“Qui es-tu et pourquoi ?” Cette question aussi lapidaire qu’existentielle posée par Anders Petersen est au coeur du travail de trois photographes suédois récemment exposés à Paris : Christer Strömholm, Petersen donc, et JH Engström. Plus que d’une école suédoise, c’est de filiation qu’il s’agit entre ces trois-là. Strömholm (1918-2002) a été l’enseignant de Petersen. […]
« Qui es-tu et pourquoi ? » Cette question aussi lapidaire qu’existentielle posée par Anders Petersen est au coeur du travail de trois photographes suédois récemment exposés à Paris : Christer Strömholm, Petersen donc, et JH Engström. Plus que d’une école suédoise, c’est de filiation qu’il s’agit entre ces trois-là.
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Strömholm (1918-2002) a été l’enseignant de Petersen. « Par l’attention qu’il m’a portée, il est devenu une sorte de père », déclare le photographe, aujourd’hui âgé de 69 ans, dont l’oeuvre fait l’objet d’une rétrospective à la BNF. Le plus jeune, JH Engström, a été l’assistant de Petersen avant de devenir son ami. Ensemble, ils ont publié en 2009 From Back Home,chronique d’un retour au pays natal.
Partir et revenir, découvrir les autres et se connaître soi-même. Ces questionnements sont inhérents à leur démarche. Ils s’inscrivent dans le courant littéraire et artistique du « stream of consciousness ». Trouvant ses sources dans l’existentialisme et la beat generation, ce mouvement apparaît en photographie avec William Klein et Robert Frank, traverse la seconde moitié du XXe siècle et se retrouve encore aujourd’hui par exemple chez Nan Goldin. A rebours d’une supposée objectivité documentaire de la photographie, il s’agit de faire de la vie même, dans sa trivialité, la base de l’oeuvre. Dès la fin des années 30, Strömholm voyage en Europe puis, après-guerre, s’installe à Paris. Il y photographie des années durant deux marges : les travestis et transsexuels de Pigalle et la scène artistique. C’est ce petit monde que l’on a pu découvrir dans son exposition à l’Institut suédois. Toutes les grandes figures de l’art moderne parisien sont là : André Breton, Pontus Hultén, Yves Klein, Robert Filliou…
A 23 ans, c’est à Hambourg qu’Anders Petersen pose ses valises, en 1967. Trois années durant, il y photographie les habitués du Café Lehmitz, repaire nocturne de prostituées, macs et junkies. « Rapidement, ils m’ont accepté, dit-il. J’ai eu le sentiment d’appartenir à une famille. » A partir de cette expérience, il développera un travail sur la liberté paradoxale de l’enfermement, en prison ou en hôpital psychiatrique, avant d’affirmer depuis les années 90 une pratique diaristique.
JH Engström, lui, découvre Paris enfant, dans les années 70. Il y passe deux ans avant de revenir y vivre par intermittence depuis vingt ans. Chez lui, comme chez ses aînés, un refus absolu du pittoresque. Le banal, le quotidien, le sexe, la nudité : tous ces symptômes de la fragilité humaine « sont des réflexions visuelles de (sa) perception ».
Rémi Coignet
exposition Anders Petersen, jusqu’au 2 février à la BNF, Paris XIIIe, www.bnf.fr livre Sketch of Paris de JH Engström (Aperture), 314 pages, 70 €
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