Parler de la mode, du style et du design autrement : tel est le projet de Magazine, trimestriel qui expose onze ans d’expérimentation et d’irrévérence à la galerie 12 Mail.
Faire un magazine qui parle des magazines. Telle était l’idée au départ de l’aventure, lancée en 1999 par Angelo Cirimele, philosophe de formation, Yorgo Tloupas, directeur artistique, et Alexandre Thumerelle, patron de la librairie-galerie Ofr.
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« Les émissions qui m’intéressaient le plus à la télévision étaient celles qui parlaient de télé, explique Angelo Cirimele. Idem au cinéma, j’aimais les films sur le cinéma. J’aimais l’idée de chroniquer les magazines comme des livres. On prend rarement le temps de décortiquer ce qu’est l’idée directrice des magazines ou hebdos qu’on lit. »
Magazine est alors gratuit, trimestriel, tire à 30 000 exemplaires et est distribué à Paris, dans des boutiques et points stratégiques. En plus de ses chroniques de magazines, il s’inspire de la mouvance life-style qui pointe dans la presse anglo-saxonne à cette époque (Wallpaper, etc.) et s’intéresse à l’art, au design, au style, à la mode.
« L’information était dans la forme, plus dans le fond. Je trouvais ça intéressant d’utiliser un espace à deux dimensions, comme une galerie de 50 mètres carrés. » Seuls champs interdits : l’actu et le people.
« Je ne vois pas ce qu’on aurait apporté à faire la dix-septième interview de Jay-Jay Johanson. Et on ne voulait pas bosser avec des journalistes. On voulait montrer d’autres tons, d’autres manières de penser ».
Artistes (telles Valérie Mréjen ou Chloé Delaume), professionnels, critiques d’art et amis participent au titre. Au cinquième numéro, Magazine prend une décision qui le rendra culte dans le milieu de l’art et du graphisme : changer de DA à chaque exemplaire. H5, Laurent Fétis, Surface to Air, Peter Knapp entre autres, réalisent des numéros aujourd’hui collectors. » On ne se demandait jamais ce qu’on allait raconter dans le prochain, mais qui allait le faire », se souvient Angelo.
Depuis un an, Magazine a pourtant révolutionné ses principes fondateurs et lancé une nouvelle formule : payante, dans un format plus grand et une distribution plus classique. «
Au bout de onze ans, ça commençait à ronronner, explique Angelo. Dans les années 2000, faire un mag gratuit avec du contenu, c’était un vrai positionnement et ça montrait une liberté face au mode de distribution. Aujourd’hui, je ne vois plus grand-chose de gratuit qui m’amuse. J’ai davantage envie de faire un bel objet qui change tout le temps. »
Et redevenir un objet de désir, à la façon des Monocle ou Fantastic Man. Un pari gagné au vu de la nouvelle formule, plus dense et très réussie graphiquement. Elle conserve les rubriques phare (« Off record », interview à couvert d’un professionnel qui raconte les dessous de la mode), en crée de nouvelles (« Lexique », qui retrace par exemple l’évolution du mot « cool » à travers les époques) et accorde une place accrue à la mode.
« C’est l’imagerie qui a le plus de renouvellement depuis dix ans, le plus de puissance. C’est là que ça se passe, explique Angelo. On s’est donc demandé ce qu’on avait à dire sur la mode. »
Magazine aligne du coup des reportages et des interviews mais, fidèle à son esprit, détourne, s’amuse en proposant des séries qui ne ressemblent à aucune autre, met un mannequin au milieu d’une expo design (photo). « Quel est le sujet finalement ? L’expo, la fille ? Les fringues ? » Réponse jusqu’au 10 juin sur les murs de la galerie 12 Mail, pour une expo où Angelo Cirimele et Yorgo Tloupas ont carte blanche.
Géraldine Sarratia
Magazine, trimestriel, 5€, en kiosque.
Exposition Magazine Magazine à la galerie 12 Mail, 12, rue du Mail, Paris IIe www.12mail.fr
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