Le pdg de l’entreprise française de télécommunications s’est dit prêt à boycotter l’Etat hébreu. Pour quelle efficacité ?
C’est ce qu’on appelle une belle boulette : le 4 juin, alors qu’il était en Egypte, le pdg d’Orange Stéphane Richard, probablement enthousiasmé par les perspectives juteuses d’un marché de 90 millions d’habitants, s’est lâché sur Israël.Au détour d’une question, il a déclaré que, s’il le pouvait, il déciderait “dès demain” le retrait d’Orange d’Israël. On le comprend : l’Etat hébreu ne lui rapporte que 8 à 10 millions d’euros pour 40 milliards de chiffre d’affaires global… Alors que l’Egypte ! Or, chaque visite dans un pays musulman, chaque voyage d’affaires au Moyen-Orient est immanquablement accompagné d’une ou plusieurs questions acrimonieuses des journalistes. Israël ? Une poussière de chiffre d’affaires mais 100 % d’emmerdements.
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Pourquoi cette déclaration a-t-elle tellement choqué les Israéliens ? D’abord, parce qu’elle les ramène à la réalité démographique de la région : 8 à 10 millions d’euros contre 90 pour l’Egypte, 30 pour l’Arabie Saoudite ou 23 pour la Syrie. C’est toujours désagréable. Ensuite parce que ce genre de remarques de la part d’une grande entreprise occidentale, française de surcroît, réveille en eux l’idée qu’un boycott d’Israël est possible sur des bases morales. Et c’est pour eux insupportable. Les Israéliens se voient comme un pays occidental ordinaire : démocratie, système légal aux normes, société civile dynamique. La Belgique en somme. Ils se sont convaincus que les problèmes qu’ils rencontrent leur sont extérieurs. Stéphane Richard a annoncé qu’il allait se rendre dans l’Etat hébreu, “pour mettre un terme à cette polémique”.
Les Israéliens surréagissent
Aidés en cela par le mur de protection, les territoires palestiniens et la faiblesse des voisins arabes, les Israéliens ont développé une mentalité “d’emmurés” comme le résume Sylvain Cypel dans son livre (Les Emmurés, La Découverte, 2006). D’ailleurs, que disent ceux qui reviennent d’un séjour en Israël ? Que l’on s’amuse beaucoup à Tel-Aviv, que cette startup economy est un exemple. Du coup, les appels au boycott des entreprises étrangères travaillant dans le pays inquiète les Israéliens. Parce que ce boycott les ramène à une certaine réalité, les Israéliens surréagissent : ils se réveillent d’un long sommeil de la conscience et du confort. Il les oblige à regarder par-dessus le mur de Cisjordanie et de Gaza. C’est très inconfortable. En clair, un boycott est très efficace quand il repose sur des bases morales et qu’il frappe un pays où le débat public n’est pas confisqué. Comme ce fut le cas pour l’Afrique du Sud de l’apartheid. Une référence qui, bien sûr, a le don de révulser les Israéliens.
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