Aux côtés du thé, de la pluie et de la relève de la garde, la marque Burberry, fondée en 1856 et célèbre pour ses trench coats à doublure carreaux, est l’un des piliers de la culture british. C’est sur cet héritage que Christopher Bailey, directeur artistique de la marque, a voulu jouer pour cette nouvelle […]
Mis au placard depuis une quinzaine d’années, la marque britannique relance son imprimé tartan. La maison avait voulu se distancer de cet imprimé adopté par les « chavs », les racailles britanniques.
Aux côtés du thé, de la pluie et de la relève de la garde, la marque Burberry, fondée en 1856 et célèbre pour ses trench coats à doublure carreaux, est l’un des piliers de la culture british. C’est sur cet héritage que Christopher Bailey, directeur artistique de la marque, a voulu jouer pour cette nouvelle saison, présentant sa collection printemps/été 2018 à la Old Sessions House, un ancien tribunal de l’Est de Londres, au coeur d’une exposition célébrant la culture britannique à travers les âges : photos de clubs underground, de pluie battante, de couples interraciaux et de jeunesse frondeuse.
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Surprise, la relecture de l’histoire de la maison est complète. Banni depuis des années, l’imprimé tartan iconique – marron clair à carreaux – fait un grand come back dans cette nouvelle collection. Tout un pan de la culture britannique est remis en avant : loin des trenchs de banquiers et des écharpes 100% laine ultra luxe, cet imprimé a été popularisé par une partie de la population britannique tout en bas de l’échelle sociale : les chavs, terme anglais à mi chemin entre « racaille » et « beauf ».
L’uniforme des hooligans
L’imprimé tartan Burberry, c’est un peu l’équivalent du polo Lacoste ou de la pochette Vuitton en France : un objet luxe instantanément reconnaissable, approprié par un type de clientèle qui diffère de la cible initiale de la marque, dont la popularité enclenche sa reproduction massive par le marché de la contrefaçon et le rend soudainement omniprésent. Au début des années 2000, une actrice de la série Eastenders (équivalent britannique de Plus Belle La Vie, sauf que ça dure depuis encore plus longtemps) apparaît en public vêtue de l’imprimé Burberry de la tête aux pieds, jusqu’à la toile de la poussette de sa fille. C’est le point d’orgue de la folie tartan, joli coup de com de la maison impulsé par Rose Marie Bravo, CEO de l’époque, qui relance la popularité de la marque en développant l’imprimé signature sur une multitude de supports : lunettes, casquettes, pochettes, écharpes, vêtements, maroquinerie… Le total look est possible, et conseillé.
Si les ventes Burberry grimpent d’un coup et dépoussièrent un temps son image, la marque est vite dépassée par son succès. L’imprimé tartan s’impose comme le meilleur ami des femmes de footballeurs et des nouveaux riches, devenant rapidement synonyme de naff (ringard, en anglais). Le marché de la contrefaçon s’emballe, et les stands du marché de Camden se recouvrent de tartan Burberry. L’imprimé descend dans la rue via les chavs, catégorie de population honnie par les tabloïds, et les hooligans, fans de foot et de baston. Craignant de perdre son étiquette luxe, la maison fait volte face et retire l’imprimé de la vente.
https://www.instagram.com/p/BZJlll0APuP/?taken-by=burberry
Le nouveau claquettes/chaussettes
Le voici de retour en 2017. Pourquoi ce retournement de veste (à carreaux)? Si le parti pris de la maison semble a priori audacieux – une telle transparence étonne après une dizaine d’années de silence sur ce grand tabou – la vraie raison de ce come back ne tarde pas à se faire sentir : certaines des pièces de la dernière collection de la marque ont été pensées en collaboration avec Gosha Rubchinskiy, prodige de la mode russe à qui l’on attribue, aux côtés de la marque Vetements, le grand retour de la logomania. Le sweat Fila de nos années collège, que les modeux s’arrachent désormais à Urban Outfitters, c’est lui. Le jogging rentré dans les chaussettes sur les podiums, et non plus seulement dans la rue, c’est lui aussi.
Comme la banane en cuir (vue récemment chez Louis Vuitton en collaboration avec Supreme) ou la claquette/chaussette, le retour de l’imprimé Burberry sonne comme une volonté de la part d’une marque de luxe de parler à un public plus jeune, plus street, et toujours en demande d’authenticité. Par cette démarche, la maison britannique affiche son passé beauf de façon intelligente et pleine d’ironie – à l’image de la mannequin Adwoa Aboah, cool girl notoire et figure de proue de la nouvelle diversité dans la mode, qui porte une casquette tartan sur le podium. Subversion, réhabilitation… et pur coup marketing.
https://www.instagram.com/p/BZHSMq6Ap8s/?taken-by=burberry
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