Le candidat de la France insoumise a rassemblé, selon ses équipes, 130 000 personnes entre Bastille et République à l’occasion de sa marche pour la VIe République. Une « insurrection citoyenne contre la monarchie présidentielle », selon ses termes, qui semble donner un nouvel élan à sa campagne.
Dans la foule, on aperçoit une casquette aux finitions soignées arborant ce message : “Vive la Commune.” Un accessoire vestimentaire donnant le ton de la marche pour la VIe République organisée le 18 mars (jour de l’insurrection parisienne en 1871) par Jean-Luc Mélenchon, candidat à l’élection présidentielle de mai 2017 sous la bannière de la France insoumise. Rendez-vous était pris place de la Bastille, à Paris, là même où il avait rassemblé près de 120 000 personnes lors de sa campagne de 2012. Cinq ans plus tard, c’est 10 000 manifestants de plus que son mouvement a revendiqué avec euphorie à l’arrivée du cortège, sur une place de la République en effet bien remplie – pas complètement toutefois, laissant penser à une participation sans doute un peu moins élevée.
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En tête de la marche pour la #6eRepublique, JL Mélenchon répond aux saluts des balcons pic.twitter.com/TbxTvvGTE1
— Mathieu Dejean (@Mathieu2jean) March 18, 2017
Qu’importe, le pari de Mélenchon, qui espérait rassembler 80 000 personnes, est réussi : “Notre marche prouve que nous pouvons diriger le pays” a-t-il notamment déclaré lors de sa longue allocution finale, qui a mêlé explications sur son programme et sa vision “sociale” de la société, mais aussi références littéraires et historiques. Les nombreuses pancartes tenues fièrement par ses militants – au choix : “Inégibilité des corrompus”, “droit de révoquer les élu.e.s”, “tout commence par le pouvoir des citoyens”, “IVG dans la constitution” ou encore “les déçus de la prétendue gauche avec nous!”, Hamon appréciera – affichent elles-aussi l’objectif de celui qui est crédité d’environ 12% d’intentions de vote dans les sondages : médiatiser point par point ses propositions, et, par la même occasion, redonner un coup de fouet à sa campagne, qui, ces derniers temps, s’était beaucoup focalisée sur ses discussions – infructueuses – avec Benoit Hamon en vue d’un éventuel rapprochement.
« Il faut que la société se lève »
Les études d’opinion sont d’ailleurs peu prises au sérieux par ses sympathisants, à l’instar d’Eric, jeune retraité de 63 ans venu de Bretagne dans l’un des 200 cars affrétés par le mouvement : “Je dirai qu’il est plutôt à 16-17%. On veut nous faire croire qu’il est distancé par les autres candidats pour nous inciter à ne pas voter pour lui au premier tour, dans le sens où cela serait fichu d’avance.” D’autres sont de son avis, comme Mathias, 46 ans, à son compte dans l’informatique : “Il y a des gens derrière lui (…) Il faut qu’on parle de nous, qu’on fasse entendre notre point de vue. ll faut que la société se lève!” Il se félicite qu’il n’y ait pas eu d’accord entre son candidat et Hamon, “qui surfe sur des idées qui plaisent pour récupérer des voix et représente le PS, ce [qui] n’est pas très sérieux” – un point qui fait débat parmi les “insoumis”, certains, à l’instar de Yann ou Camille, estimant “dommage” et sans doute préjudiciable pour la gauche qu’un rapprochement n’ait pas eu lieu. Mathias est d’un coup interrompu par un homme affirmant, hilare, être “son hologramme”. C’est en fait Manuel, son frère jumeau. Le meeting holographique de leur candidat leur a plu, car il est la “preuve”, outre sa chaîne Youtube, qu’il “est moderne”.
Entre #Bastille et #Republique à la marche pour la #6emeRepublique : "Le mot résister doit toujours se conjuguer au présent" – Lucie Aubrac pic.twitter.com/r2U25RGpEj
— Mathieu Dejean (@Mathieu2jean) March 18, 2017
Dans le cortège, pas de présence virtuelle pour Mélenchon : il est là et bien là, heureux semble-t-il, le poing de temps à autre levé. A ses côtés, la porte-parole d’Ensemble Clémentine Autain, la philosophe Chantal Mouffe ou encore, beaucoup plus en retrait, Pierre Laurent, secrétaire national d’un Parti communiste français échaudé par la volonté de la France insoumise de présenter 577 candidats aux élections législatives de juin, y compris dans les circonscriptions menées actuellement par le PC.
“Aujourd’hui, pour toute la Terre, la France s’appelle Révolution.”
François Ruffin, candidat à ce même scrutin dans la Somme sous l’étiquette Picardie debout (gauche hors PS) déambule aussi dans la foule, faisant circuler son césar obtenu pour Merci patron! A République, sur l’une des deux scènes installées sur la place, des personnalités publiques – Gérard Miller, Laurent Binet… – prennent la parole en direct ou en vidéo, à l’instar de Bernard Lavilliers, dont la chanson “Les mains d’Or”, hymne ouvrier, est entonnée. Il est 16h43 quand un Jean-Luc Mélenchon très en retard sur son timing prend enfin la parole aux cris de “Résistance!”.
Mise en place d’une “assemblée constituante” pour réécrire la constitution – gage d’abolition de la “monarchie présidentielle” induite par le système de la Ve République – abrogation des lois Macron et El-Khomri, généralisation du procédé référendaire (notamment pour la question européenne), sortie du nucléaire… Le candidat tacle, sans toujours les nommer, ses adversaires – pêle mêle : les institutions européennes, l’actionnariat, Macron, Marine Le Pen… – et déroule son programme, dans un discours très axé sur le “pouvoir aux citoyens”. “Regardez-la, dit-il, la voix enrouée, en montrant l’immense statue de Marianne trônant sur la place. Elle porte fièrement le bonnet des affranchis. Celui de la liberté retrouvée, de la servitude rompue (…) Nous épousons son insoumission !” Avant de chanter « l’Internationale », il conclut son allocution en citant Victor Hugo : “Aujourd’hui, pour toute la Terre, la France s’appelle Révolution.”
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