Et si c’était lui, le vêtement idéal ? Robuste, accessible, capable de fédérer au-delà des modes, des classes sociales, des genres ? En 2013, on ne devrait en tout cas voir que lui – sous toutes les formes (gilet, chemise, sac, chaussures…) et toutes les couleurs (du brut au plus délavé en passant par le plus extrême acid wash).
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Depuis les fifties et sa réappropriation par les teenagers, le jean semble traverser les modes et les époques avec une fluidité et une versatilité hors du commun. Un succès qu’il doit en partie à sa couleur bleue, la préférée du monde occidental depuis l’entre-deux-guerres, la moins marquée symboliquement, et qui n’agresse pas l’oeil (à la différence du rouge). Mais plus que bleu, le jean est indigo : une couleur instable, changeante, sensible aux frottements, à l’usure, qui confère à ce vêtement une organicité érotique – ce que Levi’s comprendra parfaitement en exploitant le filon dans les années 80 avec une série de spots torrides (on se souvient avec émotion du strip-tease de Nick Kamen dans une laverie).
Au-delà de cette particularité chromatique, le jean tire sa force de sa nature profondément conflictuelle : il est, comme le qualifie l’historien Michel Pastoureau, un “vêtement protestant”, solide, sobre et confortable, tenté par l’uniforme en même temps que le symbole d’une émancipation qu’en feront les étudiants, les mouvements contestataires, féministes et les subcultures musicales à partir des années 50.
Objet de toutes les projections, le jean est aussi le support, quasi infini, de toutes les réinterprétations. Porter un jean, c’est dire sa différence et son inclusion, son refus de l’ordre social et sa capacité à se fondre dans le moule. On n’en a pas fini avec le jean, et c’est tant mieux.
par Géraldine Sarratia et Dafne Boggeri
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