Pour communiquer sur la Marche des fiertés du 25 juin prochain, l’inter-LGBT avait prévu une affiche avec un coq gaulois queerisé, symbole de la France blanche, républicaine et identitaire. Sous le feu des critiques, le collectif renonce finalement à cette affiche. Décryptage de l’image.
1. Le coq fier d’être gaulois
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“Fierté, fierté, fierté…” On entend d’ici le brainstorming de l’agence de pub. En faisant appel cette année à de vrais professionnels de la com’, le collectif organisateur de ce que les gens continuent d’appeler la Gay Pride a fait le pari de l’affiche qui claque. “Le coq, sacrebleu ! Fier comme un coq !”, a dû se dire le “team créatif”. Stonewall, “I’m Black and I’m Proud”, cinquante ans de luttes des minorités pour finalement s’apercevoir que tout cela tenait dans quatre syllabes du folklore français : “co-co-ri-co !”.
A l’heure où l’équipe de France de football adopte la marinière, parfois considérée comme un objet de la culture gay, l’Inter-LGBT valide le choix d’un frère de Footix, pote de Marianne et Clovis. Bon esprit, la circulation des symboles ? Identités LGBT et “identité nationale”, même combat ? Les centaines de militants révoltés par cette affiche jusque dans les rangs de la fédération ne sont pas de cet avis. Ils ne veulent pas de cette poule mâle dominante comme le sexisme, blanche comme le racisme, rouge comme les sillons abreuvés de sang impur de La Marseillaise, sur un fond bleu comme l’aube d’une France villageoise.
2. Michou power
Ce coq n’est pas comme les autres : il est de la jaquette, comme le montre son truc en plume. En détournant la mascotte macho-patriote, l’affiche fait œuvre de second degré. Un genre d’humour apprécié de certaines minorités et des publicitaires. Le boa, tout le monde le sait, est l’accessoire fétiche de la communauté LGBT. Enfin pas vraiment des lesbiennes. Ni tellement des trans, en tout cas pas des female-to-male. Ni des gays s’employant à renvoyer “une bonne image de l’homosexualité”. Et pas plus que ça des gays qui n’ont pas bossé chez Michou dans les années fastes. Le boa est juste l’accessoire fétiche de la case “homo” dans l’imaginaire collectif moisi. Aller chercher l’objet le plus ringard, le plus fofolle, le plus enfoui dans le placard d’une communauté en voie d’absorption mainstream, cela aurait pu être le comble de la provoc’ camp. Mais additionner coq craignos et boa ringardos pour frapper l’esprit du grand public, il y a problémos.
3. En avant, citoyens
Notre coq appelle au vote. Ça sent bon la République des grandes heures. Un peu plus et il fallait s’engager dans l’armée. Mais se placer sur le terrain de l’offensive politique est louable. Ces dernières années, les visuels conçus par un pote graphiste servaient surtout à faire connaître la date que des dizaines de milliers d’ados fans d’electro dance notaient dans leur cahier de textes. Là, le coq queer avertit qu’il est capable de plus d’un coup de bec. C’est un coq sportif : il marche. C’est un coq citoyen : il vote (enfin s’il a des papiers). Pour qui ? Pour ceux qui, peut-on imaginer, établiront enfin l’égalité de ses droits en 2012. “Ce n’est pas notre république”, répondent les opposants à l’affiche. La république, en ce moment, n’est sans doute pas la meilleure copine avec qui s’afficher au niveau symbolique. Débat sur la laïcité, expulsion des malades sans papiers, minorités montées les unes contre les autres, vie politique dominée par une Marine Le Pen infiltrée chez les homos. Ce coq qui parade à la Pride chante La Grande Zoa sur un tas de fumier et rate le coche.
Crame
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