Les auteurs de « Hold-ups, arnaques et trahisons » montrent comment Aubry a été élue à la tête du PS à l’issue d’une vaste fraude. En partenariat avec Rue89.
[attachment id=298]Le Point a publié mardi les bonnes feuilles d’une enquête à charge sur le PS, et particulièrement sur sa nouvelle première secrétaire, Martine Aubry, qui risque d’agiter pendant plusieurs semaines le landerneau socialiste, pourtant en passe de se calmer depuis la dernière université d’été.
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Si des passages sont consacrés aux querelles personnelles entre les uns et les autres (Julien Dray se disant lâché en rase campagne, Ségolène Royal pestant contre Vincent Peillon, Anne Sinclair jouant l’épouse parfaite auprès de Dominique Strauss-Kahn), dans les sept extraits publiés, le plus troublant concerne le déroulement de l’élection de la nouvelle dirigeante PS.
Selon Antonin André et Karim Rissouli, les auteurs de Hold-ups, arnaques et trahisons (Editions du moment), Martine Aubry et son entourage ont mis en place une vaste fraude pour barrer la route à leur rivale, Ségolène Royal.
« Les résultats du Nord ajustés jusqu’au dernier moment »
Le 21 novembre 2008, la France assiste médusée au spectacle d’un PS qui se déchire publiquement entre Martine Aubry et Ségolène Royal. Ils rapportent cette anecdote survenue le soir du premier tour de l’élection :
« Il est midi, ce vendredi 21 novembre (2008), quand le téléphone d’une secrétaire de section lilloise se met à sonner. A l’autre bout du fil, Guillaume Blanc, le conseiller politique de Martine Aubry à la mairie de Lille (…) La discussion est brève. Il n’y a qu’un seul message à faire passer. Dans un premier temps, la jeune femme pense avoir mal entendu. Mais la consigne est claire : “On ne prend plus de gants, vous bourrez les urnes.” »
A Lille, le conseiller politique de Martine Aubry, Guillaume Blanc, surnommé « la Stasi », envoie un SMS à tous les secrétaires de section pour interdire de communiquer les résultats de leurs fédérations. Pour Antonin André et Karim Rissouli, le but recherché est clair :
« Les résultats du Nord sont gelés pour pouvoir être ajustés jusqu’au dernier moment afin d’assurer une avance suffisante à Martine Aubry. » La fraude décrite par les deux enquêteurs porterait sur plus de 1000 voix en faveur de Martine Aubry.
« Les 58 voix de Martine Aubry ont fait des petits »
Pour opérer, ses lieutenants n’usent guère de méthodes sophistiquées, ils remplacent simplement des résultats en la défaveur de la maire de Lille par de bons scores. L’exemple de Lille-Fives est édifiant :
« Dans ce bureau, le score de Martine Aubry a été gonflé de 30 voix. Le mandataire de Ségolène Royal, après le décompte des voix en section, a pointé 58 bulletins pour Martine Aubry, 8 pour Ségolène Royal.
Il se souvient parfaitement d’avoir apposé sa signature sur le PV de résultats faisant apparaître ce rapport de forces. Sur le tableau récapitulatif de la fédération, les 58 voix de Martine Aubry ont fait des petits : la maire de Lille est créditée de 88 voix ! » Ce cas ne serait pas isolé. D’autres bureaux de vote à Lille présentent des différences de scores importants entre le premier et le second tour.
« Ils ont bourré les urnes »
Victorin Lurel, député socialiste et président de la région Guadeloupe, « constats d’huissier à l’appui », affirme que la fraude en Guadeloupe a profité à Martine Aubry. Dans deux sections, elle est arrivée très nettement en tête.
« A « Anse-Bertrand », sur 48 inscrits, le PV de section attribue 36 voix à Martine Aubry et 1 voix à Ségolène Royal. Or le bureau d’Anse-Bertrand est resté fermé le jour du vote ! (…) L’autre section litigieuse est celle de Pointe-à-Pitre : 190 inscrits. Sur les 173 votants, Aubry obtient 160 voix contre 13 à Royal. »
Pour Victorin Lurel, pas de doute : « Ils ont bourré les urnes. » Le 22 novembre, ou plutôt le 23 à 5h40 du matin, Solferino donne Martine Aubry gagnante avec 42 voix d’avance.
