Autrefois soupente parisienne ou masure de province, l’atelier est devenu une véritable “usine” selon Warhol. Factory, garçonnière ou nouveau lieu de business, il reste un endroit privilégié, protégé et souvent caché. On a poussé les portes entrouvertes de certains d’entre eux pour rencontrer leurs tauliers. Ils se nomment JonOne, l’Atlas, Tanc ou Mr Chat. Bienvenue dans leurs fabriques. […]
Autrefois soupente parisienne ou masure de province, l’atelier est devenu une véritable “usine” selon Warhol. Factory, garçonnière ou nouveau lieu de business, il reste un endroit privilégié, protégé et souvent caché. On a poussé les portes entrouvertes de certains d’entre eux pour rencontrer leurs tauliers. Ils se nomment JonOne, l’Atlas, Tanc ou Mr Chat. Bienvenue dans leurs fabriques.
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John Perello aka JonOne est exposé jusqu’au 26 juillet à l’Institut du monde arabe à l’occasion de la rétrospective collective “Hip-Hop, du Bronx aux rues arabes” orchestrée par Akhenaton.
Son travail est également visible à l’Institut culturel Bernard Magrez, 16, rue de Tivoli à Bordeaux, à l’occasion de »King of Harlem », un solo show à expérimenter jusqu’au 23 août 2015.
« The Chronicles », sa première monographie est toujours disponible, ici et là. Plus d’infos : www.jonone.com
« L’atelier ? L’espace psychique dont on a besoin pour ne pas péter un plomb »
Tanc et L’Atlas partagent leur atelier depuis toujours. Campé en duplex sur les toits du Nord-Est parisien, le binôme post-graffiti se nourrit du travaille de l’autre.
“J’ai une pratique chirurgicale de l’acte créatif. Je suis entouré de cutters, d’outils de menuiserie, de découpes numériques ou de plans sur papier. J’évolue avec ordre et méthode, voire une certaine maniaquerie… j’archive tout. Autant de réflexes de calligraphes en fait. Un calligraphe, avant de se mettre au boulot, il range sa table pendant une heure. C’est un bon prélude à la création je trouve.” Chez Tanc, les matières jaillissent, s’empilent. Sa moitié de l’atelier est agencée de manière beaucoup plus spontané.
“Par rapport à l’énergie de la rue, l’atelier permet de dilater le temps et insuffle répit et méditation dans tes gestes. Cet espace, il a un côté monastique. Peindre me soigne, toutes les semaines, je répète cet acte thérapeutique. C’est la banlieue de mon esprit, une projection psychologique. Et en même temps rien n’est figé ou fermé ici. Tanc et moi avons construit ce lieu il y a cinq ans pour qu’il puisse recevoir des gens, galeristes, collectionneurs, journalistes et même un public de fêtards.”
Tous les ans, la teuf du tandem Tanc x L’Atlas fait résonner les toits des Lilas durant plus de 48 heures.
“Tout notre mobilier est monté sur roulettes, et constitue autant de blocs modulables à l’envie. La dimension laboratoire est primordiale. Dans la rue, tu es confronté au regard des autres, donc tu as tendance à répéter ce que tu sais faire, ce que tu maîtrises. Ici, on peut s’arracher de notre zone de confort créatif pour aller vers l’accident et les expérimentations.”
“Nos travaux respectifs se nourrissent du regard de l’autre. Avec L’Atlas, nous nous suivons depuis tellement d’années, nous connaissons tellement l’œuvre de l’autre que les dialogues qui s’instaurent vont au cœur de nos créations. Artistiquement, on a grandi ensemble, on a vu et observé les évolutions de chacun. Ces moments de déconne, de présence discrète, ces drôles de retours sur expérience, directs et souvent inconscients. Ils nous manquent lorsque l’autre est absent.”
Jules Dedet aka « L’Atlas » est actuellement exposé à la Fondation ONA, au cœur de la Villa des Arts de Casablanca au Maroc. À Paris, vous pourrez le voir lui aussi jusqu’au 26 juillet à l’Institut du monde arabe à l’occasion de la rétrospective collective « Hip Hop, du Bronx aux rues arabes » .
Les œuvres de Tanc sont visibles à Londres au sein du French Art Studio. Pour la France, rendez-vous à la galerie phocéenne David Pluskwa Art Contemporain.
Plus d’infos : www.latlas.org & www.tanc.fr
“J’étais dans le pack Lilas mais je n’arrivais pas à trouver mon indépendance”
Seul dans son petit atelier-appartement à Saint-Ouen, Mr Chat passe ses journées à dessiner son chat, OKLM. Après des semaines de surexposition médiatique suite à l’attaque en justice de la RATP à son encontre (pour avoir recouvert les murs de la station Châtelet de ses chats en mai dernier), l’artiste profite du calme revenu après la tempête. Il revient sur ces quelques semaines de tourmente : “La surmédiatisation telle que je l’ai vécue est très déstabilisante. Et surtout, ça a véhiculé une image biaisée de moi. Dans la façon dont les médias me décrivaient et à ce moment là, souvent je ne me reconnaissais pas. Alors que, comme dit Solar : ‘Il faut rendre à Solar ce qui est à Solar’.”
Il se confie : “J’ai flippé car moi, mon discours, c’est que je n’ai pas de discours. Donc les chats que je dessinais dans le métro, ce n’était pas du vandalisme et il n’y avait pas de message politique. Je ne revendiquais rien si ce n’est de gentiment perturber le quotidien. J’ai l’impression que ça a été mal compris. Ensuite il y a eu une levée de boucliers politiques pour me défendre. J’ai été touché sauf que je me suis senti asservi puis redevable.”
Mr Chat explique avoir pris du recul sur cet épisode et en avoir tiré du positif. Il compare cette descente dans l’arène médiatique à celle d’un gladiateur romain dans l’arène tout court. « C’est une sorte de purge. Au début c’est marrant, ensuite tu t’y perds et finalement quand tu t’en sors, tu te retrouves ». Sauf que, comme tout combat, on y laisse des plumes. En l’occurence, des poils de chat: « Pour ce genre de bataille, il faut y aller équipé. Moi je n’avais pas de discours tout préparé. J’étais juste un humain. J’ai vraiment trouvé ça hardcore ce truc de rouleau compresseur médiatique. J’en suis ressorti un peu amoché ». D’autant que « le milieu » n’a visiblement pas été tendre avec lui. Surtout ceux qui, par le passé, ont du, eux, payer des dommages et intérêts pour vandalisme.
En ce moment, Mr Chat travaille sur un photo roman, « pour reprendre en main l’histoire » sur ce qu’il s’est vraiment passé pendant l’épisode RATP. « Avec ce photo-roman, je suis mon propre média. C’est une sorte de pamphlet, de pastiche ». Sa sortie est prévue pour le 21 juin, le jour de la fête de la musique. Ils sera distribué dans le métro et il pourrait bien s’appeler “Mr Châtelet”.
Théophile Pillault et Mathilde Samama
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