La ministre de la Justice Christiane Taubira a annoncé que le projet de loi sur le mariage homosexuel offrira les « mêmes conditions » d’adoption aux couples homosexuels et hétérosexuels, mais n’ouvrira pas l’aide médicale à la procréation aux couples de femmes, suscitant de nombreuses réactions.
L’adoption par les couples homosexuels est en bonne voie. C’est en tout cas ce qui ressort de l’entretien donné par Christiane Taubira au journal La Croix paru aujourd’hui. La ministre de la Justice y annonce que le projet de loi étendra « aux personnes de même sexe les dispositions actuelles du mariage, de la filiation et de la parenté« , clarifiant la position du gouvernement en matière d’adoption :
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« Nous ouvrirons donc l’adoption aux couples homosexuels et ce, dans un cadre identique à celui actuellement en vigueur. Ils pourront, comme les autres, adopter de façon individuelle ou conjointe (de façon simple ou plénière). »
Sans surprise, la gestation pour autrui, qui permettrait à un couple d’hommes de faire concevoir et porter leur enfant par une femme avant de l’adopter, « ne sera pas légalisée« , Taubira précisant : « le président de la République a toujours été très clair sur ce sujet lors de la campagne« .
Procréation médicalement assistée : le rétropédalage
Ces grandes lignes sont loin d’avoir fait l’unanimité. La faute à un rétropédalage sur la question de la Procréation médicalement assistée (PMA), qui permettrait à un couple de femmes de se faire inséminer artificiellement pour procréer.
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François Hollande s’était engagé à ouvrir la PMA à toutes les femmes, « aussi bien les homosexuelles, les Pacsées, que les femmes célibataires engagées dans un couple » comme l’avait déclaré la députée George Pau-Langevin en février. Pourtant, selon ChristianeTaubira, « la PMA ne rentre pas dans [le] périmètre » du projet de loi. Une déclaration qui a déclenché la colère des associations homosexuelles à commencer par l’Inter-LGBT qui s’étonne de ne pas avoir été consulté avant que le projet ne soit dévoilé.
En annonçant l’éviction de la PMA du projet de loi, Christiane Taubira aurait-elle cherché à conquérir le lectorat majoritairement chrétien du journal La Croix ? C’est la question que pose Têtu dans un article mis en ligne sur son site, révélant que la ministre est restée beaucoup plus floue dans une interview donnée au magazine, qui sera publiée le 26 septembre. Sur la question de la parentalité, Taubira leur aurait répondu :
« La question de la parentalité est plus large, elle intéresse les familles quel que soit leur statut et elle emporte des conséquences juridiques bien plus nombreuses que celles nées de l’ouverture du mariage et de l’adoption aux personnes du même sexe. Je pense que ces questions peuvent être séparées pour se donner davantage de temps pour y travailler. »
Pour Têtu, cette différence de propos n’a qu’une explication :
« La ministre a délibérément choisi de rester évasive avec le public homo, alors qu’elle avait déjà tranché sur une mesure qui était pourtant une promesse de campagne très claire du président de la République. »
La ministre aurait peut-être, tout simplement, parlé trop vite. Une hypothèse alimentée par la réaction du ministère de la Famille, qui a tenu à préciser qu’il ne s’agit que d’un « préprojet« . « Nous sommes au début des auditions. On ne peut préjuger de leur contenu. Au terme de ces échanges, un projet sera soumis à l’arbitrage du président de la République et du Premier ministre » a expliqué l’entourage de la ministre Dominique Bertinotti à l’AFP.
Christine Boutin réclame un référendum
« C’est un projet de loi qui est lourd. J’ai sollicité le Premier ministre pour une audience visant à l’organisation d’un référendum » a déclaré Christine Boutin ce matin au micro d’Europe 1, réagissant au projet de loi dévoilé par Christiane Taubira. Pour la présidente du Parti chrétien-démocrate, fervente opposante au mariage et à l’adoption homosexuels, un référendum permettrait aux Français de s’exprimer, assurant : « C’est l’intérêt pour la paix civile car ce serait le suffrage universel qui trancherait« .
A l’UMP, ce projet de loi est vu comme « un moyen d’enfumer les Français« , après l’annonce de mesures fiscales sévères qui seront mises en place en 2013. Camille Bedin, secrétaire nationale de l’UMP à l’égalité des chances écrit dans un communiqué diffusé ce midi :
« Les socialistes veulent nous détourner du débat économique et social car ils n’ont à proposer que des mesures périmées (emplois-jeunes) ou des impôts supplémentaires (20 milliards). »
Autre son de cloche chez la sénatrice UMP de Paris, Chantal Jouanno, qui appelle les candidats à la présidence du parti à se positionner sur le sujet, dans un communiqué mis en ligne sur son site :
« L’UMP ne doit pas s’arc-bouter sur une position archaïque. L’ouverture du mariage et de l’adoption aux couples homosexuels constitue une reconnaissance de l’égalité des droits entre chaque citoyen. Il marque également l’application d’un principe cher à ma famille politique, celui du respect absolu de la liberté individuelle. Alors, ne passons pas pour des ringards. Ne laissons pas la modernité aux socialistes. Ne laissons pas la société évoluer sans nous. »
Le débat parlementaire s’annonce donc agité. D’autant plus qu’Europe-Ecologie Les Verts compte déposer « des amendements pour ouvrir la PMA à tous les couples, pour ouvrir l’adoption aux couples pacsés et concubins, et pour permettre la transcription de l’acte de naissance d’un enfant né à l’étranger dans le cadre d’une Gestation pour autrui« , a affirmé à l’AFP l’avocate Caroline Mecary, conseillère régionale EELV.
Rappelons que 65% des Français sont favorables au mariage homosexuel et 53% à l’adoption par les couples homosexuels, selon un sondage réalisé par l’Ifop en août.
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