La journaliste et auteure Jack Parker s’efforce de mettre fin au « Grand Mystère des règles », ce « tabou vieux comme le monde », dans son livre plein d’humour sorti le 17 mai.
Elle avait pensé à Alien 3, Les Chutes du Niagarègles ou Laisse pas traîner ton fil ; finalement, Jack Parker a choisi un titre plus sobre pour son livre : Le Grand Mystère des règles (éditions Flammarion). Avec beaucoup d’humour, l’auteure du blog Passion Menstrues explore ce « tabou vieux comme le monde » sous toutes ses coutures : un peu d’anatomie et de sexualité, une touche d’histoire, de la sociologie, mais aussi du cinéma et de l’art ; pour ceux qui « ne comprenaient pas l’intérêt d’écrire sur un tel sujet », Jack Parker démontre le contraire.
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Sa question centrale : pourquoi les règles, qui concernent plus de la moitié de la population mondiale, restent-elles encore taboues en 2017, et ce (presque) partout dans le monde ? Pourquoi a-t-on « cette montée de sueur froide lorsqu’une serviette ou un tampon [se jette] hors d’un sac alors qu’on [tente] d’en sortir autre chose ? » Pourquoi se force-t-on à « acheter des articles supplémentaires au supermarché dans le but de faire passer la boîte de protections hygiéniques inaperçue sur le tapis de caisse ? ».
En suivant ce fil conducteur, Jack Parker répond aux questions les basiques et les plus pratiques, mais elle s’efforce également d’expliquer les origines de ce tabou et ses conséquences. Et sa règle de base : ne pas prendre de pincettes. Dans Le Grand Mystère des règles, elle n’hésite pas à parler couleur et texture des menstruations (avec de jolis mots comme « visqueux », « grumeleux », « caillots » – âmes sensibles, s’abstenir) ; syndrome prémenstruel (où l’on se rend compte qu’une « crise de larmes devant une vidéo de chatons », c’est peut-être bien dû au SPM) ; ou sexe pendant les règles.
Parce que connaître le fonctionnement des règles et ce qu’elles sont vraiment, c’est un premier pas pour lever le voile qui les entoure.
Une honte construite depuis des siècles
Oser dire « j’ai mes règles » serait déjà un bon début, estime l’auteure. Mais aujourd’hui encore, la honte enveloppe ce qui préoccupe pourtant (presque) chaque mois les personnes menstruées. Il faut se cacher, rester discrète, dissimuler ce qui pourtant, rappelle Jack Parker, « permet de donner la vie, accessoirement ».
De Pline l’Ancien aux publicitaires actuels en passant par les textes des grandes religions monothéistes, on comprend mieux grâce à ce livre pourquoi quand on demande à une copine de nous prêter un tampon, on le fait en chuchotant et à l’abri des regards. Et oui, dès l’Antiquité, on a construit des représentations faussées ET quasi diaboliques des règles. Pour ne citer qu’une des pépites écrites par ce grand sage qu’était Pline l’Ancien, et dégotée par Jack Parker :
« Si les règles coïncident avec une éclipse de lune ou de soleil, les maux qu’elles causent sont irrémédiables ; il en est de même quand elles coïncident avec l’absence de lune : alors le coït est funeste et mortel pour les mâles ».
Aujourd’hui, plus question de pouvoirs surnaturels – quoique – mais l’image des règles reste encore souvent édulcorée (ah bon ? Le sang des règles n’est pas bleu comme dans les publicités pour serviettes hygiéniques ?), et, encore plus souvent, négative. Dans certains pays, comme au Népal, les femmes doivent rester isolées pendant leur cycle menstruel… ce qui leur coûte parfois la vie, rapporte Jack Parker dans son exploration des règles autour du monde.
« C’est un tabou qui tue, littéralement ».
Manque d’informations
Pour Jack Parker, la solution est simple : « en parler, et puis c’est tout ». Le manque d’informations laisse libre cours à tous les fantasmes sur les règles, encore plus chez les personnes qui ne les ont pas. Ce livre se veut donc d’abord informatif, que ce soit pour les jeunes filles qui n’ont pas encore leurs règles, ou pour leurs compagnons de classe qui se moquent d’elles quand, par malheur, une petite tâche s’est formée sur leur pantalon. D’ailleurs, dès l’introduction, l’auteure prévient :
« Ce livre s’adresse à tout le monde, et n’est pas un ouvrage ‘de femme, pour les femmes' ».
La question du genre, présente tout au long du livre, montre que les règles ne sont pas qu’une « affaire de bonnes femmes ». Les hommes sont donc plus qu’invités à lire cet ouvrage. Et les femmes aussi, bien sûr, pour en savoir un peu plus sur leur corps, et pour qu’elles cessent, elles aussi, d’entretenir cette honte autour des règles.
Si les choses progressent, conclut l’auteure, rien n’est encore acquis. OK, la photo de Rupi Kaur, period, a fait le tour des réseaux sociaux, mais elle avait été au départ censurée. OK, L’Equipe a fait sa une sur le problème des règles dans le sport, mais la solution que l’on trouve est souvent d’utiliser un contraceptif pour supprimer ces règles…
En lisant ce livre, peut-être que certaines personnes oseront dire « j’ai mes règles », et plus encore. Et, c’est certain, beaucoup lèveront un peu le voile de ce « grand mystère », car cet ouvrage dit à peu près Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les règles (sans jamais oser le demander).
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