Sondages en baisse et propos polémiques sont venus contrarier la fin de campagne de Marine Le Pen. A Marseille, pour son dernier meeting, la candidate du FN n’a pas réussi à dissiper le sentiment que sa campagne cale à quelques jours du premier tour.
C’est une fin de campagne en trompe-l’œil. Ce mercredi 19 avril, sous le Dôme de Marseille, Marine Le Pen tenait son dernier meeting avant le premier tour de la présidentielle. Devant un public chauffé à blanc par les saillies de Marion Maréchal-Le Pen pourfendant « l’estrosisme » puis par la grandiloquence de Stéphane Ravier (le local de l’étape) comparant ses troupes aux soldats de Napoléon à la veille d’Austerlitz, la présidente du FN a tenu un discours tiède et sans reliefs.
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Loin de ses imprécations contre l’islam et le multiculturalisme tenues quelques jours plus tôt lors de son meeting à Paris, Marine Le Pen a délivré un discours catalogue, passant en revue ses diverses propositions sans vraiment s’y attarder. Alors que sa campagne patine, on aurait pu s’attendre à un dernier discours se focalisant sur l’immigration et l’islam comme en 2012. Il n’en a été question qu’au bout de 45 minutes où elle a répété qu’elle souhaitait « expulser les fichés S », « dissoudre l’UOIF« , « instaurer un moratoire sur l’immigration » dès son arrivée au pouvoir et faire appel aux réservistes de l’armée pour contrôler les frontières.
Chaises vides et public passif
La fille de Jean-Marie Le Pen a longuement disserté sur la souveraineté populaire, la notion de fraternité ou bien encore sur le patriotisme économique. Prompt à s’emballer (« On est chez nous…On est chez nous… ») ou à insulter Mélenchon (« Crasseux! »), le public provençal est resté sur sa faim.
Censée la mettre sur orbite et galvaniser ses troupes avant le premier tour, ce meeting n’a pas dissipé le sentiment d’une campagne qui cale dans les derniers mètres. Malgré un dispositif de sécurité draconien et des bus venus de toute la France, 400 à 500 places sur les 5 000 de la salle sont restées libres. Un contraste saisissant lorsque l’on songe que dix jours plus tôt, Jean-Luc Mélenchon n’avait eu aucun mal à réunir sur le Vieux Port plus d’une dizaine de milliers de personnes pour un meeting à ciel ouvert.
Communication en berne
Donnée à 28 % d’intentions de vote il y a un an, Marine Le Pen a vu sa courbe s’affaisser au fil des mois. Elle est aujourd’hui donnée à moins de 25 % par plusieurs instituts de sondages. Embourbée dans une litanie d’affaires judiciaires, elle n’a pas pu tirer profit des déboires de François Fillon. Alors que le FN ne s’est jamais privé d’entonner son fameux slogan (« Mains propres et tête haute… »), la présidente du FN a été étonnamment silencieuse sur le sujet.
De la même manière, alors qu’elle accuse un déficit d’image, elle n’est pas parvenue à présenter une facette moins rébarbative. Malgré un clip de campagne la présentant comme un leader souriant et déterminé face à l’adversité, les polémiques sur le Vél d’Hiv’ et la colonisation sont venues contrarier cette opération de com’.
Interrogé par Les Inrocks, l’historien Nicolas Lebourg estime que la candidate du FN n’est pas parvenue à « construire un discours général ». « Elle a cherché à séduire différents segments sociologiques mais elle n’y avait pas de vision d’ensemble dans son projet », ajoute-t-il.
Des sondages inquiétants
Après son échec au premier tour de l’élection présidentielle de 2012, Marine Le Pen donne l’impression de n’avoir pas fait pleinement campagne. Comme un symbole, alors que le FN a longtemps été prescripteur sur le web, le parti d’extrême droite a été devancé sur ce terrain par Jean-Luc Mélenchon et la France Insoumise. L’inventivité des débuts sur Internet (création d’un jeu vidéo avec la figure de Jean-Marie Le Pen dans les années 90, recours massif à la vidéo dès 2002…) a laissé place à une communication sans imagination. Comme si Marine Le Pen avait davantage pris garde à conforter sa position de leader sondagier plutôt qu’à prendre des risques pour séduire de nouveaux électeurs.
S’il est encore trop tôt pour tirer le bilan, les derniers indicateurs sont de nature à donner des sueurs froides à l’état-major frontiste. Selon une enquête du Cevipof pour Le Monde, les intentions de vote en faveur de Marine Le Pen plafonnent à 77 % parmi ses électeurs de 2012 tandis que selon BVA, dans le cadre d’un second tour où leur candidat aurait été éliminé, les électeurs de François Fillon préféreraient se rabattre à 43 % sur Emmanuel Macron plutôt que sur Marine Le Pen.
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