“Confessions nocturnes” est une chronique bimensuelle qui donne la parole aux lecteur·ices pour parler de sexe, d’érotisme, de genre, d’attachement, d’infidélité… Et qui tente de répondre à cette question : “Comment s’aime-t-on en 2020 ?” Aujourd’hui, Julie, 28 ans, nous parle de fétichisme et de consentement.
Julie – “Tout commence par une soirée banale. Un vendredi soir classique où je retrouve une copine pour boire des coups en terrasse, histoire de débriefer notre semaine, nos déboires, nos doutes, nos rires, et nos derniers dates. Une bouteille de blanc plus tard, la table d’à côté commence à nous aborder. Trois mecs plutôt beaux gosses et à la tchatche facile avec qui on rigole (et on picole) bien. La soirée est légère, on a déjà l’impression de bien se connaître. Naturellement, quand l’un d’entre eux nous propose de prolonger la soirée en boîte, on accepte sans hésiter.
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Nous sommes en 2017, j’ai 25 ans et Ben un peu plus. Ben, c’est ce grand brun barbu musicien au sourire dévastateur qui me tourne autour depuis le début. A cette époque là, je suis dans une mauvaise passe sentimentale, une sorte de perdition où je noie mon chagrin dans les soirées. Et Ben a clairement le profil pour me faire craquer mais jamais je n’aurais pu me douter de ce qui allait arriver par la suite.
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Le coup classique
Dans le club, on continue les discussions, les verres, et on danse. Je flirte un peu avec Ben, c’est insouciant, agréable. Il est presque 3 heures du matin quand ma copine décide de rentrer et que je me rends compte qu’il me reste 4 heures pour dormir avant d’aller à l’hôpital passer une IRM. Dans un élan plus sérieux que je ne voudrais l’être, j’explique à Ben que je m’en vais prendre un taxi. Réponse : « Ah bah j’habite sur ta route, partageons la course. » Le coup classique.
Dans la voiture, je suis tiraillée entre la fatigue qui commence à m’assommer et la tentation de prolonger la soirée. Ce qui devait arriver arriva, Ben me propose de « prendre un (innocent) dernier verre chez lui« . Devant mon refus, il insiste et propose même de finir la soirée par une simple tisane « juste » pour me montrer son bel appart. Laissant sur le siège arrière ma raison, j’accepte de monter. Ben me plaît, et après tout pourquoi refréner ça ?
L’appartement est, en effet, digne d’une revue de déco. Je commente ses bouquins sur la bibliothèque, et plaisante sur ses œuvres d’art accrochées au mur. La tisane n’aidant sans doute pas, je n’arrive plus à lutter contre la fatigue… Décidée cette fois-ci à rentrer, je commence à rassembler mes affaires. Mais ça, c’était avant que Ben ne commence à m’embrasser.
Nous sommes tous les deux allongés sur son lit, et avant que les choses n’aillent plus loin, je l’arrête net en lui demandant s’il a un préservatif. Il râle un peu, j’insiste, et lui tiens tête : « On ne se connaît pas du tout, donc soit t’as une capote, soit je rentre chez moi dormir. » Dans la vie, comme au lit, je ne suis pas du genre à me laisser faire. Tandis que monsieur part tout de même fouiller dans la salle de bain, je m’endors, ce qui me semble être deux minutes à peine.
Une sensation mouillée et étrange
Tout à coup, une sensation mouillée et étrange sur les pieds me réveille. Je regarde au bout du lit, les yeux encore à moitié ouverts, et j’aperçois Ben dans la pénombre. Je me redresse d’un seul coup comme une flèche et me retrouve nez à nez avec sa tête dépassant du bout du lit. Il me regarde avec de grands yeux écarquillés, et là, j’explose de rire en comprenant ce qu’il est en train de faire. Le mec a entrepris de me lécher les pieds, comme ça, sorti de nulle part. Je lui crie stupéfaite : « Mais tu fais quoi là ? ! » Et il me répond, très sérieusement, un poil vexé : « Bah, quoi ça te plaît pas ?«
Personne ne m’a jamais léché les pieds jusque-là donc je reconnais ne pas avoir d’avis sur la question, mais surtout qui lèche les doigts de pieds des gens sans les prévenir ? « Bah du coup j’arrête ? » me demande-t-il encore alors que je ne sais pas si je dois rire ou pleurer. Ben se rassoit à côté de moi et commence à m’embrasser. Je lui explique que non, je n’en ai plus du tout envie, il fait mine de ne pas comprendre… Il est 7 heures du matin, je prends mes jambes à mon cou et je rentre immédiatement chez moi prendre une douche avant d’aller faire mon IRM. En méga gueule de bois, je vomis même dans la salle d’attente.
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Aujourd’hui, cette soirée me reste en mémoire comme celle d’une nuit qui avait bien commencé mais est devenue complètement ratée, et improbable. Ben restera pour moi – et mes copines – comme le mec loufoque et gênant qui m’a léché les pieds. Je retiens surtout qu’il y a encore beaucoup trop d’hommes immatures qui doivent être éduqués sur la notion de consentement.
Lui, a insisté à plusieurs reprises par messages pour que l’on se revoie, ce que j’ai poliment décliné. Je ne l’ai jamais revu… Enfin si, un an plus tard dans une pub à la télé.”
Propos recueillis pas Fanny Marlier
Si vous aussi, comme Julie, vous souhaitez nous raconter votre histoire, n’hésitez pas à nous écrire : fanny.marlier@inrocks.com
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