Grâce à une incroyable “remontada”, le réalisateur de Merci patron ! a été élu député de la Somme. Une victoire rafraîchissante et, surtout, un exemple à suivre.
“C’est ma bataille. Est-ce que c’est une bataille de Don Quichotte ? Au pire, je me dis que ça fera un bon livre. Mais au fond de moi, je pense que si Mélenchon, les communistes et les écolos m’ont donné les clés du camion, c’est qu’ils ont confiance et que cette bataille peut avoir valeur d’exemple. C’est peut-être à Amiens qu’on posera les premières briques de la gauche de demain.”
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Ainsi parlait François Ruffin aux Inrockuptibles, dans le reportage que Mathieu Dejean et David Doucet lui consacraient le 29 mars et que nous avions porté en couverture, titrant “L’Autre Campagne”. Dimanche, dans la Somme, Ruffin a battu le candidat de La République en marche avec 55,97 % des suffrages, opérant ce qu’il a appelé lui-même une incroyable “remontada” (il avait fini deuxième au premier tour, à dix points du “marcheur”).
Un combat gagné haut la main
Cette victoire nette de Ruffin est sans aucun doute la plus intéressante et la plus rafraîchissante de ce scrutin législatif, marqué par la déroute absolue des professionnels de la politique. Pourquoi ? Parce que l’auteur de Merci patron ! a fait bien plus que de capitaliser sur son aura de “Michael Moore à la française” et de détenteur du César du meilleur film documentaire 2017.
Dans la Somme, dans cette bataille qu’il a menée pied à pied, Ruffin s’était fixé comme objectif de faire de sa circonscription le lieu de l’invention d’un langage de combat, capable de battre la rhétorique implacable du Front national (surtout dans une telle région, plombée par la déroute industrielle et les délocalisations). C’est ce combat qu’il a gagné, haut la main, en menant chaque jour une campagne intelligente, ancrée, ludique, mobilisatrice et généreuse, à des années-lumière des novlangues importées depuis Paris.
Et c’est de ce combat qu’il faut désormais s’inspirer pour contrer dès aujourd’hui l’extrême droite et ne plus avoir à chercher une quelconque “utilité” à notre vote, aux dépens de nos propres convictions. Penser son discours, le construire, l’assumer, le porter, le défendre : des fondamentaux dont Ruffin nous rappelle qu’ils sont encore au cœur du projet démocratique, projet qui ne se réduit pas, comme on a voulu nous le faire croire ces derniers mois, aux compromis indigents ou pire, à la tambouille à courte vue.
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