Quelles images ont traversé l’esprit du président des Etats-Unis alors qu’il reçevait le prix nobel : son parcours d’enfant d’immigré africain devenu le leader de la première puissance mondiale, ou l’écho des batailles à venir en Afghanistan où il vient de décider d’envoyer 30 000 hommes de plus ? En partenariat avec Rue89.
[attachment id=298]Barack Obama s’est-il senti réellement honoré ou a-t-il passé un mauvais moment ? Quelles images ont traversé l’esprit du président des Etats-Unis alors que le président du Comité du prix Nobel de la paix faisait son éloge, jeudi à Oslo : son parcours d’enfant d’immigré africain devenu le leader de la première puissance mondiale, ou l’écho des batailles à venir en Afghanistan où il vient de décider d’envoyer 30 000 hommes de plus
Dans son discours, le lauréat du prix Nobel de la paix n’a pas éludé la polémique qui a accompagné sa désignation alors qu’il est installé à la Maison blanche depuis moins d’un an et n’a, évidemment, pas eu le temps d’accomplir grand chose.
Il aurait eu du mal à l’ignorer : tant dans son propre pays qu’en Norvège, où se déroulait la cérémonie jeudi, une majorité estime dans les sondages que ce prix n’est pas mérité, ou, pour les plus généreux, prématuré.
Symbole de paix ou actes de paix ?
Un débat m’a opposé jeudi, à l’heure de la cérémonie d’Oslo, sur l’antenne de BFM-TV, à Olivier Ferrand, le président de la Fondation Terranova, qui estimait que le parcours d’Obama suffisait en soit pour justifier ce prix, que c’était un symbole de progrès et de paix et que les symboles avaient leur importance.
Il me semblait, à l’opposé, que le Comité Nobel avait au contraire ruiné le reste de crédit du prix en l’attribuant à un homme pour ce qu’il est plutôt que pour ce qu’il a accompli. Et force est de constater qu’Obama a certes donné tous les signaux encourageants qu’il fallait dans les premiers mois (annonce de fermeture de Guantanamo, discours du Caire sur l’Islam, main tendue à l’Iran…), mais que les actes restaient à suivre.
Et surtout, Obama est, et reste, comme il l’a dit lui-même, le « commander in chief » d’u pays engagé dans deux guerres : l’Irak dont il cherche à se désengager, et surtout l’Afghanistan dont il a fait « sa » guerre en décidant d’une escalade des effectifs sans précédent.
Et à ce titre, il assume la double identité des guerres comme il l’a expliqué dans son discours en tentant d’élever le débat : d’un côté une guerre peut être « juste » pour atteindre un objectif louable, d’autre part, elle est nécessairement « une partie de la folie des hommes ». (Voir ce passage du discours, en anglais)
Les optimistes retiendront de la cérémonie d’Oslo l’espoir qu’Obama sera encouragé à faire ce pour quoi il a été récompensé par avance. Les plus cyniques observeront que le prix Nobel avait jusqu’ici récompensé des hommes de guerre qui avaient, à un moment, fait la paix, ou au moins une paix -Kissinger et Le Duc Tho, Begin et Sadate, Rabin et Arafat…- et qu’il a cette fois primé un homme de paix qui se met à faire la guerre.
Au moins Barack Obama a-t-il eu l’intelligence de ne pas faire un paquet cadeau entre Oslo et la conférence sur le climat à Copenhague, qui était du plus mauvais effet. Il reprendra donc la semaine prochaine le chemin de la Scandinavie, avec, espère-t-on, des bonnes nouvelles pour la planète.
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