Alors que le gouvernement réfléchit aux moyens de poursuivre « Minute » en justice à la suite de sa couverture raciste sur Christiane Taubira, la rédaction de l’hebdomadaire d’extrême droite assume son coup.
Minute n’aurait pas pu rêver mieux. Avec sa couverture titrée “Maligne comme un singe, Taubira retrouve la banane”, l’hebdomadaire d’extrême droite a déclenché une véritable tempête politique et médiatique. Durant toute la journée de mardi, les réactions d’indignation se sont succédées.
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Au sein de la rédaction, on se réjouit
Au sein de la rédaction de Minute, on se frotte les mains. « L’objectif, c’était de faire parler de nous, raconte un journaliste de l’hebdomadaire. On voulait se payer un coup de pub pour zéro euro, le contrat est rempli au-delà de nos espérances. »
Surtout que cette couverture, qui est sans doute la plus polémique de l’histoire du journal, a été improvisée en catastrophe. « Durant le week-end, nous n’avions pas vraiment d’idées de couverture, confie ce même journaliste. On pensait faire notre une sur la guerre de 14-18 et puis finalement, l’un d’entre nous a proposé cette blague de comptoir sur Taubira. Ça a fait marrer tout le monde, on a alors décidé de la faire. »
« Nous sommes difficilement condamnables »
En fin de journée mardi, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a saisi le procureur de la République de Paris afin « de porter ces faits susceptibles de constituer l’infraction d’injure publique à caractère racial ». Tandis que le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, a affirmé qu’il étudiait « les moyens d’agir contre la diffusion » de l’hebdomadaire d’extrême droite. L’association SOS Racisme a quant à elle annoncé qu’elle allait déposer plainte pour incitation à la haine raciale.
Au sein de la rédaction de Minute, on ne craint pas de répercussions judiciaires. « C’est une couverture composée d’éléments de langage courant, se défend un collaborateur. On se doutait que SOS Racisme porterait plainte, mais nous avons prévu le coup du point de vue judiciaire. Nous sommes difficilement condamnables. »
Un moyen de se relancer pour Minute
Fondé en 1962 par des partisans de l’Algérie française, Minute n’est plus le journal qui tirait jusqu’à 250 000 exemplaires par semaine dans les années 60 et 70. Depuis les années 80, l’hebdo est en déclin. En rachetant le titre en 1993, Gérald Penciolelli a pourtant tenté de transformer Minute en “Canard enchainé de droite”. La pagination a été augmentée et l’équipe de rédaction étoffée mais l’hebdo n’est pas parvenu à reconquérir son public. La scission entre Bruno Mégret et Jean-Marie Le Pen en 1998 a été quasiment fatale au journal qui avait refusé de prendre parti entre les deux rivaux. En avril 1999, la société éditrice de Gérald Penciolelli, en cessation de paiement, a été liquidée par le tribunal de commerce.
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En 2002, Jean-Marie Molitor rachète le titre. « Il a racheté le journal en empruntant à des amis, raconte un journaliste. Durant des années, il ne s’est pas payé pour relancer le journal. » Pour survivre, Minute a réduit ses coûts au maximum. L’hebdomadaire fonctionne avec une équipe de pigistes extérieurs et ne dispose d’aucun bureau.
Aujourd’hui, Minute ne communique plus sur ses chiffres en kiosque mais les abonnements représenteraient entre 60 et 70% de ses ventes, d’après une source interne. Désormais concurrencé sur sa droite par Valeurs actuelles, l’hebdomadaire Minute s’est aventuré sur un terrain où il se sait difficile à suivre.
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