Dans une longue interview à l’hebdomadaire « Le 1 », l’ancienne garde des Sceaux de Manuel Valls explique pourquoi elle ne sera pas candidate à la présidentielle de 2017. Et appelle la gauche à un sursaut intellectuel.
Beaucoup voulaient y croire, mais Christiane Taubira en a décidé autrement. L’ancienne garde des Sceaux de Manuel Valls explique dans une riche interview à l’hebdomadaire « Le 1 » pourquoi elle ne sera pas candidate à la présidentielle de 2017.
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« Etant moi-même dégagée de toute tentation narcissique, j’ai souhaité que la gauche soit en mesure d’impulser une dynamique qui rassemble ses intelligences, ses énergies, ses forces au-delà d’un exercice somme toute ordinaire et un peu besogneux. Cela me semble une obligation historique. J’ai bien vu que ce n’était pas audible. Il n’y a donc pas eu de dynamique collective », explique-t-elle.
« Que porte la gauche aujourd’hui ? Personne ne l’incarne vraiment »
Interrogée par le fondateur du journal – Eric Fottorino – sur la multiplication des candidatures à gauche, Christiane Taubira l’explique par la faiblesse de son socle politique :
« Que porte la gauche aujourd’hui ? Personne ne l’incarne vraiment car personne ne porte ce que la société fragilisée en attend légitimement », assène-t-elle.
Fin novembre 2016, une pétition en ligne réclamant la candidature de l’ancienne ministre de la Justice, déjà courtisée par certains élus socialistes, a obtenu en quelques jours 60 000 signatures. Elle culmine désormais à 95 000. L’intéressée avait répondu sur Facebook sans dire ni oui ni non. Dans Le 1, elle y fait encore référence :
« Je reste très sensible à la démarche citoyenne à travers la pétition. Elle illustre une belle maturité et un grand volontarisme, et disons-le, il y a là une espèce d’élan collectif. »
« En 2002, je suis coupable, en 2017, je suis coupable »
Mais elle note aussi que, paradoxalement, quoi qu’elle fasse elle suscitera toujours de la déception :
« J’observe que : je me présente en 2002, je suis coupable de l’échec de la gauche ; je ne me présente pas en 2017, je suis coupable du probable échec de la gauche. Heureusement que j’ai un mental d’acier ! »
Dans cette interview fleuve, la fondatrice du parti Walwari, candidate du parti radical de gauche en 2002, donne sa définition de la gauche : « La raison d’être originelle de la gauche, avant même la lutte contre les inégalités, c’est la défense de l’égalité”. Et critique « le style » de Manuel Valls, qui « était de souligner les angles, pas de les arrondir ou de tisser des liens pluriels ».
Mélancolie de gauche
Pour sortir de l’impasse, elle appelle à un réveil intellectuel de la gauche, citant notamment le philosophe Giorgio Agamben et l’historien Enzo Traverso. Celui-ci, dans son récent livre Mélancolie de gauche (La Découverte), explique qu’il ne faut pas confondre les échecs et « les raisons ayant conduit à forger les idéaux de gauche ».
« Cette analyse peut nous aider à affronter le sentiment d’impuissance qui tétanise la gauche et étrangle sa créativité et sa combativité », conclut-elle.
Elle enjoint donc ses soutiens à ne pas être en deuil de sa candidature, et à aller de l’avant en s’accrochant aux valeurs qui ont fondé la gauche.
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