Incroyable mais vrai, ce hoody de faux groupe de rock et l’enfant qui le porte sont le nouveau visage de l’avant-garde moscovite.
Ce chérubin vous semble bien trop jeune pour fumer ? Du haut de sa préadolescence, il n’est pas non plus en âge de porter un hoody aussi cher. Etonnant mais véridique, cette bouille mégotée et anonyme est un visage imprévu de la mode d’avant-garde. Il apparaît dans le lookbook du presque aussi juvénile Valentin Fufaev, un skateur de 16 ans connu pour son identité internet, Double Cheeseburger, qui produit aujourd’hui une capsule de basiques inspirée par le sport à petites roulettes. Jusque-là, rien de terriblement novateur.
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A un détail près. Ces pièces sont produites en collaboration avec le label japonais Comme Des Garçons et vendues dans leurs concept stores (Dover Street Market) de New York et Ginza, à Tokyo, dans une présentation multimédia accompagnée d’une exposition et d’un fanzine. Quel lien entre ce jeune qui a tout l’air de sniffer de la colle et le maître du minimalisme nippon ? Une quête de la simplicité, un geste d’opposition au système du luxe, pour un résultat profondément politique.
La rencontre se fait via Gosha Rubchinskiy, lui aussi soutenu par la maison japonaise. Ce Moscovite – artiste, photographe et surtout créateur – se fait connaître pour ses looks sportwear nineties inspirés par les enfants des rues dans la Russie appauvrie d’après la chute de l’Union soviétique. Ses castings sont très jeunes (Valentin Fufaev défile d’ailleurs pour lui) et ses designs ressemblent à de la contrefaçon de marques américaines comme on en trouve sur les marchés en Europe de l’Est.
Le degré zéro du design
Aujourd’hui, vingt-sept ans après la chute du mur de Berlin, Gosha met l’accent sur une génération qui n’a pas connu le communisme. Des jeunes qui ne se souviennent que du déclin qui s’en est suivi, accompagné de l’arrivée en masse des logos et des sous-cultures énervées – créant un melting-pot visuel détaché de ses origines. Ainsi, on découvre du sportwear sans sport, du lettrage imitant le merchandising d’un groupe de rock imaginaire.
Ce degré zéro du design suggère plutôt une appartenance symbolique pour la poignée d’ados branchés qui reconnaîtra le logo. A Rubchinskiy de confirmer que “les jeunes ont un rapport aux marques proche de celui d’un groupe de rock : une appartenance unifiante, une communauté à travers le monde, la permission d’aller parler à quelqu’un en soirée qui porte le même T-shirt”.
Et peut-être, au passage, l’envie d’exorciser la pauvreté en investissant une valeur marchande et esthétique dans ces codes populaires. Même si le résultat ne bénéficiera qu’à un public aux antipodes de sa source d’inspiration.
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