Cinq statues de Donald Trump ont fleuri dans cinq villes américaines dans la nuit du mercredi 17 au jeudi 18 août, avant d’être rapidement retirées par les forces de l’ordre. Derrière ce coup de force politique se cache INDECLINE, un collectif d’activistes anonymes bien décidé à tirer la sonnette d’alarme.
Donald Trump a dû faire une drôle de tête jeudi 18 août au réveil en découvrant que cinq statues à son effigie avaient été déposées dans la nuit dans les rues de New York, San Francisco, Los Angeles, Cleveland et Seattle. Leur particularité ? Elles le représentent dans sa plus laide nudité, bedonnant, les veines apparentes, le sexe minuscule, sans testicules. Une plaque les baptise d’ailleurs « The Emperor has nos balls » (l’Empereur n’a pas de couilles).
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There is a naked Trump statue in Union Square right now. pic.twitter.com/26bYxY4AwF
— New York City Patch (@NYC_Patch) 18 août 2016
Elles sont le fait de INDECLINE (« in decline » signifie « sur le déclin »), un « collectif d’activistes américains fondé en 2001 en Californie, composé de graffeurs, d’activistes, de réalisateurs et de musiciens« , comme ils nous l’écrivent par mail, refusant d’en dire plus sur leur identité.
Les statues sont une adaptation picturale du conte Les Habits neufs de l’empereur d’Andersen, qui raconte l’histoire d’un empereur vaniteux demandant à deux tailleurs de lui confectionner le meilleur costume qui soit. Souhaitant lui jouer un tour, ils lui offrent un habit invisible aux yeux, disent-ils, des personnes sottes. N’osant pas avouer qu’il ne le voit pas, l’empereur revêt le costume et parade dans son royaume. Ses sujets font, eux aussi, semblant de le voir, à l’exception d’un enfant qui lâche à voix haute que l’empereur défile en vérité tout nu. Appliquée au candidat républicain à la présidentielle Donald Trump, la charge politique est claire.
« Nous voulions dire au monde combien Donald Trump est seul, exposé et vulnérable à ce stade de la course présidentielle. Ses jours sont comptés et tout le monde se réveillera du cauchemar très bientôt, nous assure un porte-parole d’INDECLINE par mail. Il n’est plus une menace, et nous sommes fiers de dire qu’il ne présidera pas notre pays. » INDECLINE décrit Trump comme « accro à la peur et prospérant en intimidant la populace américaine avec sa rhétorique arrogante et raciste » :
« C’est important que les Américains comprennent que notre pays vaut mieux que Donald Trump et que, contrairement à l’époque de George Bush (qui a du voler une élection), nous ne resterons pas silencieux et dociles alors qu’il cherche à conduire notre pays en enfer. »
« J’adorerais voir un supporter de Trump d’une soixantaine d’années, furieux, essayer d’en abattre une à mains nues »
INDECLINE décide donc de faire appel à l’artiste Ginger, basé à Cleveland et spécialisé dans le genre horrifique (les décors de maisons hantées, entre autres). « Nous voulions un monstre, donc nous lui avons demandé de nous faire Donald Trump ». Les villes, elles, ont été sélectionnées en fonction de leur « véhémence inflexible à l’encontre de Trump et de tout ce que ses supporters et lui-même représentent ».
Interrogé par le Washington Post, Ginger explique que la plus grosse difficulté résidait dans la confection de la bouche de la statue, qu’il souhaitait renfrognée, avec « un air constipé« , afin d’exprimer la frustration implicite de Trump à l’encontre de l’Amérique contemporaine. « Il a une petite bouche très prononcée, la façon dont son menton rejoint ses bajoues devait être ressemblante« .
L’artiste s’attendait à voir ses statues retirées au bout de 30 à 45 minutes, même si, confiait-il au Washington Post, il « adorerai[t] voir un supporter de Trump d’une soixantaine d’années, furieux, essayer d’en abattre une à mains nues ». Rien de tel ne s’est produit, et toutes les statues ont été rapidement enlevées par les municipalités, sauf à Los Angeles, où un commerçant s’est interposé et a proposé d’héberger la statue de Trump sur une propriété privée, à savoir sa boutique de souvenirs, qui fait également galerie, dans le quartier branché de Los Feliz. S’y pressent désormais des hordes d’Angelenos anti-Trump armés de leur précieux smartphone.
« La nature temporaire de ces cinq statues est devenue la métaphore même du projet, assurait pourtant INDECLINE dans son communiqué de presse. Chaque pièce restera en place une durée de temps limitée avant d’être retirée par la ville ou la police et il est peu probable que l’une d’elles soit revue un jour. Contrairement aux statues, c’est notre souhait que Donald Trump, notre Empereur du fascisme et du sectarisme n’occupe jamais la position politique et militaire la plus puissante du monde. Ces installations fugaces représentent la brièveté de notre cauchemar. »
Un engagement en faveur de Black Lives Matter
INDECLINE – qui souhaite « faire la lumière sur les abus sociaux et environnementaux perpétrés par des politiciens et des entreprises américains » – n’en est pas à son premier coup. En mars dernier, le collectif apposait les noms d’Afro-américains victimes de violences policières sur le fameux Walk of Fame de Hollywood, et postait la vidéo de leur action sur leur site. En fond sonore : un discours de Malcolm X prononcé en 1962, suite au meurtre de Ronald Stokes, membre de l’organisation Nation of Islam, par des forces de l’ordre à Los Angeles.
Contacté par le Washington Post, INDECLINE déclarait alors : « Il y a des noms dans notre société actuelle qui mérite plus d’attention que ces « célébrités ». (…) Sans complètement discrédité les contributions de Vin Diesel au monde du cinéma, qui devraient lui valoir un Oscar, quelqu’un devait intervenir afin d’aider l’Amérique à se concentrer sur l’entité qui est littéralement en train de nous tuer : les officiers de police américains.«
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