La semaine dernière, des cochons tués avec amour, un saucisson un peu trop aigu, un road-trip sans GPS, des nuits de travail et l’anarchie comme solution.
Quand Pierrot, ancien boucher reconverti dans l’abattage à domicile et sans douleur, tue un cochon, il le fait avec doigté, élégance et respect. Porcinet a apprécié. Il ne s’est pas débattu. “Etait-ce violent ? C’était silencieux et rapide. Pierrot a armé son pistolet, un calibre .22 dont il pointe le canon sur la tête de l’animal, à bout portant. Détonation sèche, imperceptible.”
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Porcinet est mort près des siens, chez lui, en famille. On l’a tué avec amour. Notre bon cochon est désormais sur le flanc. Il faut ménager les vivants, “évacuer rapidement le condamné pour le saigner dehors, de l’autre côté de la porcherie pour ne pas habituer les autres à l’odeur du sang”. Ils ne sont pas cons les autres, ils sentent bien que cette mort n’est pas bon signe, qu’elle doit les concerner un peu aussi. Ils comprennent que Pierrot, avec toute sa bonhomie, ne fait pas dans le détail. Stéphane, l’éleveur, explique : “Les prochains, ils tourneront la tête lorsqu’ils verront Pierrot arriver, ils sont pas cons.”
Le droit du porc à mourir dans la dignité
Pierrot, lui, n’explique plus, il agit, “tranche la carotide et le sang coule. Il fait encore froid, le sang fume, comme une vie qui s’en va.” On avait gardé de l’école élémentaire le souvenir du loup qui “refermant ses grands yeux, meurt sans jeter un cri” et de nos colos de vacances celle du petit cheval dans le mauvais temps qui mourait dans un éclair blanc.
Cette semaine, la mort du porc complète notre collection. Une mort dans la dignité, le dialogue et le respect du vivre ensemble. “Je lui ai demandé pardon. Je l’ai remercié pour la viande qu’il va nous donner”, explique notre bon Pierrot. Porcinet a dû apprécier.
A l’autre bout de la chaîne, Christophe est déçu. Son saucisson est un peu aigu, et “le saucisson, ça ne doit pas être aigu”. Pauvre Porcinet. Une vie entière pour finir en saucisson trop aigu. C’est très important d’élever et de tuer humainement les bêtes. Mais ce qui est terrible dans une vie de porc, c’est l’existence. Quelle vie !
Les nuits debout de Christophe
Tu nais, t’engraisses, et un jour tu deviendras saucisson, mon cochon ! Ouvrez ouvrez la cage aux pourceaux ! Sautez les clôtures ! La vie commence quand on renverse les clôtures. Philippe Katerine ne suit pas les chemins tracés d’avance. Il les invente. Pour écrire son album, il s’est baladé en France “au hasard, pas de carte, pas de GPS”.
Si Christophe est “définitivement vivant”, c’est que personne ne lui impose aucune règle du jeu. Ni dieu, ni maître, ni heures de bureaux : “En général, vers 6 ou 7 heures, après avoir passé la nuit à travailler, j’ai envie de voir un film. J’en vois un par jour.”’
“Mais je commence à le voir vers 7 ou 8 heures. Du coup, désormais, je me couche entre 10 heures et midi et je me lève en début de soirée.” Christophe passe ses “Nuit(s) debout”. Faisons comme lui. Cessons de vivre comme des cochons d’élevage en attendant la mort. “Anarchie, la solution pour 2017 ?” Alexandre Gamelin
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