Lundi, le tribunal correctionnel de Strasbourg a relaxé un internaute qui avait mis en ligne une vidéo de lui brûlant le Coran. La cour a estimé que son acte ne « dépassait pas les limites de la liberté d’expression« . Le parquet a fait appel de la décision.
Le 12 octobre 2010, à Bischeim (Alsace), Emilio Milano* se filme en train de faire des avions avec les pages du Coran, les lance sur des verres représentant les tours du World Trade Center puis brûle le livre sacré et urine dessus pour éteindre les flammes. Il poste la vidéo sur le site blog-video.tv. Mis en examen pour « provocation publique à la discrimination raciale« , il vient d’être relaxé par le tribunal correctionnel de Strasbourg. Sa vidéo « n’a pas dépassé les limites de la liberté d’expression« , selon la Cour. Le parquet, qui avait requis 3 mois avec sursis et 1 000€ d’amende, vient de faire appel.
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Le jugement – très critiquée par les associations contre le racisme– pose la question de l’autodafé dans nos sociétés contemporaines. Que risque-t-on, aujourd’hui, si on brûle des livres ?
Un acte symbolique
Concrètement, pas grand chose. Si on décide d’incendier toute sa bibliothèque au fond de son jardin, tant que cela reste dans la sphère privée, pas de risque de se retrouver devant les tribunaux. Ce n’est pas l’acte de brûler « l’objet livre » qui est en soi répréhensible, mais la motivation – politique, religieuse ou morale – et son exposition publique, qui l’est.
En 1933, les nazis détruisent par le feu les ouvrages des dissidents du régime. Les intégristes religieux font griller le Coran aux USA. Plus original, le révèrent Otunga au Kenya a incendié des manuels de prévention contre le Sida et des préservatifs en 1996. Au Nouveau Mexique (USA) en 2001, c’est Harry Potter qui a subi les foudres de la Congrégation des églises libres pour « incitation à la sorcellerie et au satanisme« .
Quant aux peines encourues, tout dépend du pays dans lequel on se trouve. Aux Etats-Unis , la liberté d’expression est un droit absolu, garanti par le premier amendement de la constitution, tandis qu’en France, il est très encadré. Le pasteur Jones, qui a brûlé un Coran en Floride le 12 mars dernier a été fermement condamné par Barack Obama. les affrontements entre protestants et force de l’ordre qui ont suivi son geste ont entraîné la mort de 24 personnes. En revanche, il n’est pas inquiété par la justice.
En France, Emilio Milano a été mis en examen pour « provocation publique à la discrimination raciale » et risquait un an de prison et 45.000€ d’amende. Pendant le procès, l’avocat du prévenu a invoqué la liberté d’expression. « Brûler un livre chez soi je ne crois pas que ça soit interdit » a-t-il plaidé devant les juges. Le tribunal a finalement jugé que sa vidéo « n’a pas dépassé les limites de la liberté d’expression. »
« Mais il n’a pas le droit de le publier sur Internet ! C’est une incitation à la haine raciale ! » s’insurge Philémon Lequeux, président de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra).
Partie civile pendant le procès, la ligue a indiqué qu’elle « suivrait très certainement » pour le procès en appel. « Brûler des livres n’est jamais sain », se désole Philémon Lequeux
A noter tout de même si vous prévoyez un autodafé géant dans votre salon, les feuilles contiennent du chlore qui peut libérer des substances toxiques, responsables de lésions cutanées, de lésions hépatiques, de malformations congénitales, de cancers… donc pensez à aérer.
Cerise Sudry-Le Dû
* Le nom a été modifié
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