Dans une tribune publiée dans Le Monde daté du 25 juin, le philosophe allemand Jürgen Habermas a des mots très durs au sujet de la politique européenne vis-à-vis de la Grèce. L’éminent penseur européen estime que le refus de l’Allemagne de lâcher du lest au gouvernement grec est “choquant, et même scandaleux.” “Le compromis n’échoue […]
Dans une tribune publiée dans Le Monde daté du 25 juin, le philosophe allemand Jürgen Habermas a des mots très durs au sujet de la politique européenne vis-à-vis de la Grèce. L’éminent penseur européen estime que le refus de l’Allemagne de lâcher du lest au gouvernement grec est “choquant, et même scandaleux.”
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« Le compromis n’échoue pas à cause de quelques milliards de plus ou de moins, pas même à cause de telle ou telle clause du cahier des charges, mais uniquement en raison d’une revendication : les Grecs demandent que l’on permette à leur économie et à une population exploitée par des élites corrompues de prendre un nouveau départ en effaçant une partie de leur passif. »
Pour le philosophe, “l’élection grecque a introduit des grains de sable dans le mécanisme bruxellois : en l’occurrence, ce sont les citoyens eux-mêmes qui ont décidé de l’urgente nécessité de proposer une politique européenne alternative”.
Tsipras moralisateur
Pour autant, il ne juge pas avec angélisme la politique mise en place par Syriza. “Alexis Tsipras et son parti Syriza auraient pu développer le programme de réformes d’un gouvernement de gauche et ‘ridiculiser’ ainsi leurs partenaires de négociation à Bruxelles et Berlin.”
Habermas estime que le gouvernement de gauche sorti des urnes “aurait dû rendre crédible son intention de lancer la modernisation d’un Etat et d’une économie qui en ont grand besoin, de se lancer dans une meilleure répartition des charges, de combattre la corruption et la fraude fiscale, etc. Au lieu de cela, il s’est cantonné dans un rôle de moralisateur – un blame game.”
Selon Habermas, les dirigeants européens ont laissé de côté leur rôle politique pour celui de créancier. « Les hommes politiques de Bruxelles et Berlin se refusent à endosser leur rôle d’hommes politiques lorsqu’ils rencontrent leurs collègues athéniens, » explique le philosophe.
« Le scandale dans le scandale, c’est l’intransigeance avec laquelle le gouvernement allemand assume son rôle de meneur. L’Allemagne doit l’impulsion qui lui a permis de connaître l’ascension économique dont elle se nourrit encore aujourd’hui à la générosité des nations de créanciers qui, lors de l’accord de Londres, en 1954, ont rayé d’un trait de plume à peu près la moitié de ses dettes. »
Avant de conclure : « Ce sont les citoyens, pas les banquiers, qui doivent avoir le dernier mot sur les questions touchant au destin européen.«
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