Après les six saisons de sa série-livre Doggy Bag, retour au roman pour Philippe Djian avec Impardonnables. « Aujourd’hui tout se pète la gueule ; c’est effrayant et génial pour un écrivain ! », dit-il.
Pourquoi avancez-vous dans la narration d’Impardonnables par ellipses ?
Parce que j’aime écrire tout ce qui mène à une situation, comment les faits convergent. Ce qui arrive, la scène en elle-même, m’intéresse peu, et puis je trouve que cela alourdit le récit. Après, j’aime reprendre pour montrer les conséquences de cette scène, dire comment on s’en sort. Je veux toujours qu’on sente qu’il y a quelqu’un derrière le livre. C’est un pacte à trois : il y a l’écrivain, le livre, le lecteur. C’est pourquoi, même si je joue de ces ellipses, je veux que les lecteurs comprennent. Je veux qu’ils aiment le livre, parce que je tiens à ce qu’ils se disent que la littérature est un vrai plaisir. J’ai envie de leur dire : il y a plein d’autres livres dans les librairies, allez-y ! Certains auteurs sont contents avec leurs dix lecteurs. Pas moi. Il faut être malin, les écrivains doivent être malins, ils doivent garder leur lectorat, pour faire en sorte que la littérature garde sa place. Je peux enlever toute la ponctuation de mes livres, créer un autre langage, mais si personne ne comprend, si ça ne dit rien du monde aux lecteurs, à quoi bon ?
Et vous, vous lisez quoi en ce moment ?
En ce moment, Flannery O’Connor, La Sagesse dans le sang. Je suis passionné par les femmes en littérature : ça a commencé avec Virginia Woolf et Eudora Welty, et j’ai continué en dévorant tout Jane Austen… Les femmes, quand elles sont bonnes en littérature, elles sont excellentes, bien plus que les mecs. Car quand une femme commence à enfoncer l’aiguille dans les choses de la vie, elle va encore plus loin.
Par Nelly Kaprièlian