« Je n’ai pas triché ! Fabius, d’accord ! Mais pas moi… »
Et ce n’est pas la commission de récolement, chargée de régler les litiges, qui va améliorer l’image du Parti socialiste. C’est même elle qui fera passer la victoire de Martine Aubry de 42 à 102 voix d’avance. Une commission, racontait à l’époque Rue89, qui par trois épisodes notamment allait montrer dans quelle opacité elle avait travaillé :
- Cinq des sept corrections avaient déjà été rapidement mentionnées par les médias. Il était alors difficile de penser que ses membres avaient réellement travaillé.
- Alors que les résultats détaillés du second tour de l’élection du premier secrétaire du PS avait été rendus publics moins de huit heures après la clôture des bureaux de vote, ladite commission allait conserver plus de quinze jours durant, après l’officialisation du nouveau décompte, les résultats corrigés.
- Parmi les sept fédérations corrigées, la Guadeloupe se sentait encore flouée. Le premier fédéral du PS ne savait même pas que ses scores avaient été corrigés, et déclarait : « Je ne sais pas où ils ont trouvé huit voix en plus pour Martine Aubry et vingt-six en moins pour Ségolène Royal. Je n’ai jamais été consulté. Si vous voulez mon avis, c’est une belle mascarade ce truc-là. »
Martine Aubry et ses comparses ne reconnaîtront jamais avoir triché. En tout cas, pas eux-mêmes. Le livre raconte que le 18 mars 2009, Martine Aubry « s’égosille » dans un salon du restaurant Tante Marguerite et lâche à François Rebsamen, lieutenant de Ségolène Royal :
« « Je n’ai pas triché ! Fabius, d’accord ! Mais pas moi… » » La première secrétaire fait allusion à son score écrasant obtenu dans la Seine-Maritime, fief de l’ancien Premier ministre. »
« En 40, si j’avais porté l’étoile jaune… »
Pendant que Martine Aubry et Ségolène Royal s’affrontent, d’autres doivent faire face à la justice ou aux médias. On découvre un Julien Dray, pris dans le scandale de ses liens financiers avec SOS racisme et lâché par les siens :
« Finalement, je suis un bâtard. Tant que le bâtard joue le rôle du fou du roi, ça va… Mais quand le fou du roi veut devenir le roi, on lui dit : T’es pas de la caste, t’es qu’un métèque. (…) C’est ce que j’ai -ressenti avec François et Ségolène » (…) Elle a montré ce qu’elle était, cette bonne femme.
La première chose qu’elle fait, c’est de téléphoner à mon assistante pour savoir si cette affaire la concerne ! Elle flippe que j’aille raconter des choses. Mais si j’avais voulu, je l’aurais déjà fait et j’aurais vendu trois best-sellers. Mitterrand, lui, n’aurait jamais agi comme ça. Jamais (…)
En 40, si j’avais porté l’étoile jaune, je ne sais pas où j’aurais été. Pas à Raspail, en tout cas, parce que je me retrouvais dans le wagon. »
« Je suis solidaire de Dominique, évidemment »
A Washington, les socialistes ne font pas meilleure figure. Les auteurs racontent comment Anne Sinclair s’est retrouvée contrainte de soutenir son mari Dominique Strauss-Kahn lorsque la presse révèle qu’il a eu une liaison avec une employée du FMI :
« Lorsque Gilles Finchelstein [consultant d’EuroRSCG, ndlr] s’adresse à elle. “Et toi Anne ? Que comptes-tu faire ? ” Interloquée, Anne Sinclair répond : “Je suis solidaire de Dominique, évidemment.” “Bien, et tu vas le dire ? ”, interroge Finchelstein. “Publiquement, j’entends ? ”
La question fait l’effet d’un uppercut à Anne Sinclair. Certes, l’histoire est soldée entre elle et Dominique, mais de là à l’absoudre publiquement, en faisant passer au second plan son honneur, sa douleur de femme trompée, il y a un pas qu’elle ne peut se résoudre à franchir. »
Zineb Dryef, Julien Martin et Pascal Riché
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