“Macron, démission !” est l’un des slogans les plus repris dans les cortèges de gilets jaunes. Samedi 12 janvier, à l’occasion de l’acte IX du mouvement, à Paris, nous avons interrogé plusieurs d’entre eux à ce propos.
C’est une phrase qui revient souvent dans leurs bouches, mais aussi sur leurs vêtements fluo : “Macron, démission !” (variantes : “Macron dégage”, “Macron destitution” ou encore “Macron dehors”). L’acte IX du mouvement des gilets jaunes, à Paris, n’a pas dérogé à la règle samedi 12 janvier : parmi les plusieurs milliers de manifestants partis dans le calme de Bercy pour aller jusqu’à la place de l’Étoile, ce slogan cristallisant le rejet de la politique du chef de l’État – ainsi que sa personne, souvent dépeinte comme “arrogante” – était parmi les plus repris dans le cortège.
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Les gilets jaunes pensent-ils possible que le président se retrouve contraint de démissionner sous la pression de leur mobilisation, comme l’avait par exemple fait le général De Gaulle en 1969, dans la foulée d’un référendum perdu ? Philippe, intérimaire de 44 ans, estime en tout cas que “s’il pouvait partir, cela serait le mieux pour tout le monde”. Et affirme que cela pourrait arriver “si le mouvement continue, car il y aurait trop de monde contre lui”. Pour lui, qui porte le gilet jaune d’un ami n’ayant pas pu venir – et portant l’inscription “Macron dehors” – c’est une question de considération pour les citoyens : “Partir, ce serait un minimum de respect, et d’honnêteté aussi. »
“Il faudrait un remaniement de tout”
Même discours chez Marie, secrétaire médicale de 28 ans n’en pouvant plus de peiner à “finir le mois” et se mobilisant “principalement pour défendre le pouvoir d’achat”. “Au bout de neuf semaines de mouvement sans nous entendre, il faudrait qu’il démissionne, développe la jeune femme. En fait, il faudrait un remaniement gouvernemental, de l’Assemblée nationale, un remaniement de tout ! Mais je pense que Macron ne lâchera pas : il est trop arrogant, trop imbu de sa personne. Mais nous non plus, on ne lâchera pas.” Elle manifeste depuis le début du mouvement.
C’est le cas aussi de Berrué, cadre de 45 ans arborant un gilet jaune où il est question du RIC, soit le fameux Référendum d’Initiative Citoyenne réclamé par les manifestants. “J’ai écrit également “Par le peuple, pour le peuple” : l’idée est que le peuple récupère son autonomie par rapport à notre système politique totalement corrompu.” Sur la question de la démission du chef de l’État, il dit que ce dernier “n’a plus du tout de crédibilité après tant de semaines de mobilisation. En tout logique, s’il était un tant soit peu visionnaire, il verrait qu’il n’a plus du tout de popularité”.
“Demander plus de démocratie, ça n’est pas une fantaisie : nous en avons besoin”
Celui qui n’a “jamais vu un homme politique se mettant autant la population à dos” ne pense pas malgré tout qu’il démissionnera : “S’il fait de la politique, tout comme les autres, c’est pour défendre ses intérêts, pas pour représenter le peuple. Le personnel politique est complètement déconnecté.” Si Berrué est conscient de ne pas faire partie des personnes les plus précaires, il tient à manifester pour lui-même mais aussi “pour ses enfants, et les personnes les plus défavorisées”, qui seraient impactées négativement par la politique du président. “Je ne lâcherai jamais ! assure-t-il. De toute façon, il y a trop d’animosité, trop de mépris, trop de haine envers nous, les gilets jaunes. A présent, on ne peut plus lâcher.”
Cette question de ce manque de représentativité des citoyens anime également Étienne, 24 ans, venu manifester “pour rappeler que demander plus de démocratie, ça n’est pas une fantaisie : nous en avons besoin”. Selon lui, notre système politique basé sur la démocratie représentative est “vicié” et créé un “faux combat entre libéraux et populistes, lesquels ne prônent ni l’un ni l’autre le monde que nous voulons, en insufflant soit l’idéologie capitaliste, soit la peur”. S’il trouve cela “bien qu’il y ait des débats” à propos du RIC – voir cet entretien du constitutionnaliste Dominique Rousseau sur les Inrocks, rappelant comment ce système “peut aussi bien renforcer l’autoritarisme que la démocratie” – il se félicite que le sujet “ait été mis sur la table”. Concernant un éventuel départ du président, le jeune homme “souhaiterait surtout que l’on n’ait plus à subir le système politique démocratique actuel”… et pense qu’il ne démissionnera pas. Mais, “ce n’est pas grave”, car, en restant, le président donnerait de facto raison au mouvement, en incarnant ce “fossé” toujours plus grand entre lui et les citoyens. Étienne termine sur la question de la légitimité : “Le gouvernement dit que les gilets jaunes ne sont pas légitimes – mais, eux non plus, au fond. Quand on voit les chiffres de l’abstention…”
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