A force de se racheter les uns les autres ou de se piquer tour à tour leurs meilleures fonctionnalités, nos réseaux sociaux tendent à dangereusement s’uniformiser. Et s’ils deviennent tous les mêmes, pourquoi n’en resterait-il pas qu’un seul ?
La dernière mise à jour Instagram fait mollement gronder un Internet presque las. Dans une ultime attestation d’uniformisation, le réseau social racheté par Facebook en 2012 se dote désormais de deux nouvelles fonctionnalités : la diffusion de vidéos en streaming live (façon Periscope ou Facebook Live) et l’envoi de messages éphémères (façon Snapchat ou Facebook Messenger). L’ADN d’Instagram devient de plus en plus diffus, perdu dans le désir aveugle de conquérir toute la jeunesse, noyé dans la guerre ouverte avec ses concurrents.
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Instagram à chaque mise à jour il se « snapchatise » un peu plus.
— Michael Scott (@Djems94) November 22, 2016
Mais il serait bien trop facile de ne blâmer qu’Instagram et ses airs d’adolescent en crise et en quête d’identité. Car sans plus de subtilité ni de singularité, Snapchat joue la même partition. Été 2016, alors qu’Instagram intègre la fonction Story, toujours selon le modèle de son adversaire, Snapchat trouvait du bon dans l’éternel et baptisait « Memories ». Réseau sorti de l’anonymat grâce à des messages qui s’auto-détruisent, Snapchat permet finalement de sauvegarder chacun de ses snaps, de tout conserver comme au sein d’une collection consultable à souhait. Comme sur Instagram. Assez vite, le serpent se mord la queue et sonne la fin de la partie dont personne ne sort gagnant. Sur l’un comme sur l’autre, on peut partager des messages (texte, photo, vidéo) qui durent 10 secondes ou toute la vie.
L’ennui total ces reseaux sociaux ou tu pourras bientôt poster le même type de contenu, de la même façon, au même moment … #lastRT
— Alex Socks (@alexscks) November 21, 2016
Ils ont tué Vine
A chaque mise à jour, le jeu des différences entre les réseaux se complexifie. Non seulement elles sont plus dures à trouver, mais surtout de moins en moins nombreuses. Face à cette difficulté de différenciation, comment éviter de tomber en désuétude ? Vine n’a pas réussi. L’application de partage de vidéos de 6 secondes max, rachetée par Twitter en 2012, coûtait beaucoup trop d’argent et n’en rapportait pas assez. Parce que Instagram s’est mis à la vidéo, parce que Snapchat est arrivé, et parce qu’ils sont trop nombreux à proposer le même service sur les mêmes conditions d’accessibilité. Ils se cannibalisent.
Snapchat came along and ate Twitter’s lunch. Never overcame that.
— Mark S. Luckie (@marksluckie) October 27, 2016
Mark S. Lucie, un ancien de chez Twitter, a tweeté cette formulation très juste sur la fin de Vine : « Snapchat a débarqué et a bouffé le repas de Twitter« . Snapchat a débarqué et a volé le nouveau joujou de Twitter, ça marche aussi. Instagram a pompé le devoir d’histoire de Snapchat et a eu une meilleure note car la présentation était plus soignée. Ça marche aussi. Plus que de simples rivaux, ils se sont inexorablement transformés en phagocytes. Des phagocytes menaçants, qui se tournent autour et attendent le bon moment pour absorber l’autre, ou une partie.
A la fin, il n’en restera qu’un, et ce sera sans doute Facebook
Pour rappel, en terme de réseautage social, MySpace était là avant. Et malgré l’âge d’or qu’il a connu au milieu des années 2000, Facebook l’a tué, sans sommation. Et Facebook a depuis survécu à tous les nouveaux arrivants sur le marché. Il fait d’ailleurs mieux que survivre, puisque selon les derniers chiffres son bénéfice a presque triplé (+186%) en un an, son nombre d’utilisateurs continuant d’augmenter.
Alors même si Mark Zuckerberg perd des adolescents, c’est au profit de leurs parents et grands-parents, qui passent leur temps à jouer à des jeux et à mettre en ligne des photos de repas de familles. Mais Facebook, avec ses 1,71 milliard d’utilisateurs connectés au moins une fois par mois, enterrera tous les autres. Car même s’il ne s’y passe plus grand chose, et que les 15-35 préfèrent partager une info sur Twitter ou poster une photo sur Instagram, Facebook est ce camping mondial où tout le monde se connait, ou tout le monde peut se trouver, se retrouver, se parler. Ce n’est pas sur Snapchat qu’on va envoyer un message au mec croisé en soirée ou à son amoureuse de maternelle.
Ce qui différencie Facebook, aussi ringard soit-il devenu, c’est précisément de référencer le monde entier qui est mis à disposition en un clic. Et c’est parce qu’il a cette utilité propre que son existence ne sera jamais menacée. Au contraire des autres. Attention les autres. Vine est mort, et vous pourriez être les prochains.
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