Une initiative a réuni ce lundi les représentants du syndicat Unité SGP Police et un collectif d’habitants des banlieues à Asnières-sur-Seine, afin d’améliorer les rapports entre la police et la population. Louable, mais peu convaincant.
Il est bien triste de devoir constater l’insignifiance d’une bonne intention. Des policiers qui s’assoient à la même table que des habitants de quartiers défavorisés, pour discuter des moyens de s’entendre, en voilà une idée qu’elle est bonne.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Invités par le collectif Banlieues Respect, des représentants du syndicat Unité SGP Police, majoritaire chez les gardiens de la paix, se sont rendus ce lundi à Asnières-sur-Seine. Dans une petite salle prêtée par la mairie, ils ont discuté des relations entre les jeunes de banlieue et la police, de la « culture du résultat » imposée aux fonctionnaires, de la formation des agents et de l’impact de la révision générale des politiques publiques.
Déception sans surprise. Comme souvent dans ce genre de réunions, que des responsables associatifs (masculins) à la tête de micro-projets, âgés de 40 à 60 ans, les « grands frères » devenus papas. Ceux qui représentent on ne sait par quel miracle la « société civile des banlieues », qui s’activent, prennent des « initiatives », parlent au nom des sans-voix. Quatre ou cinq « jeunes » sur lesquels on débat sont venus, rabattus par les organisateurs, puis sont partis.
Difficile de mobiliser les habitants d’Asnières alors même que la rencontre se déroule au pied des tours, imaginons-nous. En réalité, les premiers concernés ne sont pas conviés. « On ne voulait pas attirer trop de monde », explique, sincère, un responsable associatif. « Si on ramenait le public ce serait le bordel », confesse un autre.
Comme souvent, la discussion rassemble des gens de bonne compagnie. Ceux qui, malgré leur « exotisme » qui fait sourire responsables politiques et journalistes, détiennent les codes de langage en vigueur pour un débat à peu près structuré.
Sincères, les organisateurs le sont. Lassés des promesses sur la banlieue, des plans qui se succèdent sans rien changer, ils ont décidé d’évacuer les politiciens de la rencontre pour parler directement aux policiers.
Effort dérisoire : la politique institutionnelle les rattrape très vite. Les policiers, à raison, soulignent que leurs contraintes viennent du ministère de l’intérieur. Poussés par leur hiérarchie, ils se concentrent sur les petits délits, facilement constatés et élucidés, plutôt que sur l’investigation.
L’un des représentants syndicaux raconte avoir souvent enquêté sur son temps de loisir, son service étant consacré aux menus larcins. « Aujourd’hui il nous faut des vols à la portière, alors tous au carrefour, nous disait le commissaire en fonction des chiffres à atteindre », raconte-t-il. La trentaine de participants hallucine.
Comment « améliorer les rapports avec la population » quand les commissariats de quartier disparaissent en banlieue, remplacés par une police d’intervention qui travaille toutes sirènes hurlantes ? Malheureusement, rien ne peut sortir d’une rencontre comme celle-ci hormis des vœux pieux des deux côtés : se revoir pour discuter, ne pas tutoyer les jeunes interpellés, espérer que la préparation des policiers s’améliore, filmer les gardes à vue, simplifier les procédures pour ne plus devoir « remplir quinze pages pour un vol de portefeuille ». Tout le monde le souhaite. Les policiers le demandent depuis longtemps, sans être entendus.
En rang d’oignons, les responsables associatifs donnent des interviews aux trois caméras présentes, disant leur espoir et leur provisoire satisfaction. De l’autre côté d’un grillage vert, les « jeunes de banlieue » se marrent, les « vieux de banlieue » jettent un œil désabusé. Ce n’est pas demain que la police et les banlieusards vont se réconcilier.
Photo : Ex-Glooze sur FLickr
{"type":"Banniere-Basse"}