Les 57 propositions du Haut commissaire à la Jeunesse Martin Hirsch sont-elles suffisantes et peuvent-elles réellement être mises en oeuvre ?
Si, comme le suggérait Bourdieu à la fin des années 70, “la jeunesse n’est qu’un mot”, elle se résume aujourd’hui à trop de maux. Malgré la diversité de ses propres catégories, la jeunesse révèle une expérience sociale globale marquée par le désenchantement. Soumise à des discriminations économiques (précarité de l’emploi, ascenseur social en panne, accès à l’indépendance difficile), sous-représentée politiquement, victime d’un système scolaire fondé sur l’exclusion…, la jeunesse galère. Gravement.
Le Livre vert, présenté la semaine dernière par la commission sur la politique de la jeunesse présidée par Martin Hirsch, est censé répondre à cet état de crise qui, des banlieues aux centresvilles, sous des formes variées, définit l’ensemble des jeunes Français dont les sociologues nous disent qu’ils n’ont confiance ni dans l’avenir, ni dans les autres, ni dans la société en général. Parmi les 57 propositions sur le logement, l’orientation et l’emploi à destination des 16-25 ans, quelques suggestions méritent l’attention : la mise en place d’un service public de l’orientation, l’obligation de formation jusqu’à 18 ans, la garantie du risque locatif pour inciter les propriétaires à louer à des prix abordables, par exemple.
Entre 15 et 18 ans, chacun pourrait ouvrir “un compte dotation”, crédité par l’Etat de 4 000 euros maximum, selon la situation financière des parents. Une somme qui pourrait être utilisée comme aide lors de la recherche du premier emploi ou pour payer des frais de scolarité. Un “complément universel” de 1 000 euros, versé à tous les jeunes de 18 ans sur leur compte de dotation, pourrait accompagner cette mesure.A ces dispositions s’ajoute un prêt d’Etat de l’ordre de 10000 euros, remboursable une fois le job trouvé, etc. L’intérêt nouveau de ce catalogue de propositions éclatées (mais mal hiérarchisées) risque pourtant de ne pas tenir face au principe de réalité du financement et de la volonté politique qui s’ensuivra.
La question de sa mise en oeuvre restant le point aveugle du dossier, il est possible de supposer que les jeunes en difficulté seront encore oubliés pour n’être que symboliquement reconnus à travers des dispositions qui ne mangent pas de pain et ne coûtent rien. Or, l’urgence politique du sort de la jeunesse exige de la part de l’Etat l’invention d’une politique dont le seul Martin Hirsch ne pourra pas porter la responsabilité, au risque de rendre la jeunesse encore plus verte.