Ce précurseur d’internet aura bien mérité de la patrie. Souvenirs en rose.
Le Minitel c’est (presque) fini : après trente ans pile de bons et loyaux services, et suite à une longue agonie, le petit terminal monochrome tirera sa révérence le 30 juin 2012, sous l’oeil embué de son papa France Télécom. En dépit des 30 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel (en 2010) et du petit million d’exemplaires encore en circulation, l’opérateur a décidé d’euthanasier son invention miraculeuse, précurseur bleu-blanc-rouge d’internet.
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La lutte a été longue, mais le web, infiniment plus performant (les autoroutes de l’information expliquées par les Deschiens), aura finalement eu sa peau. C’est en 1977 que tout avait commencé (comme le rappelle Bernard Marti, son inventeur, sur Europe 1), par un rapport de Simon Nora et Alain Minc sur la société de l’information, convainquant le président Valéry Giscard d’Estaing de la nécessité d’équiper tous les foyers français d’un appareil qui leur donnerait accès à des informations centralisées sur un serveur, le premier du genre. En 1982, après une phase expérimentale, le Minitel est lancé.
Mais à quoi ça servait, exactement ? Pour beaucoup, à trouver des adresses et des numéros de téléphone (le fameux 3611, dont Gérard Neyret fait ici un ardent plaidoyer).
Sur Lemonde.fr, des témoins se rappellent des « souvenirs d’érotisme minimaliste, de la lenteur et des factures salées ». Pour Papi et Mamie, c’était aussi la possibilité, grâce aux petites annonces online, de mettre la main sur la « dauphine bleue avec intérieur rouge, et le volant sport » (pub de 1992 pour 3615 MGS), « celle qu’ils avaient quand ils se sont rencontrés », pardi.
Mais surtout, pour beaucoup, le Minitel c’était du rose. Du rose honteux qu’on tentait, adolescents, de cacher aux parents, jusqu’à l’arrivée de la facture fatale, en fin de mois (témoignages d’opérateurs érotiques sur sexactu.com). Du sexe illicite, avec ses réseaux de prostitution illégale et ses atteintes aux bonnes moeurs, contre lequel le présentateur du JT Noël Mamère mettait en garde ses téléspectateurs en 1986.
Du rose lucratif, notamment pour Xavier Niel, fondateur de Free (l’épopée des millionnaires du 3615 sur Libération.fr). Du rose rigolo aussi, bien sûr (souvenez-vous de 3615 ULLA, nous encourage Groland, youtu.be/5QdRnAfF_Vc).
Le Minitel, enfin, c’était du rose bizarre et avant-gardiste, artistique à certains égards, à l’image de cette « adaptation » de Justine du marquis de Sade dont voici le résultat.
Minitel, nous ne t’oublierons pas.
Jacky Goldberg
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