle m’a salué une fois dans un bureau de vote et elle m’a dit qu’elle avait besoin d’un GPS parce qu’elle se perdait dans les rues de Marseille. Personne ne la connaît !”, s’étonnait-il ainsi. Même Jean-Luc Mélenchon, également parachuté à Marseille depuis Paris, s’en est pris à elle : « Parce que si moi je suis un parachuté, Mme Versini, elle, vient d’Aix. C’est presque pire pour un Marseillais que de venir de Paris ! », affirme-t-il sur Libération. Les autres candidats approuvent, comme Solange Biaggi (LR) qui la qualifie de « touriste aixoise ». « C’est quand même paradoxal de me reprocher d’être opportuniste quand on est un parachuté, non? », leur répond celle-ci.
Autre point qui pourrait déranger : si la candidate a adhéré dès le départ au mouvement, elle n’a jamais eu de mandat. Elle fait partie de cette « société civile » mise en avant par le nouveau président. Patrick Mennucci lui a même reproché d’avoir gonflé son CV, en affirmant être diplômée d’HEC, « alors que ce n’est pas vrai », affirmait-il. Elle n’aurait en effet pas suivi la formation initiale d’HEC mais une formation diplômante en continue.
Le socialiste ne s’arrête pas là et l’accuse aussi d’être « dans les mains des réseaux de Jean-Noël Guérini, qui veut ma perte ». L’ancien patron du département, Jean-Noël Guérini, a été mis en examen à de multiples reprises.
La candidate avait donc déjà quelques points de retard, et sa nouvelle responsabilité en tant qu’unique adversaire de la France insoumise a de quoi lui mettre la pression. Elle ne se démonte pourtant pas : « Je me bats pour la victoire. Tant que la fin de la partie n’est pas sifflée, il y a une chance de gagner », déclare-t-elle à Centre Presse.
Miser sur son statut de femme chef d’entreprise
Pour se différencier du très médiatique Mélenchon, Corinne Versini mise sur sa principale particularité : c’est une chef d’entreprise, et elle s’y connait en innovation. A la tête de Genes’Ink depuis 2010, la créatrice de cette start-up a réussi à propulser sa petite entreprise au rang des spécialistes de la fabrication d’encres électroniques. Elle est désormais leader sur son marché, dans les encres conductrices et semi-conductrices. Depuis début janvier 2016, elle est même implantée au Japon. Si sa PME s’est faite un nom, c’est qu’elle favorise notamment le développement durable et « une démarche de chimie responsable », lit-on sur le site de son entreprise.
Depuis l’annonce des résultats dimanche 11 juin, elle enchaîne les tractages à Marseille et les campagnes de terrain, une stratégie basée sur les mêmes valeurs prônées par sa PME : encourager la créativité, favoriser la parité, soutenir les start-up françaises et l’économie sociale et solidaire, « qui a besoin d’être pérennisée » notamment avec des aides financières, affirme-t-elle à La Tribune. « Dans les quartiers que se passe-t-il si les associations ne sont plus là ? » interroge-t-elle sur le média, en précisant vouloir déjà créer un incubateur d’innovation sociale. « Le problème de l’emploi est colossal à Marseille, plus de 25% des jeunes sont au chômage. Souvent par manque de formation », complète la startupeuse sur Centre Presse.
« J’ai beaucoup hésité »
Si la candidate persévère, son statut de novice pourrait lui être défavorable face au candidat de la France insoumise, expert en politique. Quand le mouvement lui a demandé de partir aux législatives, celle-ci avoue qu’elle a ainsi « beaucoup hésité ». « Tous les matins, je regrette. Et dès que je rencontre les gens, je me dis que j’ai bien fait. Je perçois un espoir fort, comme si c’était maintenant ou jamais », se confie-t-elle sur Centre Presse. Car avant tout, Corinne Versini veut faire bouger les choses, et c’est en Emmanuel Macron qu’elle voit ce changement. C’est d’ailleurs suite à leur rencontre, alors qu’il n’était encore que ministre de l’Économie, qu’elle a décidé de s’intéresser de plus près à la politique. « Je me suis dit, là, on peut faire quelque chose », explique Corinne Versini sur le média.
Mais aura-t-elle suffisamment de répondant pour tenir tête à Mélenchon ? « Mes adversaires font campagne à l’ancienne. Avec des promesses intenables. Moi, je travaille avec les énergies à fédérer et suscite les initiatives créatives », précise-t-elle. Pourtant, lors d’une rencontre télévisée le mercredi 14 juin, les deux adversaires se sont retrouvés dans un débat jugé très « cordial » et sans crêpage de chignon.
#Bienveillance et #Respect dans les couloirs de @laprovence avec Jean Luc Mélenchon et Franz-Olivier Giesbert pic.twitter.com/iOEEAbu1RA
— Corinne Versini (@corinne_versini) June 14, 2017
Si la candidate LREM a encore ses chances, elle ne semble pas faire peur à Jean-Luc Mélenchon : « Nous confrontons des programmes, des idées. Elle représente un autre point de vue », avoue-t-il à La Provence. Pourtant, Corinne Versini pourrait quand même profiter d’un avantage face à lui, en récupérant quelques votes des électeurs de gauche. Déçu d’avoir été balayé dès le premier tour, Patrick Mennucci n’a pour le moment donné aucune consigne de vote, dénonçant le « sectarisme » de son ancien ami, Jean-Luc Mélenchon.
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